Réduire la pollution atmosphérique bénéficie à la santé des populations

  • Serge Cannasse
  • Actualités professionnelles
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La pollution atmosphérique est associée à une augmentation des mortalités cardiovasculaires et respiratoires. L’OMS (Organisation mondiale de la santé) a émis en 2021 des valeurs guides de qualité de l’air pour six polluants : particules fines en suspension (PM2,5 et PM10 – PM pour Particles Matter – dont les diamètres sont inférieurs à respectivement 2,5 et 10μm), ozone (O3), dioxyde d’azote (NO2), dioxyde de soufre (SO2) et monoxyde de carbone (CO). En France métropolitaine, le dispositif national, régi par des directives européennes, a permis de réduire les niveaux de pollution pour cinq d’entre eux : depuis une vingtaine d’année, ils ont été abaissés de 80% pour le SO2 et de 50% environ pour les PM2,5, PM10 et NO2. En revanche, les concentrations en ozone sont restées stables ou ont même légèrement augmentées.

Une analyse poolée de huit cohortes européennes a montré qu’en dessous d’un seuil de 12 µg/m3 de PM2,5, qui est le polluant atmosphérique de loin le plus documenté, la mortalité augmentait de 30% par palier de 5 µg/m3. Or, en France, la norme est de 10 µg/m3. Mais 28% de la population métropolitaine est exposée à une concentration supérieure à celle-ci. Enfin, l’OMS recommande un objectif de 5 µg/m3, en dessous duquel l’impact sur la mortalité est négligeable. Comme l’écrit Matteo Redaelli, chef de projets scientifiques et coordinateur d’expertise sur la qualité de l'air à l’Anses, ces données « laissent entrevoir une marge de progrès. »

En effet, des estimations montrent qu’en France métropolitaine, environ 39.500 décès annuels seraient évités en respectant l’objectif de l’OMS (5 µg/m3pour les PM2,5), avec un gain moyen d’espérance de vie pour les 30 ans et plus de 7,6 mois. En cas de pic de pollution, ramener les valeurs de PM2,5 sous le seuil d’alerte journalier (15 µg/m3) réduirait de 19% le nombre de passages aux urgences pour asthme des enfants attribuable aux PM2,5.

Pour Matteo Redaelli, ces chiffres sont à prendre avec précaution. La méthode de calcul au moyen de la fonction exposition-risque peut induire une sous-estimation des bénéfices d’une réduction de la pollution. Elle ne tient pas compte des évolutions démographiques, notamment l’urbanisation croissante et le vieillissement de la population, qui augmentent le nombre des personnes vulnérables à la pollution. Elle passe sous silence les bénéfices associés à la réduction concomitante des gaz à effet de serre et de certains agents de modification du climat (comme le carbone suie), ainsi que les bénéfices et coûts économiques des mesures de réduction de la pollution.

Cependant ces derniers ont été estimés : pour un euro investi, les États-Unis pourraient récupérer 30 euros et l’Europe entre 14 et 50 euros. Au niveau français, « le bénéfice net de la lutte contre la pollution de l’air associé au respect des plafonds d’émission nationaux a été estimé en 2015 à 11 Md€ par an. »

Au total, « les gains seraient largement supérieurs aux coûts. Les réductions supplémentaires que pourrait apporter le renforcement des normes actuelles représentent des bénéfices non négligeables, sous-estimés et possiblement coût-efficaces pour la santé des populations. »