Quand la connectivité fonctionnelle cérébrale à l’adolescence annonce les pathologies psychiatriques

Pourquoi est-ce important ?

Les mécanismes physiopathologiques des comorbidités psychiatriques, qui surviennent souvent lors du passage de l’adolescence au jeune adulte, c’est-à-dire au moment où le cerveau finalise sa maturation, restent largement méconnus. De plus en plus d’éléments de la littérature laissent entendre qu’il pourrait exister des bases génétiques et neurodéveloppementales communes à ces différentes pathologies. Une étude internationale parue dans Nature Medicine a donc questionné l’existence d’un facteur neurophysiopathologique commun (facteur NP) associé à des troubles du comportement externalisés ou internalisés et observables en IRM fonctionnelle (IRMf) et a cherché à savoir s’il reposait sur des bases génétiques ou neurocomportementales partagées.

Méthodologie

Pour ce faire, les chercheurs ont eu recours à une cohorte longitudinale d’adolescents et de jeunes adultes (cohorte IMAGEN, n=1750, 50% de filles, âge moyen 14 ans) dans l’objectif d’identifier une signature cérébrale commune (connectivité fonctionnelle) à 8 symptômes comportementaux associés à des troubles psychiatriques sur la base de leurs résultats en IRMf lors de la réalisation de tâches. Les résultats ont été utilisés pour établir et valider un modèle prédictif basé sur des patterns du connectome (identification des régions travaillant ensemble) capables de prédire la survenue des symptômes. Puis des analyses longitudinales ont été menées pour identifier un facteur NP commun prédictif de la survenue de symptômes externalisés et internalisés durant l’adolescence et chez le jeune adulte. 

Principaux résultats

Le modèle prédictif établi à partir de la connectivité fonctionnelle observée en IRMf, chez des sujets atteints de différents troubles psychiatriques lors de la réalisation des tâches spécifiques, a permis de prédire la plupart des symptômes comportementaux :

À partir des patterns de connectivité associés à la fois aux symptômes externalisés et internalisés, une configuration cérébrale de connectivité fonctionnelle corrélée à la fois aux symptômes externalisés et internalisés a pu être identifiée, définissant le facteur NP.

Ce facteur concerne principalement la régulation descendante de circuits cognitifs préfrontaux tels que les réseaux frontopariétal, frontal supérieur médian et de saillance, qui sont impliqués dans les processus émotionnels, de récompense et de punition. Il se manifeste par une hyperconnectivité (hyperactivité) de ces régions, en particulier dans le précunéus ventral.

Le facteur NP a pu être retrouvé sur plusieurs périodes développementales et s’est montré capable de prédire les symptômes comportementaux chez les préadolescents (Cohorte ABCD, 10-11 ans), les adolescents (cohorte MAGEN, 14 ans) et chez le jeune adulte (IMAGEN, 19 ans ; Stratify, 23 ans), ce qui est cohérent avec la nature persistante des troubles psychiatriques dans le temps. Il semble génétiquement lié au neurodéveloppement entre l’adolescence et l’âge adulte.