Premier registre français des manifestations neurologiques associées au COVID-19


  • Agnès Lara
  • Actualités Médicales
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Un registre français des manifestations neurologiques

Les différentes manifestations neurologiques observées de façon concomitante à l’infection COVID-19 rapportées par la littérature ont incité à les colliger au sein d’un registre français. Le Dr Thomas De Broucker, chef du Service de Neurologie du Centre hospitalier de Saint Denis, et coordinateur de l’Observatoire national des manifestations neurologiques de COVID-19, a présenté les données de ce premier registre français. Il était l’un des trois experts invités au webinaire organisé le 12 mai dernier par la Société Française de Neurologie (SNF), le Collège des Enseignants de Neurologie (CEN) et l’Association Nationale des Assistants et Internes de Neurologie de France (ANAINF) (Déjà paru sur Univadis une synthèse de la communication de Sophie Demeret sur la physiopathologie de ces manifestations). 

Ce registre a colligé de façon rétrospective entre le 1er mars et le 31 avril 2020 les données de patients COVID-19 confirmés, issues de services de neurologie, mais aussi de médecine interne, d’infectiologie, de réanimation et d’autres services ayant hébergé des patients COVID-19, en France métropolitaine et en Outre-mer, « avec une surreprésentation de l’Ile-de-France et du Grand Est » a précisé le neurologue (37 centres et 70 contributeurs au total). Le recueil est encore en cours et les données présentées ici portent sur les 171 premières fiches reçues au 9 mai 2020.

Les manifestations neurologiques étaient prises en compte lorsqu’une relation temporelle étroite avec l’infection au SARS-Cov-2 était avérée et qu’aucune autre cause n’était retrouvée. Les données de 490 patients hospitalisés durant cette période ont ainsi été colligées. Parmi eux, 43 ont eu des manifestations neurologiques, soit 8,7%, un taux très inférieur à ceux publiés par ailleurs dans la littérature« Ce chiffre est certainement sous-évalué par le fait que les anosmies ont probablement été largement sous-déclarées, par doute quant à leur nature neurologique ou périphérique/ORL », suppose Thomas de Broucker.

 

Une grande variété de manifestations neurologiques observée chez les patients COVID-19

Les patients chez qui sont survenues ces manifestations neurologiques avaient un âge médian de 64 ans, étaient plus souvent des hommes (59%) et le plus souvent étaient atteints d’une forme modérée (32% des cas) ou sévère (41%). Parmi eux 7% sont décédés. Les signes neurologiques étaient apparus de façon secondaire au tableau classique du COVID-19 dans les trois quarts des cas, mais de façon inaugurale (en même temps que les autres symptômes) dans 15% des cas et au réveil de la réanimation dans 12% des cas. Il pouvait s’agir de symptômes aspécifiques isolés comme des céphalées (12%), des vertiges (1%) ou une anosmie (1%), de signes d’atteinte du système nerveux central (SNC) comme des syndromes confusionnels (fréquents, 49%), des crises d’épilepsies (12%) ou des déficits focaux (31%) ou encore de signes d’atteintes périphériques comme des déficits sensorimoteurs des membres (14%).

À partir des diagnostics retenus par les médecins déclarants et après rappels des centres pour informations complémentaires, 6 catégories diagnostiques ont été retenues : les AVC dans 30% des cas, les encéphalopathies dans 39% des cas, les encéphalites (8%), les polyradiculonévrites aiguës (PRNA) (8%), les méningites et les tableaux cliniques de mécanismes indéterminés rassemblant les diagnostics n’entrant pas dans l’une des précédentes catégories (14% pour les deux).

Au final, les premiers résultats de ce registre apportent des précisions sur la palette de manifestations neurologiques qu’il est possible de rencontrer de façon concomitante au COVID-19. Au vu des résultats systématiquement négatifs des recherches de SARS-Cov-2 par PCR dans les prélèvements de liquide céphalorachidien, une neuro-invasion par le virus apparaît peu probable, au sein du parenchyme cérébral tout au moins (pas des vaisseaux). Des études complémentaires sont attendues pour préciser chacune des catégories diagnostiques décrites ici, mais pour le neurologue « elles résulteraient de dysfonctions systémiques (hypotension artérielle, hypoxie, thromboses micro- ou macrovasculaires), liées soit à des dysfonctions immunologiques (auto-immunité adaptative dans les cas de syndrome de Guillain-Barré par exemple), soit à l’activation microgliale ou encore au « déluge » cytokinique associé au COVID-19 ».