Transmission du SARS-CoV-2 par aérosols : faut-il élargir les mesures barrières ?

  • Agnès Lara
  • Actualités Médicales
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Un éditorial de Julian Tang et collaborateurs de l’Université de Leicester (Royaume-Uni) paru dans le British Medical Journal incite à s’interroger sur la place des aérosols dans la transmission du SARS-CoV-2 et les conséquences qu’ils serait judicieux d’en tirer en termes de mesures barrières.

Ce que l’on sait aujourd’hui de la transmission

Les sujets infectés par le SARS-CoV-2 émettent des aérosols respiratoires de petite taille chargés de particules virales. Ces particules qui peuvent être directement inhalées par d’autres individus sont définies comme des gouttelettes lorsqu’elles ont un diamètre de plus de 5 µm, ou des noyaux de gouttelette qui sont des résidus secs des aérosols respiratoires issus de l’évaporation de gouttelettes, lorsque leur diamètre est inférieur ou égal à 5 µm [1]. Les premières tombent rapidement sous l’effet de leur poids et infectent préférentiellement les sujets dans un périmètre inférieur à 1 m. Il est traditionnellement admis que ce sont elles qui sont le plus souvent responsables de la transmission virale car leur concentration est plus élevée à proximité de la source. Les particules de plus petites tailles peuvent quant à elles parcourir de plus grandes distances (>2m), avec cependant une moindre probabilité de conserver une concentration suffisante à distance de leur source pour rester infectantes, tout au moins en milieu ouvert. Quant à la transmission par les surfaces contaminées, elle est aujourd’hui considérée comme intervenant peu dans les mécanismes de transmission.

Les mesures barrières mises en place sont-elles suffisantes ?

Le port du masque, la distanciation sociale et les systèmes de jauge réduisant la densité d’occupation des bâtiments sont reconnus comme efficaces pour limiter la transmission virale. Le port du masque suffisamment filtrant et bien ajusté est notamment efficace pour retenir les gouttelettes chargées de particules virales, même si certaines peuvent tout de même passer par les bords du masque ou à travers les mailles selon leur taille.

Mais pour les auteurs de cet éditorial, les aérosols de plus petite taille qui peuvent rester plusieurs heures en suspension dans l’air après que les personnes infectées aient quitté les lieux joueraient également un rôle important dans la transmission du SARS-CoV-2. Si leur contribution est probablement faible dans les interactions courantes de courte durée et à distance d’un mètre, il en va tout autrement lorsqu’ils s’accumulent dans un espace confiné et insuffisamment ventilé. Cela expliquerait pourquoi de nombreux professionnels de santé ont été infectés malgré le port du masque, sans pour autant avoir pratiqué d’interventions médicales générant des aérosols. 

Ventilation et amélioration de la qualité de l’air, des mesures complémentaires essentielles

Alors que l’on commence à envisager la possibilité que le SARS-CoV-2 devienne un virus saisonnier au même titre que le grippe, Tang et collaborateurs appellent à une plus grande vigilance sur la qualité de l’air intérieur. Le renouvellement de l’air par aération des locaux recevant du public ou le recours à des systèmes de filtration, notamment dans les lieux de soins, et les locaux professionnels ou dédiés à l’éducation, devraient prendre une place plus importante dans les recommandations des autorités de santé pour freiner la transmission aérienne du virus aujourd’hui comme dans les années à venir.

 

[1]   Gehanno JF et al. Evidences for a possible airborne transmission of SARS-CoV-2 in the COVID-19 crisis. Achives des maladies professionnelles et de l’environnement 2020 ;81(4):306-315.