Sclérose latérale amyotrophique : de l’importance d’un adressage plus précoce vers le neurologue

  • Agnès Lara
  • Résumé d’article
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À retenir

  • Selon cette revue de la littérature, le diagnostic de la sclérose latérale amyotrophique (SLA) est encore trop souvent retardé, notamment en raison d’un adressage tardif au neurologue.
  • Cela repousse l’accès aux traitements modificateurs de la maladie et à une prise en charge multidisciplinaire, dont on sait qu’ils améliorent l’évolution des patients lorsqu’ils sont précoces.
  • Ce diagnostic reste complexe pour le généraliste qui est le premier médecin consulté et conduit à des parcours diagnostiques erratiques, à des examens inutiles et à une perte de temps importante au regard de l’évolution rapide de la maladie, en particulier dans les formes spinales.
  • En l’absence de marqueurs biologiques ou radiologiques, le repérage de signes cliniques spécifiques peut aider le généraliste à suspecter la maladie et à orienter plus précocement le patient vers un neurologue.

Pourquoi est-ce important ?

Le diagnostic de la SLA est généralement posé de façon assez tardive, 11 mois environ après la survenue des premiers symptômes dans les pays européens, et à un stade déjà avancé. Il a été montré que l’adressage rapide à un neurologue était un composant essentiel pour réduire le parcours diagnostique. Cela permet en outre un démarrage plus précoce des traitements modificateurs de la maladie (riluzole) susceptibles de ralentir l’évolution de la maladie à des stades précoces mais peu actifs sur les stades plus tardifs. Une revue de la littérature s’est donc intéressée à l’importance du délai diagnostique de la SLA et aux facteurs contribuant à ce retard. 

La part des patients… et celle des médecins

Le comportement des patients vis-à-vis de leur maladie semble jouer un rôle essentiel, notamment pour le délai à consulter après présentation des premiers symptômes. Ce délai est influencé par des facteurs socio-économiques (délai plus long pour les patients à faible revenus), la personnalité, l’existence de comorbidités psychiatriques et l’âge (également plus long en cas de déficit cognitif). Le délai médian imputable au patient est d’environ 3 ou 4 mois.

Par ailleurs, le généraliste est souvent le premier médecin consulté. Or, du fait de sa rareté et de la variété de ses présentations cliniques, la SLA peut être facilement confondue avec d’autres pathologies neurologiques ou non neurologiques. En conséquence, les patients sont fréquemment adressés à des spécialistes non neurologues et subissent des examens, voire même des chirurgies inutiles, pour finalement ne pas être correctement diagnostiqués ou traités dans plus de la moitié des cas. Ce parcours erratique serait quant à lui responsable d’un retard diagnostique de 5 mois, ce qui est important au regard de la courte espérance de vie avec cette maladie.

L’impact de la forme de présentation de la maladie

La forme de présentation de la maladie semble aussi jouer un rôle essentiel. Les formes bulbaires qui démarrent généralement par des dysarthries ou des dysphagies, et souvent à progression plus rapide, sont plus vite repérées et les patients plus précocement adressés à un neurologue que pour les formes spinales (faiblesse musculaire des membres et fasciculations à l’initiation). Le délai diagnostique est fortement augmenté dans le second cas, passant de 7 à 10 mois en moyenne pour les formes bulbaires à 10 à 22 mois pour les formes spinales.

Malgré cela, les patients atteints de formes bulbaires sont inutilement adressés à des gastro-entérologues ou ORL dans 39% des cas, alors que l’adressage direct à un neurologue permettrait de réduire le délai diagnostique de moitié (3 mois vs 6 mois).

Ce délai diagnostique est légèrement plus long pour les formes spinales car elles sont souvent confondues avec des neuropathies périphériques ou des maladies dégénératives de la moelle épinière. Ces dernières pouvant coexister avec la SLA, cela complique encore le diagnostic. Cependant, l’existence de signes plus spécifiques comme une fasciculation, des pertes de sensibilité, un syndrome split-hand*, ou une progression des symptômes à point de départ focal, doivent inciter le généraliste à adresser le patient à un neurologue.

Il existe aussi des formes à présentation initiale respiratoire. Bien que plus rares (3% à 5%), elles peuvent être attribuées à une pathologie cardiaque ou pulmonaire et conduire à un retard diagnostique, en particulier lorsque le développement du trouble est insidieux. Les généralistes doivent en avoir connaissance car une initiation précoce de la ventilation non invasive peut augmenter la durée de survie. Une SLA doit être envisagée en cas d’insuffisance respiratoire progressive, d’orthopnée, de perte de poids, d’atrophie des membres avec fasciculations ou d’extension axiale de la faiblesse musculaire (cou, tête tombante).

* Syndrome slit-hand : déficit et amyotrophie distaux atteignant préférentiellement la loge thénar (court abducteur du pouce et premier interosseux), contrastant avec une relative préservation de l’abducteur du V.