SFD 2022 - Passage du diabète de type 2 pédiatrique à l’âge adulte : une transition mal assurée

  • Nathalie Raffier

  • Nathalie Barrès
  • Actualités Congrès
L'accès à l'intégralité du contenu de ce site est reservé uniquement aux professionnels de santé disposant d'un compte. L'accès à l'intégralité du contenu de ce site est reservé uniquement aux professionnels de santé disposant d'un compte.

Le pronostic des jeunes diabétiques de type 2 est sombre, a rappelé le Pr Jean-Pierre Riveline lors du Congrès de la Société francophone du diabète qui s'est tenu à Nice les 22-25 mars 2022 (lire notre article Diabète de type 2 pédiatrique : quelles caractéristiques ?). Et pourtant, « la transition entre les services hospitaliers de pédiatrie et de diabétologie adulte est rarement organisée, avec de nombreux perdus de vue », regrette le diabétologue du Centre du diabète et de ses complications (CUDC. Hôpital Lariboisière-Institut Necker Enfants Malades ; INSERM U151, CNRS UMR 8253, Paris). 

Seuls 28% des jeunes patients DT2 de Debré arrivent à Lariboisière

Pour ce qui est de la transition entre les services de diabétologie pédiatrique (Hôpital Robert Debré, Paris) et adulte au Centre du diabète et de ses complications (CUDC) de Lariboisière, sur les cinq dernières années, seuls 28% des patients de Robert Debré (sur 25 au total) ont été vus en consultation adulte, déplore l’intervenant. Les profils sont extrêmement variés, allant des patients sous metformine avec un IMC de 26,6 kg/m2 et une Hba1c de 5,6%, à des patients sous metformine et insulinothérapie basal-bolus, un IMC à 27 kg/met 11,3% d’Hab1c.

Le Centre du diabète et de ses complications de l’hôpital Lariboisière (AP-HAP, Paris) est une structure ambulatoire pluridisciplinaire, ayant dans sa file active 15.572 diabétiques, dont 118 ayant un diabète de type 2 apparus avant l’âge de 20 ans (1% du total des DT2).

Leur profil est le suivant : 37% d’hommes, âgés de 36 ans +/- 15 ans, un âge à la découverte du diabète de 16+/- 3 ans, un IMC de 31 +/-6 kg/m2, un tour de taille de 100 cm +/- 18 ; une HbA1c de 7,9% +/-1,9 et un taux d’ALAT de 35 UI/L +/- 30, « ce qui fait craindre un fort taux de NASH dans cette population », a commenté le Pr Riveline. 

Conformément à la littérature, les complications sont majeures pour une population âgée de seulement 36 ans en moyenne, avec 12,5% de cardiopathies ischémiques, 31,5% de rétinopathies, 40% de néphropathies (4 individus en insuffisance rénale terminale) et 20% de neuropathies. Près de la moitié d’entre eux est sous insuline (43%) dont 50% sous schéma basal-bolus, pour une HbA1c moyenne de 8,3%.

« La situation de ces patients est très préoccupante, conclut le Pr Riveline. On sous-estime grandement la prévalence du DT2 à l’adolescence, ainsi que sa gravité. Alors que leur pronostic est mauvais, l’organisation en France de transition de l’adolescence vers l’âge adulte de ces jeunes diabétiques de type 2 est à structurer ; ce qui est crucial pour la prise en charge de ces jeunes mais également pour la recherche qui pâtit d’un déficit de connaissances sur ce diabète de type 2 apparenté ».

« Le DT2 à l’âge pédiatrique n’est ni du type 1, pas non plus du type 2 » 

« Le diagnostic de diabète de type 2 (DT2) n’est plus rare à l’adolescence en France, et en augmentation ces dernières décennies, affirme le Dr Elise Bismuth-Reisman (service d’endocrinologie et diabétologie pédiatrique, Hôpital universitaire Robert Debré, Paris)[1].

En Europe, la prévalence du DT2 à l’âge pédiatrique serait de 1,3 cas 100.000 personnes. Mais la rareté des cas est probablement due au fait qu’on ne les recherche pas. Le DT2 à l’âge pédiatrique n’est ni du type 1, pas non plus du type 2 comme on le connait chez l’adulte, mais ce trouble de la tolérance glucidique peut se confondre avec les deux, d’où de nombreux pièges diagnostiques.

Le DT2 pédiatrique survient en majorité à la période pubertaire (13-14 ans), et l’on constate une nette prédominance féminine, l’ethnie non caucasienne, et la présence d’une histoire familiale. La présentation inaugurale est assez fréquemment cétosique et entraîner une méprise initiale avec un DT1. Toutefois, la négativité́ des auto-anticorps du DT1 est un argument fort du diagnostic.

Enfin, le DT2 pédiatrique bénéficie d’une prise en charge bien codifiée, mais dans un contexte complexe (précarité, etc.) et sans autres moyens thérapeutiques que la metformine et l’insuline [2]. Elle repose sur le trépied alimentation-activité physique-thérapies médicamenteuses avec, au centre, la prise en charge psycho-sociale. Une publication avec l’analogue du GLP-1 liraglutide a convaincu en 2019 la Food and Drug administration américaine (FDA) et l’Agence européenne du médicament (EMA) de l’autoriser dans cette population pédiatrique à partir de l’âge de 10 ans [3]. »

Liens d’intérêt du Pr Riveline : Abbott, Medtronic, Eli Lilly, MSD, Novartis, Novo nordisk, Ar Liquide, Roche, Amgen, Sanofi, Astra Zeneca, Alphadiab, Timkl

Liens d’intérêt du Dr Elise Bismuth-Reisman : Medtronic, Abbott, Novo nordisk, Lilly, Orkyn, Insulet, Vitalaire, Dexcom, Provention, Dinno Santé

 

Cet article a été écrit par Nathalie Raffier et initialement publié sur Medscape.