Pour une stratégie globale favorisant l’installation des médecins dans les « déserts médicaux »
- Serge Cannasse
- Actualités professionnelles
Les déserts médicaux, bien que difficiles à définir et évaluer, ne sont pas une spécificité française. Dans tous les pays, l’accès aux services de santé n’est pas assuré dans tous les territoires, notamment dans certaines zones rurales et les zones urbaines défavorisées. Il existe une littérature abondante sur le sujet et les solutions préconisées ou expérimentées. Une équipe de la DREES (Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques) s’y est attelée pour tenter d’en tirer des leçons pour la France.
Elle souligne d’emblée les limites de l’exercice : 80% des références sont issues de trois pays (États-Unis, Canada, Australie) très différents du nôtre, que ce soit dans l’organisation du système de santé ou par leurs caractéristiques géographiques (vastes étendues peu peuplées, conditions climatiques extrêmes, peuples autochtones). De plus, les niveaux de preuve sont la plupart du temps « modestes ». Il n’en reste pas moins qu’il est possible d’en tirer quelques déterminants communs favorisant ou pas l’installation des médecins.
Des facteurs personnels importants
Il y a d’abord des facteurs personnels qui expliquent le choix d’un territoire : liens avec le territoire (éducation, attaches familiales ou amicales), souhait d’exercer une médecine de famille, situation familiale et son évolution avec le temps (par exemple, avoir des enfants peut pousser à se rapprocher d’une ville dotée de bons établissements scolaires). Les conditions d’exercice sont fondamentales : possibilité de réguler la charge de travail, environnement professionnel. Les services offerts par le territoire importent également : éducatifs, culturels, récréatifs.
L’aspect financier n’est pas négligeable, mais « son poids apparaît secondaire par rapport aux autres conditions de l’épanouissement professionnel. » D’où le constat que « les politiques visant l’amélioration de la répartition territoriale ne peuvent donc pas se fonder sur le seul levier des incitations financières. » Effectivement, si elles ont été largement utilisées, leurs résultats ne se sont guère avérés probants.
Quelles sont les autres solutions préconisées ?
Il est illusoire d’augmenter les effectifs étudiants en espérant qu’un certain nombre des médecins ainsi formés sera incité à s’installer dans des zones défavorisées, même s’il est nécessaire de disposer d’un nombre minimum de médecins pour ne pas accroître les déficits. En revanche, ce qui fonctionne est d’augmenter la part d’étudiants issus de communautés défavorisées en termes d’accès aux soins. Cela se fait de deux manières : décentraliser les lieux de formation, adapter les processus de sélection.
Il existe aussi une méthode contraignante, restreindre la liberté de choix, soit en organisant un passage obligé d’exercice dans certaines zones déficitaires, soit en limitant le nombre d’installations par territoires. Cela fonctionne plutôt bien à un niveau géographique assez large (par exemple, la région), sans doute bien moins à un niveau plus localisé, quoiqu’il existe peu d’études sur le sujet.
Plusieurs mesures de soutien ont été expérimentées :
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Organisation et financement des remplacements.
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Facilitation de la formation continue
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Aménagement des conditions de travail pour les médecins seniors (par exemple, suppression des gardes).
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Stratégies de soutien du bien-être mental des praticiens.
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En France, promotion de l’exercice collectif, avec un frein majeur : la difficulté à monter une structure adéquate.
Peu ont été évaluées. Mais l’ensemble des auteurs s’accorde sur un point : aucune mesure prise isolément n’est pertinente. Ce qui compte, c’est de mettre en place une stratégie globale articulant différents leviers d’installation.
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