Un traitement révolutionnaire pour la maladie d’Alzheimer?

  • Serge Cannasse
  • Actualités Médicales
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Début juillet 2023, l’agence américaine des médicaments (FDA – Food and Drug Administration) donnait une autorisation de mise sur le marché au lécanémab (nom commercial : Leqembi(R)) dans le traitement des troubles cognitifs légers liés à la maladie d’Alzheimer. Cette molécule est une immunothérapie visant à réduire les plaques amyloïdes en visant l’amyloïde béta. Elle est proche d’un autre anticorps monoclonal dirigé contre ce même amyloïde. La molécule avait été approuvée suite à une procédure accélérée diligentée au vu des résultats d’une étude de phase 2. L’autorisation de mise sur le marché intervient après la publication des résultats d’une étude de phase 3 contre placebo publiée dans le NEJM (New England Journal of Medicine) en janvier 2023. Comme l’indique la Fondation Vaincre Alzheimer 1, elle élargit la population bénéficiaire potentielle à environ un million de patients américains, pour un coût par traitement estimé à 24.000 euros par an. Une demande d’autorisation européenne de mise sur le marché a été déposée.

Le critère de jugement principal de l’essai randomisé de phase 3, qui était le score CDR-SB (Clinical Dementia Rating-Sum of Boxes), s’échelonnant de 0 (pas de déclin cognitif) à 18 (démence sévère). Les critères secondaires comportaient la mesure de la charge amyloïde par TEP-Scan, le score sur l’échelle ADAS-Cog 14 (14-item Alzheimer’s Disease Assessment Scale-Cognitive Subscale) et l’évaluation des effets indésirables. Cet essai a inclus 1.795 adultes de 50 à 90 ans souffrant d’un déclin cognitif léger lié à la maladie d’Alzheimer, répartis en deux bras, l’un recevant un placebo, l’autre la molécule testée. Le traitement a été administré par voie intraveineuse toutes les deux semaines pendant 18 mois.

À l’inclusion, le score CDR-SB était en moyenne de 3,2. À la fin de la période de traitement, il était en moyenne de 1,21 dans le groupe traité par lécanémab et de 1,66 dans le groupe placebo 2. Il s’est donc amélioré dans les deux groupes, avec une différence significative de -0,45 en faveur du lécanémab (Odds Ratio 1,44 ; p<0,001). Cependant, cette différence est trop faible pour avoir à elle seule une pertinence clinique. Celle-ci doit être évaluée au regard des autres données.

Dans un sous-groupe de 698 patients ayant bénéficié d’un TEP-scan (354 du groupe traité, 344 du groupe placebo), la charge amyloïde était significativement réduite dans le cerveau des patients traités. En outre, ces derniers avaient une meilleure diminution du score ADAS-cog 14.

Cependant, l’évaluation des effets indésirables pondère ces bons résultats. Ceux liés à la perfusion étaient plus fréquents dans le groupe traité (26,4% des patients concernés versus 7,4% dans le groupe placebo), ainsi que les événements indésirables graves (14% vs 11,3% respectivement). Les ARIA (Amyloid–Related Imaging Abnormalities3 – réactions inflammatoires et/ou hémorragiques cérébrales – étaient les effets indésirables graves les plus fréquents, touchant 21,3% des patients traités versus 9,3% de ceux du groupe placebo. Le risque d’hémorragie cérébrale était augmenté chez les patients recevant un traitement exposant à ce risque (anticoagulant, antiagrégant plaquettaire, anti­-inflammatoires non stéroïdien, etc.).

Aussi plusieurs cliniciens estiment que le lécanémab doit faire l’objet d’essais à plus long terme. Et ils rappellent qu’actuellement les prises en charge les plus utiles associent des mesures d’accompagnement au quotidien (aide à domicile), d’aménagement ou de changement de l’habitat et de soutien psychologique 4.