TOP 50 des propositions de l'Ordre aux futurs candidats à la présidentielle

  • Christophe Gattuso

  • Nathalie Barrès
  • Actualités Médicales par Medscape
L'accès à l'intégralité du contenu de ce site est reservé uniquement aux professionnels de santé disposant d'un compte. L'accès à l'intégralité du contenu de ce site est reservé uniquement aux professionnels de santé disposant d'un compte.

Regrettant que la santé soit oubliée de la campagne présidentielle, l’Ordre national des médecins (Cnom) a présenté son propre programme, jeudi 10 février. Au terme d’une consultation de près de 17.000 médecins, le Cnom a listé ses priorités pour transformer le système de santé. Il propose notamment de garantir un « principe d’égalité républicaine » dans l’accès aux soins, suggère de rendre du temps médical aux médecins et souhaite faciliter les évolutions de carrière.

Après deux ans de crise sanitaire, les médecins sont las. 79% d’entre eux estiment que le système de santé s’est détérioré. Tels sont deux des enseignements majeurs d’une vaste enquête en ligne menée en ligne par l’Ordre entre le 13 octobre et le 30 novembre 2021, à laquelle ont répondu 16.800 praticiens (dont 1.355 étudiants). S’ils continuent d’être majoritairement « fiers » (86%) et « heureux » (83%) de leur métier, la moitié des médecins ressentent de la lassitude de l’anxiété et de la colère. Seuls 70% choisiraient à nouveau aujourd’hui de devenir docteur – une part qui chute même à 54% chez les étudiants ! Un phénomène qui illustre parfaitement ce malaise : quatre praticiens sur cinq ont le sentiment que l’administratif a pris le pas sur le temps médical. Deux tiers estiment n’avoir pas le temps pour se former et de faire de la prévention.

 

Le top 50 des propositions

Pourtant, malgré les signaux envoyés ces dernières semaines par la profession, la santé ne parvient pas à percer parmi les thèmes prioritaires de la campagne présidentielle, ne faisant ça et là que l’objet d’annonces parcimonieuses des candidats. « Il y a une inertie politique à faire de la santé un thème de campagne », déplore le Dr Patrick Bouet, président du Cnom. " Il est désormais évident qu’une véritable transformation de notre système de santé s’impose». 

L’Ordre entend donc pousser sur le devant de la scène plusieurs thèmes en cette période pré-électorale. Il a formulé jeudi une cinquantaine de propositions dans un document baptisé « Soigner demain ». Le Cnom veut avant tout « garantir un principe d’égalité républicaine » dans l’accès aux soins. En d’autres mots, il demande que les moyens investis et alloués soient équitables entre les territoires et que la gouvernance en santé revienne davantage à l’échelon local en tenant compte de la parole des patients.

 

Liberté d’installation, égalité républicaine, fraternité coordonnée…

S’il demeure farouchement opposé à toute limitation de la liberté d’installation des praticiens en zone surdotée (comme 64% des médecins dans l’enquête), l’Ordre souhaite en revanche que tous les acteurs du système de soins (du public et du privé, mais aussi les usagers), se sentent investis d’une « responsabilité populationnelle » et coopèrent au sein d’une « mission publique territoriale » pour répondre aux besoins.

Les médecins seraient incités à adhérer à cette mission et une rémunération forfaitaire leur serait accessible ainsi qu’aux membres de l’équipe de soins prenant en charge les patients en situation de précarité ou qui peinent à accéder aux soins. Pour pallier la pénurie de médecins, l’Ordre, comme les pouvoirs publics, table sur une meilleure coordination des professionnels de santé et souhaite que de nouveaux forfaits émergent pour rémunérer les parcours de patient chroniques, polypathologiques ou en situation de handicap.

 

Evolutions de carrière

Pour donner un nouveau souffle à la profession, l’Ordre souhaiterait que le médecin, qui doit selon lui rester l’ordonnateur du parcours de santé des Français, puisse être réellement un acteur de prévention (notamment contre les risques environnementaux).

Même si elle ne réclame plus ouvertement une 4e année de DES pour la médecine générale, l’institution souhaite que la formation initiale des médecins permette une professionnalisation plus rapide des futurs médecins.

Le cursus devrait selon lui comprendre davantage de stages hors de l’hôpital et un « projet d’insertion professionnelle » pendant le 3e cycle. A l’heure où les jeunes médecins expriment leur désir de pouvoir changer de mode d’exercice en cours d’exercice - 76% y sont favorables dans l’enquête – l’Ordre veut faciliter le passage d’une spécialité à une autre, par exemple, grâce à la certification.

« Il faut permettre que les carrières soient évolutives, explique le Dr Bouet. Le temps où l’on faisait comme moi toute sa carrière avec la même fonction au même endroit est révolu, il faut de l’évolutivité et de la flexibilité », a affirmé le généraliste de Villemomble, récemment retraité. L’Ordre demande aussi que soit valorisé l’exercice mixte sans altérer les droits sociaux du médecin.

 

Le numérique : un outil, pas la panacée

S’il convient que les médecins doivent adopter le numérique au profit des patients, avec notamment l’appropriation de Mon Espace Santé ou le développement des téléconsultations et télé-expertises, le Cnom estime que la santé numérique sera un outil, parmi d’autres, pour apporter une réponse à la crise démographique mais elle ne saurait être une solution absolue. De leur côté, 55% des médecins ayant répondu à l’enquête sont persuadés que la télémédecine ne permettra pas d’améliorer l’accès aux soins dans les prochaines années.

Si les discussions autour de la présidentielle ont pour l’heure peu porté sur la santé, l’Ordre espère bien rebattre les cartes avec son plan de transformation du système de santé qu’il aura l’occasion de soumettre aux candidats invités le 17 mars prochain à un débat public sur l’avenir de notre système de santé organisé à Lille par la Fédération hospitalière de France (FHF).

Cet article a été écrit par Christophe Gattuso et a initialement été publié sur le Medscape.