Premières implantations de rétines artificielles aux Hospices civils de Lyon

  • Anne-Gaëlle Moulun

  • Nathalie Barrès
  • Actualités Médicales par Medscape
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Les Hospices civils de Lyon font partie des six centres français sélectionnés pour participer à une étude clinique européenne dont l’objectif est de confirmer la sécurité et l’efficacité d’un système de rétine artificielle, avant une éventuelle autorisation de mise sur le marché (AMM). Au total, 38 patients participeront à l’étude, destinée aux personnes atteintes de DMLA atrophique. D’autres sites tests sont situés en Allemagne, en Espagne, aux Pays-Bas et en Italie. L’étude comprend un suivi sur trois ans et une évaluation des critères principaux douze mois après l’implantation.

 

Vision très altérée

A Lyon, la patiente qui a reçu l’implantation de rétine artificielle a 72 ans et elle est atteinte de DMLA atrophique depuis l’âge de 49 ans. « Elle a une vision très altérée. Elle ne peut lire que 9 lettres de l’échelle ETDRS, le tableau de lettres couramment utilisé dans les cabinets d’ophtalmologie, contre 85 lettres pour une vision normale », explique le Pr Laurent Kodjikian, chef de service adjoint en ophtalmologie à l’hôpital de la Croix-Rousse et ancien président de la Société française d’ophtalmologie, interviewé par Medscape. « L’objectif, grâce à la rétine artificielle, est de regagner une dizaine de lettres », précise-t-il.

Pour cela, il lui a implanté une rétine artificielle. Elle est composée de trois éléments : un implant rétinien miniature sans fil, une paire de lunettes équipée d’une caméra et d’un projecteur et un processeur de poche connecté au projecteur. La caméra capte les scènes visuelles de l’environnement, le processeur traite et simplifie les images grâce à des algorithmes et les images simplifiées sont ensuite renvoyées vers les lunettes. Le projecteur numérique miniaturisé projette les images traitées, via un faisceau infrarouge, sur l’implant équipé de récepteurs photovoltaïques. Ces récepteurs convertissent alors les informations optiques en stimulation électrique que les cellules nerveuses de la rétine interne fonctionnant toujours vont recevoir et transférer au cerveau via le nerf optique. Cela déclenche alors la perception visuelle.

 

Opération délicate

Pour implanter la puce, le Pr Kodjikian a dû d’abord ouvrir la rétine sur 3,5 mm, ce qui est énorme, puis décoller la rétine, le tout sous microscope. « Le problème, c’est qu’elle est facile à décoller sur un œil normal, mais sur une rétine à DMLA atrophique elle est très fine et très collée, mais aussi très fragile. C’est donc une étape longue et dangereuse », commente-t-il. « Il ne faut pas aller trop profond, ni trop vers le haut pour ne pas perforer la rétine. Il faut naviguer entre deux eaux sur plusieurs millimètres ». Ensuite, il a glissé la puce sous la rétine et a recollé cette dernière. « C’était la première fois que je faisais une telle intervention et c’était un vrai challenge », souligne le Pr Kodjikian. L’opération a duré 2h30, contre 4 à 5 heures initialement annoncées par le laboratoire.

 

Rééducation pendant un an

Après la chirurgie, la patiente doit maintenant suivre une rééducation pendant un an. « L’espoir pour cette patiente est d’arriver à mieux voir, même si elle ne pourra sans doute pas lire du Stendhal ou conduire une voiture, mais elle pourra probablement lire des grosses lettres », espère le chirurgien.

Pour le moment, sa prothèse a été activée pour la première fois la semaine dernière et elle a déjà pu avoir des impressions visuelles qu’elle n’avait pas avant.

« Ce système de rétine artificielle est actuellement le plus sophistiqué qui existe, car c’est celui qui a le plus de pixels. Dans les années à venir, cela va sans doute encore s’améliorer, mais pour l’instant l’étude clinique doit permettre de montrer que cela fonctionne », conclut le Pr Kodjikian.

Le 14 décembre, il a implanté un deuxième patient, en 1h40 seulement.

Cet article a été écrit par Anne-Gaëlle Moulun, et initialement publié sur le site internet Medscape.