Prothèses mammaires texturées : où en est-on ?
- Nathalie Barrès
- Actualités Médicales
En 2017, environ 10 millions de femmes à travers le monde avaient des implants mammaires. Depuis leur introduction dans les années 1960, la sécurité d’emploi de ces dispositifs a fait l’objet de nombreuses interrogations. En 2010, les prothèses PIP contenant un gel de silicone non certifié pour l’usage humain et associées à des ruptures plus fréquentes ont été suspendues par l’ANSM. En 2015, c’est au tour des implants Silimed d’être suspendus suite à une contamination de celles-ci par des particules.
Historique des doutes sur ces dispositifs
En 1992, le premier cas de lymphome anaplasique à grandes cellules associé à un implant mammaire (entité spécifique intégrée à la classification de l’OMS en 2016 sous le terme de « LAGC-AIM ») a été notifié. Depuis, plusieurs cas ont été rapportés dans la littérature. Malgré l’absence de lien de causalité établi, de fortes présomptions suggèrent qu’il existerait une association entre ces cancers et les implants mammaires, et tout particulièrement avec les prothèses mammaires texturées. Les facteurs de causalité évoqués sont une réponse immunitaire chronique liée à l’induction d’une inflammation locale par les produits dérivés du silicone ou certaines bactéries adhérentes au dispositif, ou une action mutagène directe par certains toxiques liés au dispositif lui-même. Le lymphome se déclencherait en moyenne dans les dix ans après la pose de l’implant. Le diagnostic est confirmé par la caractérisation immuno-histochimique qui révèle de manière constante la présence de CD30 à la surfacedes cellules tumorales, un phénotype T cytotoxique.
Quel est le niveau de risque ?
En 2008, une étude épidémiologique avait montré que le risque relatif de lymphome anaplasique à grandes cellules était multiplié par 18 chez les femmes avec implants par rapports aux femmes non implantées. Une actualisation réalisée en 2018 a estimé que ce risque pourrait être encore supérieur. Depuis 2016, les cas de LAGC-AIM doivent être déclarés dans bon nombre de pays. Même s’il est du ressort des sociétés savantes et des autorités de santé de gérer la situation, deux actions principales émergent : la transmission d’une information éclairée du risque existant aux patientes avant chirurgie mammaire (cosmétique ou reconstructive) et l’inclusion de tous les cas de LAGC-AIM dans un registre national de suivi prospectif.
L’actualité récente
En décembre 2018, Allergan, leader européen des implants texturés a annoncé la suspension des ventes de ces dispositifs (du fait de l’expiration du marquage CE des dispositifs) et le retrait des produits disponibles sur le marché en accord avec la demande de l’ANSM. L’impact de cette décision a été immédiate dans toute l’Europe avec la prise de position de différentes sociétés savantes dans le but de réduire les risques pour les patientes. Cependant les auteurs de l’article mettent en évidence que les données actuellement disponibles pour différents pays sont issues majoritairement d’une collection de cas rapportés et manquent donc de puissance. Le risque semble par ailleurs lié aux prothèses mammaires texturées en général, et non pas à une marque en particulier. Les implants mammaires disponibles en Europe sont majoritairement texturés, et dans le contexte de la reconstruction mammaire, le remplacement par un autre type de dispositif n’est pas aisé, tout simplement par manque d’offres. Au regard des données actuelles, l’EUSOMA (European Society of Breast Cancer Specialists) indique que les prothèses mammaires texturées peuvent continuer à être utilisées sous réserve d’une information et du consentement de la patiente lors de la chirurgie. L’EUSOMA indique que les femmes ayant ce type d’implant n’auraient pas besoin de le faire retirer ni de substituer leur prothèse mammaire texturée.
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