Un surrisque de démence observé chez les utilisateurs réguliers de laxatif
- Agnès Lara
- Résumé d’article
À retenir
- Selon une large étude prospective menée chez des sujets de 40 à 69 ans avec un suivi de 10 ans, l’usage régulier de laxatif est associé à un risque accru de démence toutes causes confondues et de démences vasculaires.
- Ce surrisque apparaît de façon plus importante chez les sujets utilisant régulièrement plusieurs types de laxatif et chez les utilisateurs de laxatifs osmotiques.
- Le surrisque associé à l’usage régulier de laxatifs osmotiques persiste après ajustement sur différents facteurs confondants et pourrait être lié selon les auteurs à une perturbation de l’axe microbiote-intestin-cerveau, mais le lien de cause à effet nécessite encore d’être confirmé.
Pourquoi est-ce important ?
Aujourd’hui, seules 40% des démences peuvent être attribuées à des facteurs de risque modifiables connus. L’identification de nouveaux facteurs apparaît donc essentielle pour alléger le fardeau de ces pathologies dans les années à venir. L’usage de laxatif, qui concerne 40% des sujets âgés vivant en communauté et 70% de ceux placés en institution et qui est en augmentation constante, pourrait bien être l’un d’eux. En effet, leur usage régulier peut modifier l’équilibre du microbiote intestinal, et donc la réponse immunitaire et le dialogue avec le système nerveux qui contribue aux fonctions cognitives. Une dysbiose du microbiote intestinal favorise la production de toxines intestinales qui ont pu être associées au dépôt de protéines bêta-amyloïdes et à une réponse inflammatoire chez l’animal. Une équipe chinoise a donc souhaité explorer la possibilité d’une association entre usage régulier de laxatif et démence en population.
Méthodologie
Cette étude prospective a été réalisée à partir de la base de données britannique UK Biobank et a inclus des sujets de 40 à 69 ans sans antécédents de démence. L’usage de laxatif était établi à l’inclusion à partir d’un auto-questionnaire et d’un entretien. L’usage régulier était défini comme une utilisation quasi-quotidienne au cours des 4 dernières semaines.
Les démences toutes causes confondues constituaient le critère principal de jugement, et les maladies d’Alzheimer et les démences vasculaires, des critères secondaires. Ces pathologies étaient identifiées à partir des données de soins primaires, des hospitalisations ou des registres de décès. Les sujets étaient suivis jusqu’à la survenue d’une démence ou jusqu’au décès. L’association (Hazard Ratio, HR) entre usage régulier de laxatif et incidence de démence a été recherchée.
Principaux résultats
Au total, 502.229 sujets d’un âge moyen de 56,5 ans ont été identifiés comme éligibles pour l’étude (54,4% de femmes). Parmi eux, 18.235 (3,6%) ont rapporté un usage régulier de laxatif.
Sur une période de suivi de 9,8 ans, 2.187 cas de démence toutes causes confondues ont été enregistrés correspondant à 1,3% des sujets utilisateurs réguliers de laxatif et 0,4% des non utilisateurs.
L’analyse multivariée menée sur 476.219 sujets, dont 16.703 utilisateurs réguliers de laxatif, a montré que cet usage régulier était associé à un risque accru de démence toutes causes confondues (Hazard Ratio (HR) 1,51 [1,30-1,75]) et de démence vasculaire (HR 1,65 [1,21-2,27]), par rapport aux non utilisateurs. En revanche, aucune association n’a été retrouvée avec la maladie d’Alzheimer.
Par rapport aux non utilisateurs, le risque de démence toutes causes augmentait avec le nombre de laxatifs utilisés chez les utilisateurs réguliers : HR ajusté (HRa) de 1,28 [1,03-1,61] pour l’usage d’un seul laxatif contre 1,90 [1,20-3,01] pour l’association de 2 laxatifs ou plus. La comparaison de l’usage de chaque type de laxatif au groupe de référence a montré que seul l’usage de laxatifs osmotiques était associé un risque accru de démence toutes causes : HRa 1,64 [1,20-2,24]. Ces mêmes associations étaient observées pour le risque de démence vasculaire et ne variaient pas selon l’âge, le sexe, le niveau d’éducation ou socio-économique, ni même en fonction de l’existence d’antécédents d’AVC ou d’usage d’opioïdes. Un risque accru était encore observé pour les laxatifs osmotiques lorsque l’usage de laxatifs de lest était pris comme groupe de référence suggérant que ce surrisque ne serait pas lié à la constipation, mais plutôt à un effet propre de ce type de laxatif, peut-être via un effet sur l’axe microbiote-intestin-cerveau.
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