SFRO 2022 – quand et comment peut-on envisager une ré-irradiation ?

  • Caroline Guignot
  • Actualités Congrès
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En clinique, il est de plus en plus souvent envisagé de ré-irradier un volume tumoral, soit face à la rechute de la tumeur primaire, soit dans le cas de cancer métachrone, où une nouvelle tumeur apparaît adjacente au précédent site irradié. La décision reste complexe à prendre, étant donné le manque de données cliniques et de modèle suffisamment fidèle pour en apprécier les bénéfices et risques associés. Pour autant, différents éléments sont déterminants pour amorcer la réflexion : les paramètres de la précédente irradiation, la nature et la sévérité des séquelles qui en ont potentiellement découlées, l'existence d'une alternative chirurgicale, les paramètres liés aux patients (radiosensibilité, âge, comorbidités, traitements associés...). La nature du volume tumoral (évolution, rechute ou récidive), et la visée thérapeutique de cette ré-irradiation (prophylactique, curative, palliative) entrent aussi en ligne de compte.

Données disponibles

L’évaluation des risques associés à une nouvelle irradiation repose principalement sur des données radiobiologiques obtenues sur des modèles animaux : ainsi, l'évaluation de la toxicité de la ré-irradiation d’un organe comme la moelle épinière, dont le renouvellement est lent et pour lequel une dose toxique seuil existe, n'est pas comparable à celle d’une ré-irradiation d’un organe comme le poumon, dans lequel les dysfonctions dépendent du volume préalablement irradié, et qui impose que la réserve fonctionnelle soit prise en compte pour savoir si la réirradiation est envisageable.

Selon certains modèles animaux, la réparation partielle des séquelles liées aux premières irradiations existe, mais le temps ne suffit cependant pas pour ignorer la dose préalablement appliquée : si les symptômes aigus inflammatoires post-radiques peuvent s’estomper, les modifications fibrotiques persistent de façon résiduelle, impliquant différents facteurs de stress oxydant, qui peuvent favoriser une toxicité tardive. Dans le poumon, il a été décrit une rupture alvéolaire secondaire aux irradiations, suivie d’une augmentation de collagène et de fibrose locale et d’une hypoxie persistance compliquant la faisabilité d'une ré-irradiation.

D'autres études précliniques montrent que la ré-irradiation au niveau de la moelle épinière est envisageable à condition que la dose mise en œuvre soit limitée. Enfin, une ré-irradiation locale serait mieux tolérée qu'une nouvelle irradiation à la même dose mais sur un volume plus large, ce qui suggère que le volume total que l'on souhaite irradier a un rôle important pour la décision thérapeutique.

Ces différentes données ont été obtenues à partir de modèles précliniques dont la transposition à l’humain est limitée. Quelques études cliniques ont été menées, et qui ont permis d’établir un score clinique permettant d’aider à prédire le risque de complications liées à une nouvelle irradiation en fonction de la dose biologique efficace cumulée, le délai écoulé entre les deux traitements de radiothérapie et la dose biologique efficace pour l'une de ces deux irradiations.

Le rapport bénéfice-risque doit donc être très rigoureusement établi et discuté notamment avec le patient. Les approches permettant de délivrer des doses élevées au strict niveau de la tumeur tout en évitant les structures critiques et notamment celles des volumes déjà irradiés sont certainement très utiles pour optimiser ce ratio.