SFE 2021- Perturbateurs endocriniens : influences sur le développement thyroïdien et central
- Caroline Guignot
- Actualités Congrès
L’augmentation de maladies comme la sclérose en plaques (SEP) ou les hypothyroïdies congénitales observée ces 30 dernières années pourrait-elle être liée à l’exposition in utero à des perturbateurs endocriniens ? Dans une conférence dédiée du congrès de la SFE qui s’est tenu du 13 ou 16 octobre 2021 au Havre, Jean-Baptiste Fini a présenté une exploration expérimentale de ces questions.
Dans l’évolution, l’apparition de la thyroïde est concomitante à l’apparition de la myéline et la constitution de la tête. Les hormones thyroïdiennes (HT) sont conservées chez tous les vertébrés depuis 450 millions d’années, et sont notamment nécessaires pour la maturation du cerveau.
Il a été décrit que les transporteurs des HT sont présents au niveau placentaire. Et de nombreuses données décrivent bien l'existence d'un impact des modulations hormonales de la mère chez l’enfant. Des perturbations du taux d’TH circulantes pendant la grossesse semblent par exemple favoriser des modulations de certaines structures et fonctions cérébrales chez l'enfant. Les femmes présentant des taux sériques particulièrement bas auraient des enfants dont les scores de quotient intellectuel sont plus faibles, la fonction cognitive réduite et l'activité hippocampique modifiée par rapport à ceux issus de femmes contrôles. D’ailleurs, des modifications morphologiques ont été observées au niveau cérébral. L’exposition de l’axe thyroïdien à des perturbateurs endocriniens pourrait donc conduire à modifier le développement cérébral ou thyroïdien de l’enfant à naître.
Avec une équipe parisienne issue de l’Inserm et du CNRS, le chercheur a conduit des expériences sur différents modèles précliniques afin d’apporter des éléments validant ou non ces hypothèses. Ils ont pour cela utiliser un mélange d’une quinzaine de produits chimiques (métaux, composés halogénés, pesticides, phtalates...) qui a été décrit par ailleurs comme présent chez 90% des participantes d’une cohorte de femmes enceintes. Ce mélange, bien qu’expérimental, a été évalué afin d’apprécier un éventuel effet cocktail du fait de l'association de doses non nécessairement toxiques (ou identifiées comme telles) prises isolément. L’effet du mélange à différentes concentration sur le xénope (embryon et tétard) ainsi que sur des cellules souches neurales et la thyroïde foetale de souris montre que ces molécules, dès une faible dose, ont un impact sur certaines phases critiques du développement
Différenciation et développement
Ainsi, le mélange semble affecter le ratio neurone/glie lors du développement ainsi que la signalisation des hormones thyroïdiennes. Différents gènes impliqués au niveau cérébral sont impactés. Une modification du volume associé aux neurones et aux oligodendrocytes est parallèlement observé chez les tétards. Sur le plan du comportement, les œufs de xénope exposés de façon continue au mélange durant leur croissance ont une mobilité moindre que les autres. C’est un effet T3 ou T4 mimétique, même si l’ensemble des gènes dont l’expression est modifiée sous mélange chimique n'est pas exactement le même que celui identifié lorsqu'il était placé sous HT.
Par ailleurs, chez la souris, le mélange perturbe la myélinisation et la remyélinisation axonale. Il a aussi été récemment décrit que l’évolution des cellules souches neurales étaient placées sous l’influence des HT : leur maturation s’oriente vers les cellules neurales en présence d’HT mais vers des cellules oligodendrocytaires (en charge de la production de myéline) en leur absence.
Le chercheur a souligné que s'il y a bien un effet global du mélange sur la composition des thyroides foetales, l’effet peut être en faveur d’une surexpression ou d’une répression des gènes associés aux HT selon les produits, mais dont la résultante se traduit bien par un bouleversement de l’homéostasie thyroïdienne. L’idéal serait de trouver un biomarqueur du neurodéveloppement qui permettrait de signaler l’existence d’une perturbation quel que soit la voie moléculaire perturbée.
Malheureusement, l’accès à l’intégralité de cet article est reservé uniquement aux professionnels de santé disposant d’un compte.
Vous avez atteint la limite d'articles par visiteur
Inscription gratuite Disponible uniquement pour les professionnels de santé