Rapports sexuels et mort subite cardiaque chez les jeunes

  • Dr Sheena Meredith

  • Nathalie Barrès
  • Actualités Médicales par Medscape
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Les rapports sexuels sont reconnus étant un acte pouvant précipiter – même rarement – la mort subite cardiaque (MSC), et une étude médico-légale des autopsies après une mort naturelle estiment que 0,2% des décès étaient associés à une activité sexuelle. La perception qui prévaut est qu'il s'agit d'un problème touchant principalement les hommes d'âge mûr. Cependant, une nouvelle étude réalisée chez des personnes relativement jeunes et publiée dans une lettre de recherche dans le JAMA Cardiology suggère que le phénomène, bien qu'encore rare, pourrait affecter les personnes plus jeunes ainsi que les femmes, davantage que ce que l'on ne pensait [1].
Des chercheurs de la St George University de Londres ont examiné plus de 6.800 cas de MSC adressés au centre de pathologie cardiaque de St George entre janvier 1994 et août 2020. Tous les cas avaient déjà subi une autopsie détaillée, y compris un dépistage toxicologique, pour exclure les causes non cardiaques. Les informations cliniques ont été obtenues auprès des médecins légistes référents. Des experts en pathologies cardiaques ont procédé à l'évaluation macroscopique et histologique de chaque cœur.
Sur les 6.847 cas de MSC, 17 (0,2%) concernaient un décès survenu pendant ou dans l'heure suivant un rapport sexuel. L'âge moyen au moment du décès était de 38 ans (avec un écart type de 18 ans), et 11 des 17 cas (65%) concernaient des hommes. Le nombre de femmes (6/17, 35%) était sensiblement plus élevé que dans les études précédentes, ce que l'équipe attribue à l'âge relativement jeune de la cohorte, alors que d'autres études portaient sur des hommes plus âgés, présumés avoir une prévalence plus élevée de maladie coronarienne.
Le syndrome de mort subite arythmique, cause la plus fréquente

Le résultat le plus fréquent de l'autopsie montrait un cœur structurellement normal, chez neuf personnes (53%), ce qui suggère un syndrome de mort subite arythmique. Dans deux cas (12%), la cause du décès était une dissection aortique. Et les autres décès (6% chacun) étaient attribués à une cardiomyopathie arythmogène, une cardiomyopathie hypertrophique, une cardiopathie ischémique, une fibrose idiopathique, une hypertrophie ventriculaire gauche (HVG) idiopathique et un prolapsus de la valve mitrale.
Un seul patient avait signalé des symptômes cardiaques antérieurs, mais quatre d'entre eux avaient des antécédents suggérant une maladie cardiaque : un homme d'une trentaine d'années chez qui un prolapsus mitral avait été diagnostiqué ; une personne d'une vingtaine d'années chez qui une hypertension avait été diagnostiquée et qui, à l’autopsie, s'est avérée souffrir d'une dissection aortique ; un patient ayant des antécédents de tachycardie associée à un déséquilibre électrolytique ; et un adolescent atteint d'une HVG chez qui une cardiomyopathie hypertrophique a été constatée à l'autopsie.
L'équipe reconnaît que les limites de l'étude sont de n’avoir examiné que les cas de MSC – les résultats excluant donc les autres causes de décès –, et de n’avoir évalué que les personnes décédées, de sorte que les survivants à des arrêts cardiaques soudains n'ont pas été pris en considération.
La prépondérance des cas de syndrome de mort subite d'origine arythmique reflète le jeune âge de la cohorte et suggère que « des anomalies électriques primaires peut être associée à une incidence rare de mort subite pendant les rapports sexuels, » ont déclaré les chercheurs.

Mais bien que les personnes plus jeunes souffrant d'affections cardiaques connues – telles que cardiomyopathies et canalopathies – puissent s'inquiéter du risque de mort subite pendant un rapport sexuel en raison de la poussée catécholaminergique qui l'accompagne, les chercheurs estiment que leurs conclusions rassurent sur le fait que l'activité sexuelle est relativement sûre chez ces patients, en particulier chez ceux de moins de 50 ans.

 

Éviter des tragédies à venir 

L'étude a été en partie financée par l'organisation caritative Cardiac Risk in the Young (CRY), qui vise à prévenir les MSC chez les jeunes par la sensibilisation, le dépistage et la recherche, ainsi qu'à soutenir les familles touchées. Le Dr Steven Cox, PDG de CRY, a déclaré à Medscape UK : « Nous sommes ravis d'avoir financé cette recherche intéressante et instructive qui s'inscrit dans le cadre de nos objectifs généraux visant à sauver de jeunes vies. »

« En finançant la recherche sur les causes de la mort subite cardiaque chez les jeunes, nous sommes en mesure de mieux comprendre comment prévenir les tragédies. Il est donc important de souligner que cette recherche a porté sur près de 7.000 morts subites cardiaques, qui ont été examinées et étudiées par l'équipe de recherche du CRY. »

« Une fois qu'un jeune est identifié comme souffrant d'une maladie cardiaque potentiellement mortelle, il reçoit des conseils spécialisés relatifs à son mode de vie, afin d’éviter les risques d'arrêt cardiaque. Parfois ces restrictions, particulièrement si on leur conseille d'éviter les sports de compétition, peuvent avoir un réel impact sur leur qualité de vie. Cependant, cette recherche sur les circonstances dans lesquelles il y a eu mort subite cardiaque chez des jeunes rassure très fortement les jeunes sur leur sécurité lorsqu'ils pratiquent une activité sexuelle. »

« Chaque semaine, au Royaume-Uni, au moins 12 jeunes (de 35 ans et moins) décèdent d'un problème cardiaque non diagnostiqué. Dans 80% des cas, il n'y a aucun signe avant-coureur, c'est pourquoi le dépistage proactif des personnes asymptomatiques est si vital. Une fois identifiées, la grande majorité de ces affections peuvent être traitées avec succès (par une intervention chirurgicale, des médicaments ou des adaptations du mode de vie), ce qui permet aux personnes concernées de profiter d’une vie normale et de pratiquer des activités normales. »

L’étude a été financée par la fondation Cardiac Risk in the Young.

Cet article a été écrit par Dr Sheena Meredith, initialement publié sur Medscape.com sous l’intitulé Sex and Sudden Cardiac Death in Young People. Traduit par Mediquality, membre du réseau Medscape.