PSF 2023 - Consultation pré-conceptionnelle : mémo sur les risques infectieux et psychiatriques

  • Caroline Guignot
  • Actualités Congrès
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Le temps de la consultation pré-conceptionnelle est un moment privilégié pour ré-aborder sereinement le risque infectieux, et ses questions inhérentes de vaccination, ainsi que le risque psychiatrique, que les femmes aient ou non des antécédents. Les éléments importants ont été évoqués au cours du congrès Pari(s) Santé Femmes (PSF), qui s’est tenu du 25 au 27 janvier 2023 à Lille.

Maladies à prévention vaccinale, infections sexuellement transmissibles et risques individuels

Concernant les maladies à prévention vaccinale, le postulat est schématiquement de s’assurer de la sérologie en cas de non-vaccination, vaccination incomplète, ou lorsque les femmes ne connaissent pas leur statut concernant la maladie ou n’ont pas leur carnet de santé pour s’en assurer : cela concerne la rougeole, la rubéole et la varicelle qui exposent la mère et/ou l’enfant à des complications parfois sévères. Si la vaccination est requise, elle impose des précautions face à ces vaccins vivants : ils ne sont pas recommandés durant la grossesse et doivent donc être administrés avant, la conception pouvant être envisagée 1 mois après la 2e dose. Le risque principal lié à la vaccination d’une femme qui serait enceinte repose essentiellement sur son risque de développer la maladie, aucune foetopathie n’ayant été décrite chez une personne déjà immunisée. « Les vaccinations à faire au cours de la grossesse ne doivent pas être oubliées concernant le risque de COVID-19, grippe, coqueluche, a expliqué le Dr Fanny Vuotto (CHU Lille). Pour mémoire, la stratégie cocooning ne fonctionne pas contre cette dernière. Étant donné la montée en flèche du nombre de cas chez les enfants, l’immunisation passive via leur mère peut les protéger pendant plusieurs mois », sachant que plus de 90 % des cas pédiatriques surviennent avant l’âge de six mois. Durant la consultation préconceptionnelle, « il faut parler et expliquer les enjeux liés à ces vaccinations avec les femmes, pour qu’elles soient convaincues de leur intérêt pour elles et leur enfant ».

Le second pan de la prévention infectieuse concerne le dépistage des infections sexuellement transmissibles (IST) et infections non ciblées par les vaccinations : VIH (virus de l’immunodéficience humaine), syphilis, chlamydia, virus de l’hépatite B, C papillomavirus, toxoplasma gondii, listeria… Concernant le VIH, il faut savoir que 7% des nouveaux diagnostics sont faits à l’occasion du bilan systématique de la grossesse. Le risque est d’autant plus sérieux à considérer pour les femmes originaires de pays à forte endémie. Et si elles sont exposées à des risques d’infection, par le maintien de comportements à risque chez elle ou son conjoint, la prophylaxie pré-exposition peut parfaitement être prescrite chez la femme enceinte.

La sérologie du CMV (cytomégalovirus) n’est pas recommandée, car il est très compliqué de prévenir l’infection en vie quotidienne et parce qu’il n’y a pas de traitement à proposer en cas d’infection avérée. À défaut, le risque est de stresser inutilement les mères. « Il est cependant probable que la sérologie finisse par s’imposer en préconceptionnel si le vaccin anti-CMV actuellement en phase 3 est autorisé » a remarqué la spécialiste.

Enfin, certains risques infectieux particuliers sont à rechercher dans le parcours médical ou les antécédents des femmes : mucoviscidose, herpès génital récurrent, infections vaginales récidivantes, allergie aux antibiotiques, mode de vie… nécessitent une démarche en préconception. Idéalement, « une consultation en interconception permettrait aussi de retracer les évènements infectieux que la patiente a connu au cours de la ou les grossesses précédentes » a-t-elle suggéré.

Risque psychique

La santé mentale périnatale fait l’objet de préoccupations accrues justifiées. Et pour cause, les données de la recherche décrivent de plus en plus clairement que certains processus cérébraux sont modifiés au cours de la grossesse. Il y a aussi des hypothèses immunitaires qui suggèrent des liens entre psychisme et périnatalité, notamment un lien fort avec l’éclampsie.

On estime que 20 à 30% des femmes sont concernées : il s’agit de troubles de la régulation émotionnelle dans 80% des cas, d’épisodes thymiques périnataux légers dans 15-20% des cas, dont plus des deux tiers sont des rechutes, ou des épisodes thymiques graves dans 5% des cas, la moitié étant des rechutes. Des grossesses rapprochées majorent le risque pour la santé mentale et le risque de décompensation d’un trouble pré-existant.

Au cours de la consultation préconceptionnelle, l’une des principales préoccupations à avoir concerne donc la prévention des rechutes chez les femmes ayant des antécédents, et notamment celles qui ne sont plus traitées, par exemple parce que la fenêtre thérapeutique de 2 ans après un premier épisode psychotique est terminée. 

Concernant les femmes sous antidépresseurs, l’une des questions importantes est de savoir s’il faut maintenir le traitement et donc exposer les enfants à ces molécules in utero. Une méta-analyse récente suggère qu’il n’y a globalement pas de risque de rechute lorsqu’on arrête le traitement pendant la grossesse, « sans doute parce que certains ne sont pas ou plus justifiés, ou parce qu’elles n’en ont plus besoin » a précisé le Dr Anne-Laure Sutter (Bordeaux). Elle montre toutefois que ce constat concerne celles qui ont des formes légères de dépression, le maintien étant plus justifié dans les formes sévères. 

La dépression prénatale doit également être prise en charge afin de prévenir des troubles du comportement chez l’enfant après la naissance : outre l’impact de l’interaction entre la mère et l’enfant, les données de la recherche suggèrent une dérégulation du gène du transporteur de la sérotonine (5-HTTLPR) chez l’enfant.

Pour les mères ayant des troubles psychiatriques nécessitant un traitement médicamenteux, le territoire est maillé par des structures proposant une consultation antéconceptionnelle pluridisciplinaire au couple, et permettant de conduire une évaluation des risques, une prévention et une prise en charge adaptée, avec des ajustements thérapeutiques le cas échéant. Les réseaux périnatalité peuvent aiguiller les professionnels et les patients vers ces structures.