Variole du singe : une nouvelle IST endémique ?
- Fanny Le Brun
- Actualités Médicales
Depuis le 7 mai 2022, une épidémie de cas humains de variole du singe est constatée en Europe, en Amérique du Nord et en Australie.
Au 19 juillet, 1.453 cas confirmés ont été recensés en France. Cette zoonose est due au monkeypox virus (MPXV) qui appartient au genre des Orthopoxvirus, comme le virus de la variole humaine qui est éradiqué depuis 1980. Heureusement, la variole du singe est beaucoup moins grave que ne l’était la variole humaine. Elle évolue le plus souvent favorablement et peut être prévenue à 85% par l’immunité croisée induite par la vaccination antivariolique.
Des changements majeurs dans l’épidémiologie de cette zoonose ?
Le MPXV a été découvert chez des macaques en 1958 mais n’est pas un virus simien : son réservoir semble être partagé entre plusieurs espèces de rongeurs sauvages africains. Le premier cas humain a été décrit en 1970 chez un enfant en République démocratique du Congo, puis cette infection a émergé dans plusieurs régions d’Afrique centrale et occidentale. Avant l’épidémie actuelle, des cas avaient déjà été décrits hors d’Afrique, par exemple en 2003 dans le Midwest américain où 71 personnes ont été contaminées par des rongeurs autochtones, eux-mêmes contaminés dans une animalerie par des rats de Gambie importés du Ghana. Cependant, l’épidémie actuelle révèle des changements majeurs dans l’épidémiologie de cette zoonose tropicale :
- Les personnes contaminées ne reviennent pas d’un voyage en Afrique, à l’exception du premier cas au Royaume-Uni, qui revenait du Nigéria ;
- Les contaminations ne sont pas d’origine zoonotique mais liées à une transmission interhumaine ;
- Une forte prédominance masculine est observée, en majorité des Hommes ayant des relations Sexuelles avec des Hommes (HSH) et ayant des partenaires multiples ;
- La prévalence des localisations génitales et anales de l’éruption vésiculeuse est très élevée (78%).
Une IST qui pourrait devenir endémique ?
La possibilité de transmission interhumaine du MPXV était connue comme pouvant se faire soit directement par contact avec des lésions cutanées ou muqueuses, des fluides corporels, des gouttelettes respiratoires, ou indirectement par l’intermédiaire d’objets contaminés. Cependant, jusqu’ici, la voie sexuelle n’avait pas été décrite parmi les modes de transmission interhumaine et les HSH n’étaient pas considérés comme une population à risque. Pourtant, on constate que tous les cas recensés aujourd’hui en France sont des adultes de sexe masculin (exceptés 6 adultes de sexe féminin et 2 enfants) et que 96% des cas pour lesquels l'orientation sexuelle est renseignée sont survenus chez des hommes ayant des relations sexuelles avec des hommes. L’Académie de médecine estime que « cette forme épidémique de variole du singe en fait une nouvelle IST, le virus ayant été isolé dans le sperme de patients ». Cette évolution pourrait être liée à la modification du virus qui semble s’être adapté à l’Homme, ce qui laisse craindre l’établissement de réservoirs humains et une évolution endémique de la maladie.
Quelles sont les recommandations de l’Académie de médecine ?
Face à cette situation, l’Académie nationale de médecine recommande de mettre en œuvre toutes les mesures disponibles permettant de contrôler la diffusion de la variole du singe, comme :
- Définir les populations à risque sans les stigmatiser ;
- Sensibiliser les professionnels de santé chargés du dépistage et du traitement des IST à la détection précoce des cas de variole du singe ;
- Informer le public sur les aspects cliniques et les modalités de transmission de cette infection ;
- Rappeler à tous les cas confirmés de s’isoler pendant 21 jours et de contribuer au traçage des personnes qu’elles ont pu contaminer ;
- Identifier les personnes contact autour de chaque cas et leur proposer une vaccination post-exposition, celle-ci étant d’autant plus efficace qu’elle est effectuée rapidement après l’exposition ;
- Promouvoir les mesures d’hygiène à adopter par les proches et les professionnels de santé auprès des cas suspects ou confirmés, afin d’éviter toute transmission directe ou indirecte ;
- Éviter le contact entre les cas et les animaux pendant la maladie jusqu’à la chute des croûtes ;
- Évaluer le rapport bénéfices / risques d’une vaccination pré-exposition des personnes à risque.
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