Survenue de FA chez les insuffisants rénaux chroniques âgés : quand instaurer des anticoagulants ?

  • Kumar S & al.
  • BMJ

  • Agnès Lara
  • Résumé d’article
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À retenir

Si les anticoagulants réduisent le risque de thrombose chez les patients souffrant de fibrillation atriale (FA) en population générale, il semble qu’il n’en soit pas de même chez les patients âgés souffrant d’insuffisance rénale chronique (IRC) non terminale. En effet, chez ces patients ayant nouvellement reçu un diagnostic de fibrillation atriale (FA), l’administration d’un traitement anticoagulant est associée à une augmentation des saignements et à une augmentation des AVC ischémiques. Paradoxalement, une diminution de la mortalité toutes causes est observée et pourrait être liée à un effet protecteur non défini du traitement. Face à ces résultats et aux données discordantes de la littérature, les auteurs soulignent la nécessité d’essais contrôlés randomisés. Ils incitent à considérer l’instauration d’un traitement anticoagulant au cas par cas dans cette population en fonction de la balance bénéfices/risques et en tenant compte des souhaits du patient.

Pourquoi est-ce important ?

La FA est une affection fréquente chez les patients de 65 ans et plus souffrant d’IRC : elle concerne 20% des patients non dialysés et 27% de ceux présentant une IRC terminale, contre seulement 6% dans la population générale. Le risque d’AVC et de saignement majeur augmente avec le déclin du débit de filtration glomérulaire et complique la décision de démarrer ou non un traitement anticoagulant. Les études existantes se sont jusqu’ici davantage intéressées aux patients en IRC terminale. Peu d’entre elles ont été réalisées chez les patients non dialysés et leurs résultats sont contradictoires. Cette étude britannique de cohorte en population a donc recherché l’existence d’une association entre traitement anticoagulant et AVC ischémiques, saignements gastro-intestinaux et cérébraux et la mortalité toutes causes chez des patients âgés souffrant de FA et d’IRC non terminale.

Près de 7.000 sujets âgés traités ou non par anticoagulants

Les données de 2,7 millions de patients issues de 110 médecins généralistes en Angleterre et au Pays de Galles ont été analysées de façon rétrospective entre 2006 et 2016, à partir du réseau du Royal College of General Practitioners. Seuls les patients de 65 ans et plus ayant récemment reçu un diagnostic de fibrillation atriale et présentant un débit de filtration glomérulaire <50mL/min/1,73m2 ont été inclus dans l’analyse (n=6977). Ceux qui avaient reçu un traitement anticoagulant dans les 120 jours précédant le diagnostic, qui nécessitaient une dialyse ou une transplantation rénale, étaient exclus. Les patients ayant reçu un traitement anticoagulant dans les 60 jours suivant le diagnostic de FA (n=2424) ont été appariés selon leur score de propension et comparés à ceux n’en ayant pas reçu (n=4543), sur une durée de suivi moyenne de 500 jours.

Un risque majoré de saignement et d’AVC ischémique sous anticoagulant

Les taux bruts d’AVC ischémiques et de saignements ont été de 4,6 et de 1,2 pour 100 personnes-années chez les patients sous anticoagulants contre 1,5 et 0,4 chez ceux qui n’en recevaient pas.

L’analyse statistique a montré que les AVC ischémiques et les saignements étaient fortement augmentés chez les patients sous traitement anticoagulant (HR 2,60 et 2,42 respectivement), alors que la mortalité toutes causes semblait au contraire diminuée (HR 0,82) par rapport aux patients qui ne recevaient pas ce type de traitement. Et ces résultats persistaient après différentes analyses de sensibilité.

Limitations

Comme toutes les études en « vraie vie », des erreurs de codage de diagnostic ne peuvent être exclues. De plus, les données étaient basées sur les prescriptions, sans évaluation de l’observance.

Seule une faible proportion des patients étaient sous anticoagulant d’action directe. Il n’a donc pas pu être établi de comparaison avec les patients sous anti-vitamine K.