L’espérance de vie des personnes atteintes de schizophrénie est plus faible que celle de la population générale, notamment du fait d’un risque cardiovasculaire accru. La fréquence du syndrome métabolique lié à la maladie est impliquée dans ce constat. Bien que le lien entre schizophrénie et syndrome métabolique ne soit pas encore totalement élucidé, il est évident que la prise rapide de poids liée à l’initiation du traitement antipsychotique est impliquée. Quelques travaux ont déjà décrit une prise de poids supérieure en cas de traitement par les molécules de deuxième génération par rapport à celles de première génération. Mais il reste à mieux déterminer les facteurs associés à cette prise de poids afin de proposer une approche préventive et une prise en charge adaptée. Une analyse longitudinale de la cohorte du réseau national de centres experts des troubles schizophréniques FACE-SZ vient d’être publiée ; elle se propose d’évaluer la prévalence du syndrome métabolique et de déterminer les paramètres biologiques et les facteurs prédictifs modifiables ou non modifiables associés à la prise de poids.
Méthodologie
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La cohorte était composée de patients reçus pour schizophrénie au sein des 10 centres experts nationaux : ils devaient être stables sous traitement depuis au moins 8 semaines et étaient envoyés par leur médecin traitant ou leur psychiatre. Ces derniers recevaient des recommandations concernant l’hygiène de vie et la prise en charge à proposer à leurs patients. Ces derniers recevaient parallèlement les mêmes conseils d’hygiène de vie.
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Le suivi de ces patients était de 4 ans durant lesquels des entretiens étaient conduits avec le sujet et un suivi médical complet était assuré afin d’apprécier notamment la présence d’un éventuel syndrome métabolique et de troubles métaboliques associés. La prise de poids était considérée comme significative lorsqu’elle atteignait au moins 7% du poids relevé à l’inclusion et la définition du syndrome métabolique retenue était celle de l’International Diabetes Federation.
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La publication s’attachait à présenter les données de la première année de suivi.
Résultats
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Parmi les 425 patients reçus en visite initiale, 210 ont été revus à 1 an, dont 167 pour lesquels les données étaient suffisantes pour évaluer la présence d’un syndrome métabolique. La moyenne d’âge était de 32,1 ans et 79,1% de la cohorte était constituée d’hommes.
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Le poids moyen était de 79,7 kg à l’inclusion et de 81,7 kg après un an et la prévalence du syndrome métabolique était de 21,0% à l’inclusion puis de 26,6% à 1 an (p significatifs).
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Selon l’analyse univariée, les sujets ayant développé un syndrome métabolique étaient plus jeunes, présentaient plus souvent des symptômes dépressifs, une faible adhésion au traitement et des troubles du comportement alimentaire que ceux qui ne développaient pas un tel syndrome. La nature du traitement antipsychotique suivi ne semblait pas être discriminante.
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Selon l’analyse multivariée prenant en compte l’ensemble des facteurs de confusion potentiels, seuls les patients présentant des symptômes dépressifs avaient un risque de syndrome métabolique plus élevé, indépendamment de l’âge, du sexe ou de la sévérité des symptômes psychotiques.
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Les sujets présentant des symptômes dépressifs avaient un risque 4,5 fois plus élevé que les autres de prendre du poids durant l’année. Des constantes métaboliques croissantes (circonférence abdominale, PAD, triglycérides, glycémie à jeun) ou réduites (HDL-c), ainsi qu’une CRP haute sensibilité croissante au cours de l’année constituaient des marqueurs du risque de syndrome métabolique.
Limitations
Le taux de perdus de vue était important.
À retenir
Malgré l’attention portée au risque métabolique et les conseils apportés aux correspondants ambulatoires et aux patients, la prévalence du syndrome métabolique a augmenté de 5,6% durant la première année de prise en charge. Les sujets présentant parallèlement des symptômes dépressifs étaient ceux qui apparaissaient les plus vulnérables à ce risque. Ce constat n’est pas surprenant, étant donné l’association démontrée par ailleurs entre dépression et obésité ou prise de poids, que ce soit sous l’influence d’une mauvaise qualité de sommeil ou d’alimentation ou de facteurs neuro-endocriniens. Pour autant, les déterminants biologiques liés à la prise de poids chez le patient schizophrène doivent être mieux compris.
La nature du traitement antipsychotique n’est pas apparue déterminante sur le risque de prise de poids et de syndrome métabolique : ce résultat inattendu s’explique probablement par le fait que les patients étaient déjà sous traitement à l’inclusion et que le syndrome métabolique potentiel lié à cette prise en charge était probablement alors déjà effectif.
Le fait que la fréquence du syndrome métabolique relevé dans cette étude soit inférieure à celle rapportée dans d’autres études pourrait être le fait de l’attention portée à ce risque spécifique lors de la prise en charge. Une étude contrôlée serait utile pour s’en assurer. Dans tous les cas, une attention particulière doit être apportée sur le plan métabolique aux patients souffrant de schizophrénie, et notamment ceux présentant des symptômes dépressifs. Une évaluation de ces derniers devrait être conduite chez tous les sujets schizophrènes. L’évaluation de l’efficacité des traitements antidépressifs sur le risque de prise de poids serait également nécessaire.
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