Oxycodone « non détournable » : une option pour limiter l’usage récréatif des opioïdes médicamenteux ?

  • Agnès Lara
  • Résumé d’article
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À retenir

En Australie, une nouvelle formule d’oxycodone à libération contrôlée « non détournable » a permis de réduire les usages non médicaux chez les sujets utilisant les opioïdes médicamenteux de façon détournée, notamment par injection, sans pour autant favoriser le recours à d’autres formules d’oxycodone ou d’opioïdes.

Une réduction des ventes des dosages à 40 et 80 mg a été observée en population générale. Cette nouvelle formule ne semble pas avoir affecté la consommation globale d’opioïdes médicamenteux, ni la fréquence de ses effets indésirables (hospitalisations, overdoses, etc.). Elle pourrait favoriser la mise en place de nouvelles stratégies visant à réduire l’usage détourné des opioïdes et à en limiter les dangers dans les populations à risque.

Pourquoi est-ce important ?

Les dangers associés à l’usage non médical d’opioïdes sont aujourd’hui bien documentés et sont perceptibles dans différents pays, en particulier en Australie où la prescription d’opioïdes s’est fortement accrue ces dernières années. Ce phénomène s’est accompagné d’une augmentation des hospitalisations et apparaît responsable de plus de 70% des décès par overdose. Des formulations d’opioïdes à libération contrôlée se sont développées pour limiter les usages non médicaux. Elles entraînent une absorption graduelle et constante du médicament dans l’organisme sur une période prolongée. Récemment, une formulation d’oxycodone à libération contrôlée a été rendue plus difficile à écraser et à dissoudre de façon à dissuader les usages détournés par injection ou par voie intranasale. Introduite en Australie en avril 2014, cette formule « non détournable » a rapidement remplacé les anciennes formules à libération contrôlée et a fait l’objet d’une étude de phase 4 dont les résultats viennent d’être rendus.

Principaux résultats

  • En population générale, aucun effet de l’introduction de la nouvelle formule « non détournable » d’oxycodone à libération contrôlée en Australie n’a pu être observé sur l’usage global d’opioïdes, d’oxycodone ou d’autre opioïdes médicamenteux, en termes d’équivalents de morphine vendus ou de conséquences sur la santé (overdose d’opioïdes, recours aux numéros d’aide aux usagers de drogues, nécessité de traitement par agoniste opioïde, etc.).
  • Le recours aux dosages d’oxycodone les plus couramment utilisés (5, 10, 15, 20 ou 30 mg) n’a pas été modifié. En revanche, celui des dosages les plus élevés (40 et 80 mg) a été réduit de façon significative après introduction de la nouvelle formule. Ces dosages sont moins prescrits mais plus souvent utilisés à des fins détournées.
  • Une augmentation de l’utilisation d’autres formulations d’oxycodone a également été observée, soutenue notamment par une augmentation des ventes d’oxycodone-naloxone depuis son autorisation en 2010 dans la prise en charge des douleurs chroniques modérées à sévères réfractaires aux analgésiques opioïdes.
  • D’après la méta-analyse réalisée sur les populations sentinelles plus sujettes au détournement des opioïdes médicamenteux (par injection essentiellement), l’introduction de la nouvelle formule a permis de réduire l’usage détourné d’oxycodone à libération contrôlée (injection d’opioïdes médicamenteux ou d’oxycodone à libération contrôlée) sans augmenter l’usage d’héroïne, de méthamphétamine ou d’autres drogues.

Méthode

  • L’étude National Opioid Medication Abuse Deterrence (NOMAD) a analysé les données nationales de ventes d’opioïdes en Australie entre juillet 2009 et décembre 2015, y compris de produits à base de codéine vendus sans ordonnance (hors opioïdes prescrits à l’hôpital).
  • La cohorte NOMAD (populations sentinelles) a été formée à partir de différentes sources avant l’introduction de la formulation d’oxycodone « non détournable » en Australie, puis évaluée 1 mois et 12 mois après. Ces sujets étaient plus enclins à détourner l’usage de médicaments opioïdes (consommateurs connus de drogues injectables, ayant recours aux programmes d’échanges d’aiguilles et de seringues, etc.).
  • Les données concernant les conséquences médicales de l’usage des opioïdes sur la santé ont été collectées dans différents états.

Financement

L’étude a reçu des financements de Mundipharma Australie, du gouvernement australien et du Conseil national de la santé et de la recherche médicale.