Un microbiote intestinal inattendu chez les enfants souffrant de malnutrition chronique

  • Serge Cannasse
  • Actualités Médicales
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Dans le monde, un enfant sur quatre de moins de cinq ans souffre de malnutrition chronique, responsable de plus de 3 millions de morts chaque année. Elle entraine de profonds troubles du développement physique et cognitif, notamment des retards de croissance. Une prise en charge classique (apport de micronutriments et d’une alimentation abondante et équilibrée, traitement des infections associées) n’en corrige qu’environ 30%. Il existe donc vraisemblablement des phénomènes non encore élucidés dont la correction constituerait un grand progrès. C’est l’objet du projet Afribiota, mené par les Instituts Pasteur de Paris, de Madagascar et de Bangui (République Centrafricaine), en collaboration avec l’Université de la Colombie-Britannique, l’INSERM et le Collège de France.

Les résultats d’une première étude viennent d’être publiés dans la revue PNAS. Son objectif était de caractériser les populations bactériennes colonisant l’intestin grêle des enfants souffrant de malnutrition chronique. Pour cela, les chercheurs ont analysé les selles et le liquide duodénal de 400 enfants vivant à Tananarive (Madagascar) et à Bangui, avec ou sans problème de malnutrition. Comme l’explique Pascale Vonaesch, docteur en microbiologie au sein de l’unité de Pathogénie microbienne moléculaire de l’Institut Pasteur, « on s’attendait à voir une augmentation des bactéries entéropathogènes, comme Campylobacter, Shigelles ou Salmonelles, mais en aucun cas des bactéries de la sphère oropharyngée. » Ce résultat est d’autant plus surprenant que cette augmentation est massive, avec un nombre de bactéries de la sphère oropharyngée dix à cent fois plus important que chez les sujets témoins. En outre, elle est indépendante de l’origine ethnique, des habitudes alimentaires et de l’environnement de ces enfants.

Son origine reste inexpliquée. Cependant, les enfants malnutris ont souvent aussi une mauvaise hygiène buccale et des rhinopharyngites à répétition. Pour Philippe Sansonetti, directeur de l’unité de Pathogénie microbienne moléculaire de l’Institut Pasteur et Professeur au Collège de France, « il pourrait y avoir une surcroissance de la flore buccale et rhinopharyngée qui serait ensuite avalée et arriverait, faute de contrôle efficace, vers le système digestif. » Si cette hypothèse est valide, elle pourrait conduire à délivrer des messages de prévention efficaces.