Prescriptions hors AMM : une clarification souhaitée par les Académies de Médecine et de Pharmacie
- Serge Cannasse
- Actualités Médicales
Les Académies Nationales de Médecine et de Pharmacie viennent de publier un rapport demandant une « clarification » au sujet des prescriptions médicamenteuses hors AMM (Autorisation de mise sur le marché). En effet, celles-ci représenteraient jusqu’à 20% du total des prescriptions. Les Académies rappellent que si les prescriptions conformes à l’AMM doivent demeurer la règle, certaines prescriptions hors AMM sont justifiées au regard des « données acquises de la science » ou compréhensibles sinon légitimes au regard du manque d’études cliniques portant sur certaines populations (enfants, femmes enceintes, patients atteints de maladies rares). De plus, il arrive que deux spécialités ayant le même principe actif à la même dose n’aient pas les mêmes indications, parce que l’un des fabricants n’a pas demandé d’extension d’AMM. Enfin, les procédures autorisant la prescription hors AMM (ATU – autorisation temporaire d’utilisation – et RTU – recommandation temporaire d’utilisation) sont complexes et rarement mises en œuvre. En conséquence si un médecin veut faire bénéficier son patient d’une découverte montrant l’efficacité d’un médicament dans une pathologie non indiquée dans son RCP (Résumé des caractéristiques des produits), il ne pourra le faire qu’hors AMM.
En principe, il devrait alors le mentionner sur l’ordonnance et demander un « consentement informé et éclairé » à son patient. Pour celui-ci, cela signifie un non remboursement par l’Assurance maladie. Aussi la plupart des prescriptions hors AMM se font sans cette mention, ce qui rend difficile l’évaluation de leur fréquence. Paradoxalement, cela conduit à ce que des prescriptions injustifiées soient remboursées, alors que les justifiées ne le seraient pas si les prescripteurs appliquaient rigoureusement la réglementation !
Pour ces derniers, les choses sont un peu plus compliquées. En effet, le Code de la santé publique autorise la prescription hors AMM et hors RTU, mais à deux conditions : d’une part, qu’il n’existe pas d’alternative médicamenteuse appropriée disposant d’une AMM ou d’une RTU, d’autre part que le praticien juge indispensable le recours à cette spécialité pour améliorer ou stabiliser l’état clinique de son patient, au regard des données acquises de la science. C’est ce dernier point qui est important en cas de mise en jeu de sa responsabilité médicale. Se pose alors la question de savoir quels sont les référentiels et les recommandations qu’il avance pour justifier sa décision : il n’en existe pas de liste précise. C’est en définitive le juge qui apprécie.
Les Académies avancent plusieurs propositions pour clarifier la situation. Notamment, d’après elles, il est possible de commencer à faire la liste des prescriptions hors AMM injustifiées en se focalisant sur les médicaments à risques très largement prescrits ou très coûteux. La liste des prescriptions hors AMM justifiées est bien plus facile à établir à l’hôpital grâce aux COMEDIMS (Commissions du médicament et des dispositifs médicaux stériles). En ville, c’est bien plus compliqué. Aussi les Académies proposent elles que des synthèses actualisées d’informations scientifiques sur les médicaments soient mises à disposition des prescripteurs et des pharmaciens et qu’une démarche d’harmonisation des libellés d’AMM soit effectuée par les autorités européennes pour des médicaments ayant la même composition. Elles souhaitent que les pouvoirs publics créent un Comité permanent d’experts dont les missions seraient d’examiner l’adéquation des AMM aux données actualisées de la science, de donner des avis sur la possibilité de prescriptions hors AMM, de constituer un recueil de données sur celles identifiées comme pertinentes, qui pourraient être prises en charge par l’Assurance maladie.
Elles se félicitent enfin des avancées actuelles dans la réglementation portant sur les médicaments à visée pédiatrique et ceux destinés aux maladies rares.
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