Tabagisme des femmes enceintes : les enfants trinquent !

  • Olives JP & al.
  • Arch Pediatr

  • Nathalie Barrès
  • Résumé d’article
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À retenir 

Une étude française menée auprès de pédiatres et de médecins généralistes sur une cohorte de plus de 1.500 enfants montre que l’exposition in utero au tabagisme de la mère augmente les risques de petit poids de naissance et de symptômes digestifs et respiratoires chez l’enfant. Ces données viennent confirmer les preuves déjà existantes et devraient aider les pouvoirs publics à accentuer les campagnes de sensibilisation. 

Pourquoi ces résultats sont intéressants ?

Selon les données de l’INPES de 2014, le tabagisme chez la femme enceinte serait plus important en France que dans les autres pays d’Europe. L’étude EDEN avait mis en évidence qu’en France, 12,9% des femmes fumaient durant leur grossesse. Les données sur l’impact du tabagisme des femmes enceintes sur la santé de l’enfant spécifiquement menées en France sont encore rares, d’où l’intérêt de cette étude.

Méthodologie

Cette étude observationnelle transversale a été conduite en France par des pédiatres et des médecins généralistes. Elle a comparé une cohorte d’enfants exposés in utero au tabagisme (T+) à d’autres non exposés (T-). Plusieurs critères ont été mesurés : le poids de naissance, l’alimentation, la présence de troubles gastro-intestinaux (coliques selon les critères de Rome III et régurgitations selon l’échelle de Vandenplas).

Principaux résultats

Au global, les 452 médecins participant à l’étude (89,4% de pédiatres) ont recruté 759 T+ et 741 T-. L’âge moyen des mères était de 30,7 ans, 57,3% d’entre elles avaient au moins Bac+2, et 96,5% vivaient en couple. Au moment de la visite du recueil des données, l’âge médian des enfants était de 2.1 mois.

Quelles sont les informations concernant les mères ?

  • Lors de cette visite 43,3% des femmes fumaient, et avaient une consommation quotidienne moyenne estimée à 8,9 cigarettes.
  • La quasi-totalité des femmes fumeuses actives au moment de la visite de recueil des données (98,6%) ont déclaré avoir fumé durant leur grossesse. Parmi elles, 89,6% ont déclaré avoir réduit leur consommation moyenne à 4 cigarettes par jour, 30,1% à 6/jour, et 68,8% ont déclaré avoir eu recours à des substituts nicotiniques durant leur grossesse. 
  • Par rapport aux femmes non-fumeuses, celles qui avaient continué à fumer durant leur grossesse avaient tendance à sous-estimer les risques du tabagisme actif ou passif et à être moins informées sur les possibilités liées aux substituts nicotiniques. Si 90,1% des non-fumeuses avaient conscience de l’influence du tabagisme sur l’allaitement, elles n’étaient que 73,5% chez les fumeuses.

Avaient-elles été informées par les soignants ?

  • Selon les mères, 51,3% avaient reçu des informations de la part de leur médecin pour arrêter complètement de fumer au moment de la grossesse, 38,5% pour diminuer et 10,2% n’auraient reçu aucune recommandation.

Quelles sont les conséquences pour l’enfant :

  • le poids moyen des enfants T+ était significativement plus faible que celui des enfants T- (3,1 versus 3,3 kg, p<0,001) ;
  • à la sortie de la maternité, 47,7% des enfant T+ étaient sous allaitement maternel contre 70,1% des enfants T- ;
  • la durée médiane de l’allaitement maternel était de 1 mois pour les T+ versus2 mois pour les T- ;
  • une proportion significativement plus importante d’enfants présentaient des coliques parmi les T+ par rapport aux T- : 25,6% versus 12,3% si l’on considère les critères de Rome III et 45,7% versus 29,7% si l’on considère les avis des médecins ;
  • les enfants T+ souffraient également plus souvent de régurgitations (63,6% versus 56,5%), de troubles respiratoires (6,3% versus 2,4%) et de bronchiolites (6,5% versus 3,0%).

Limites

Les données ont été recueillies par les médecins et par auto-questionnaires auprès des mères. Ce sont les critères de Rome III qui ont été utilisés et non les critères de Rome IV publiés quelques semaines après la validation du protocole et le début de la collecte des données.

Financements

Cette étude a été financée par le laboratoire Ménarini France.