Rôle de la microglie dans les pathologies neurologiques : Dr Jekyll ou Mr Hyde ?
- Agnès Lara
- Actualités Congrès
À retenir
- Une revue parue dans Aging and Disease fait le point sur le rôle de l’activation excessive ou le dysfonctionnement de la microglie dans différentes pathologies neurologiques : AVC, maladie d’Alzheimer, maladie de Parkinson…
- La polarisation de la microglie vers une orientation pro- ou anti-inflammatoire peut avoir des effets différents à différents stades de la pathologie.
- Cette orientation dépend de phénotypes microgliaux dynamiques, eux-mêmes sous l’influence de mécanismes complexes impliquant de nombreux récepteurs et voies de signalisation.
- Les recherches actuelles montrent que les récepteurs delta aux opioïdes (DOR) ont un effet neuroprotecteur et qu’il existe un lien entre récepteurs DOR et microglie dans la régulation de la neuro-inflammation.
- Selon les chercheurs, ces récepteurs représentent une cible thérapeutique d’avenir pour ralentir l’évolution des maladies neurologiques liées à l’âge.
Pourquoi est-ce important ?
La microglie est constituée des cellules immunitaires innées résidentes (macrophages) et a pour rôle d’éliminer les neurones altérés de façon à prévenir l’inflammation et à maintenir un environnement favorable à la restauration des cellules du système nerveux central. Or, la neuro-inflammation est un mécanisme sous-jacent qui prévaut à de nombreuses maladies neurologiques liées à l’âge, aiguës comme chroniques. Plusieurs travaux indiquent qu’en agissant sur la microglie, les récepteurs DOR pourraient inhiber cette neuro-inflammation. Une équipe chinoise a fait le point sur le sujet.
La microglie, acteur majeur de la neuro-inflammation
La microglie a d’abord été grossièrement caractérisée selon son phénotype : M1 associé à la production de cytokines pro-inflammatoires et d’espèces réactives de l’oxygène, et M2 exerçant au contraire un effet suppresseur de l’inflammation. En réalité, les choses sont plus complexes qu’il n’y paraît et la neuro-inflammation repose sur des interactions impliquant la microglie, la barrière hémato-encéphalique, les neurones et les astrocytes. Une activation excessive ou un dysfonctionnement de la microglie est impliqué dans les processus de neuro-inflammation associés à différentes maladies neurologiques.
Un rôle probablement neuroprotecteur en post-AVC
Une activation de la microglie se produit dans les quelques minutes qui suivent un AVC d’origine ischémique et se poursuit durant quelques jours. Un grand nombre d’études cliniques et expérimentales chez l’animal montrent que cette activation est globalement associée à un effet neuroprotecteur. Elle fait intervenir des processus de phagocytose, de neurogenèse, d’angiogenèse, et de remodelage synaptique, qui visent à régénérer et à réparer les tissus, ainsi qu’à évacuer les cellules endommagées et les débris cellulaires. D’autres études suggèrent à l’opposé que l’activation vers un profil pro-inflammatoire protègerait contre la progression de la zone cérébrale lésée. Ces changements dynamiques de l’activité de la microglie suite à un AVC nécessitent donc encore des investigations et dépendent probablement de multiples facteurs comme le délai d’observation depuis l’AVC ou le modèle animal considéré.
Contribution de la microglie dans la maladie d’Alzheimer
Dans la maladie d’Alzheimer, il a été montré in vitro et in vivo que les cellules de la microglie s’agglutinent autour des plaques amyloïdes. Dans un premier temps, la microglie aurait un phénotype neuroprotecteur, mais basculerait ensuite vers un phénotype neurotoxique à des stades plus avancés de la maladie, contribuant ainsi à la mise en place d’un cercle vicieux entre microglie et pathologie Tau : la protéine Tau hyperphosphorylée entraînerait une activation de la microglie et des astrocytes vers un phénotype toxique, et la production de molécules pro-inflammatoires renforcerait à son tour la pathologie Tau. Récemment un type de microglie nommé DAM pour Disease-Associated Microglia a été identifié et pourrait avoir un effet protecteur en activant le chimiotactisme de la microglie vers les plaques amyloïdes et en stimulant sa capacité de phagocytose.
Effet pro-inflammatoire et perte neuronale dans la maladie de Parkinson
Une activation de la microglie a été identifiée dans la substance noire et le putamen de sujets atteints de maladie de Parkinson. Elle a également été corrélée avec les pertes de terminaisons nerveuses de neurones dopaminergiques en phase précoce de la maladie. Plusieurs études chez l’animal ont montré que l’alpha-synucléine (αSYN) activait la microglie et provoquait la libération de cytokines pro-inflammatoires. Ces mécanismes impliquent les Toll-like-Receptors (TLR) présents dans la microglie et l’inflammasome NLRP3. Par ailleurs, une déficience des capacités d’autophagie de la microglie (élimination des débris cellulaires et des agrégats protéiques) active l’inflammasome NLRP3 et la neuro-inflammation et accentue la perte neuronale.
Le rôle central des DOR dans la polarisation de la microglie
Des travaux in vitro et in vivo montrent que l’activation des récepteurs DOR influencent la polarisation de la microglie. Les études sur la transduction du signal à partir des récepteurs DOR de la microglie sont encore peu nombreuses, mais les recherches évoquent globalement un effet inhibiteur de ces récepteurs sur l’activation excessive de la microglie et sa réponse pro-inflammatoire aux stimuli environnementaux. Leur effet serait médié par une régulation négative des voies pro-inflammatoires des MAP (Mitogen-activated protein) kinases, de la p38, et probablement NF-KB et Nrf2 au sein de la microglie. Il a également été montré dans des modèles de maladie d’Alzheimer et de Parkinson in vitro, que ces récepteurs agiraient aussi en inhibant la voie des caspases, qui ont notamment pour rôle d’initier l’apoptose, et réduiraient ainsi la neurotoxicité de la microglie. À l’inverse, la morphine, qui a une plus grande affinité pour les MOR (Mu Opioïd Receptors) que pour les DOR, agirait sur les récepteurs TLR4 et activerait la voie des MAP kinases pro-inflammatoire. Les récepteurs DOR favoriseraient une polarisation vers un phénotype anti-inflammatoire de la microglie notamment en activant ses capacités d’autophagie.
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