Pour une stratégie nationale santé environnement

  • Serge Cannasse
  • Actualités professionnelles
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Entre 2004 et 2019, trois Plans nationaux santé environnement (PNSE) se sont succédés (2004-2008, 2009-2013, 2015-2019). La Direction générale de la santé a demandé au Haut Conseil de la santé publique (HCSP) d’en faire une évaluation. Le quatrième plan (2021-2025), en cours, n’y est pas inclus. Le groupe de travail du HCSP s’est basé principalement sur 4 thématiques présentes dans chacun des plans : polluants dans l’air extérieur, qualité de l’air dans les environnements intérieurs, notamment les crèches et les écoles, risques dits émergents (nanomatériaux, ondes électromagnétiques, perturbateurs endocriniens), produits chimiques dans l’alimentation, l’eau, les biens de consommation.

Des avancées et des freins

Au crédit des PNSE, les auteurs mettent « une nette amélioration des outils de mesure » des expositions, pondérée par la dispersion des bases de données. Elle a contribué à une « nette diminution de la pollution atmosphérique pour la plupart des polluants réglementés », entamée cependant avant la mise en route des plans. Ce résultat n’empêche pas la France d’être « sous le coup de contentieux européens et d’avoir été condamnée par le Conseil d’Etat », cette amélioration marquant le pas par rapport aux normes européennes. 

Autre avancée largement due aux plans : la sensibilisation des professionnels et du public en ce qui concerne l’environnement intérieur, même si certains résultats sont décevants, comme l’absence de réduction du confinement de l’air dans les établissements scolaires.

La prise en compte des risques émergents est une avancée importante. On note cependant qu’elle s’est souvent faite sous la pression d’associations, par exemple pour l’interdiction du bisphénol A dans les biberons et les emballages alimentaires. Mais les auteurs constatent qu’il « subsiste toujours un cloisonnement entre les connaissances acquises sur les expositions et les impacts sur la santé humaine. »

Les produits chimiques dans l’alimentation font l’objet de nombreux règlements. Les PNSE se sont peu intéressés au sujet, traité par d’autres plans sans synergie entre eux, « alors que les contaminants alimentaires représentent une des sources principales de l’imprégnation de la population française, en particulier les enfants. » 

D’une manière générale, le groupe de travail note une « difficulté à structurer la collecte de données sanitaires pertinentes », la France étant très en retard sur ce point. Deux problématiques en rendent partiellement compte. L’exposition à des polluants multiples a des effets qui ne sont pas les mêmes selon l’âge des personnes exposées et selon la dose reçue, qui n’obéit pas toujours au principe de Paracelse (l’effet augmente avec la dose). Les études évaluant les relations entre exposition et pathologies sont longues et coûteuses et les PNSE n’y sont pas directement associés. Ces problématiques ont cependant permis de sensibiliser les autorités de santé à la contrainte d’agir en situation d’incertitude.

Les auteurs mettent en avant le rôle essentiel des Plans régionaux santé environnement, pourtant mal connus du public, mais ayant eu les grands mérites de décliner les actions au plus près des besoins territoriaux et de créer des partenariats entre acteurs (par exemple, entre réseaux d’éducation à la santé et réseaux d’éducation à l’environnement).

Le besoin d’une stratégie nationale

L’un des problèmes essentiels des PNSE est leur manque de coordination avec les autres plans : ils « n’ont pas correctement joué leur rôle de plan matriciel dont découleraient tous les autres plans nationaux dans le champ santé-environnement. » Il manque une stratégie nationale (permettant d’intégrer d’autres préoccupations : transports, urbanisme, industrie, agriculture, etc) des obligations juridiques découlant des PNSE et un « accompagnement en matière de ressources humaines et budgétaires. » 

Parmi les recommandations émises par le groupe de travail, on peut noter la nécessité de valoriser le travail d’expertise des chercheurs, l’importance de tenir compte des travaux des sciences humaines et l’obligation de formation des professionnels de santé aux « facteurs de risques des pathologies possédant une étiologie environnementale », notamment les professionnels du premier recours.