Santé : priorité au politique
- Serge Cannasse
- Actualités professionnelles
Le domaine de la santé n’est pas facile. Dans l’idéal, pour bien le maîtriser, il faudrait allier des connaissances et des expériences approfondies en médecine, en soins, en santé publique, en organisation de l’ambulatoire comme des établissements de santé, ainsi qu’en sociologie des professions, en économie de la santé, en même temps que d’être averti des enjeux syndicaux et politiques sous-jacents. Ça fait beaucoup. Bien entendu, de brillants cerveaux s’en approchent, au bout d’un temps plus ou moins long, mais ils sont rarement aux commandes. Le seraient-ils qu’ils devraient encore compter avec les aléas de la vie publique et, pourquoi ne pas le dire, avec les intérêts commerciaux, les calculs personnels et le fait du prince, ce qui implique d’avoir su naviguer depuis longtemps dans les méandres du pouvoir.
Jusqu’à il y a peu, malgré les sondages montrant que la santé était une priorité dans les préoccupations des Français, elle était loin de faire la une des programmes politiques, notamment présidentiels, au grand regret des observateurs et des experts de tous bords. La situation a commencé à franchement bouger avec l’épidémie de Covid-19 et les difficultés de plus en plus importantes des électeurs à trouver un praticien disponible dans un temps et à des conditions raisonnables. Comme il est illusoire de faire de chacun d’eux un spécialiste de la santé, ni d’ailleurs de tous les autres sujets sociétaux et politiques, les débats ont été simplifiés autour de quelques thèmes : les déserts médicaux, les urgences, la crise de l’hôpital public. Soit dit en passant, cela confère une grande responsabilité pédagogique aux personnels administratifs et politiques, ainsi qu’aux journalistes, qui sont de plus, bien obligés de tenir compte des bateleurs professionnels plus attachés à l’éclat des arguments qu’à la pertinence des analyses.
La santé n’est pas un domaine régalien, comme l’indique l’ordre protocolaire qui n’accorde qu’un quatorzième rang au ministre qui en a la charge. La question reste donc toujours ouverte de savoir comment doivent se répartir les responsabilités entre État central, collectivités locales et autres parties prenantes (professionnels, patients, complémentaires, etc). Les réponses varient selon les pays. En France, le partage se fait d’abord entre l’État (parlement, gouvernement, administrations et agences) et l’Assurance maladie, censée être gérée par les partenaires sociaux (les syndicats patronaux et salariés). Autre problème : quel est le bon profil du ministre ?
Dans le domaine social, comme dans d’autres (par exemple, l’Éducation nationale), la tentation a été forte depuis plusieurs années de faire appel à des personnalités de la « société civile », supposées être plutôt mieux acceptées par l’opinion publique et au fait des problématiques du champ couvert par leur ministère. Cependant, non seulement il leur est difficile de maîtriser l’ensemble de ce champ, mais la politique les rattrape plus ou moins rapidement. La leçon est claire : ce sont bien les enjeux de celle-ci qui sont prioritaires et le poste nécessite des hommes et femmes qui en sont parfaitement au fait. Cela étant, il est hautement souhaitable que les titulaires du poste aient aussi une bonne connaissance et expérience de leur domaine d’intervention.
Avec le nouveau ministre de la santé et de la prévention, on passe manifestement à un choix nettement politique, mais avec un bonus très appréciable : l’homme a des compétences certaines dans son champ d’action. Il est par ailleurs réputé être à l’écoute de ses interlocuteurs. Cela suffira-t-il ?
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