Omicron : probablement plus d’hospitalisations au bout du compte et un vrai risque de désorganisation
- Nathalie Barrès
- Actualités Médicales par Medscape
Les personnes infectées par le variant Omicron sont moins susceptibles d'avoir besoin de soins hospitaliers que celles infectées par le variant Delta, selon deux nouvelles grandes études menées au Royaume-Uni et en Afrique du Sud. Toutefois, le rythme fulgurant de propagation du variant Omicron pourrait engendrer un nombre important d’hospitalisations au bout du compte et désorganiser le système.
Omicron moins grave que Delta : un consensus de données
Les nouvelles données, qui ont été publiées avant examen par les pairs, s'ajoutent aux précédents résultats suggérant qu'Omicron – bien qu'extrêmement contagieux – peut entraîner des symptômes moins graves que ses prédécesseurs.
« Cela nous aide à quantifier à quel point Omicron est moins grave que Delta, et il semble qu'il y ait entre 40 et 75% de réduction du risque d'hospitalisation, ajusté pour de nombreux facteurs, ce qui est très bien », a commenté le Dr Eric Topol, rédacteur en chef en chef de Medscape et cardiologue au Scripps Research Translational Institute à La Jolla, en Californie[1].
La première analyse, qui a été effectuée par l’OMS et l'Imperial College de Londres, a inclus toutes les personnes atteintes de Covid-19 confirmées par PCR au Royaume-Uni au cours des 2 premières semaines de décembre – environ 56.000 cas Omicron et 269.000 infections Delta.
Elle a révélé que dans l'ensemble, les personnes infectées par Omicron avaient un risque réduit d'environ 20% d'avoir besoin de soins hospitaliers et un risque 40% risque plus faible de passer une nuit à l'hôpital, par rapport aux personnes infectées par le variant Delta.
Aussi, les personnes qui ont été réinfectées – qui ont attrapé Omicron après s'être remises d'une infection précédente au Covid-19 – avaient un risque d’hospitalisation réduit de 50 à 60% reflétant probablement les avantages d'avoir une immunité antérieure contre la même famille de virus.
La deuxième étude, menée par des chercheurs de l'Institut national des maladies transmissibles en Afrique du Sud, a inclus plus de 29.000 cas de Covid-19 dont les résultats de laboratoire suggéraient fortement des infections à Omicron. Par rapport aux personnes infectées par le variant Delta, les personnes présumées infectées par Omicron étaient environ 70% moins susceptibles d'avoir une maladie grave.
Toutefois, « compte tenu de la transmissibilité élevée du virus Omicron, les services de santé pourraient faire face à une pression croissante si les cas d'Omicron continuent de croître au rythme observé ces dernières semaines », a souligné l'auteur de l'étude, le Pr Neil Ferguson (Imperial College de Londres).
Les auteurs de l'étude précisent que leurs résultats sont spécifiques au Royaume-Uni et à l'Afrique du Sud, où une partie importante de la population bénéficie d'une certaine protection immunitaire contre les infections passées. En d'autres termes, ils peuvent ne pas s'appliquer aux pays où moins de personnes ont été vaccinées ou infectées par le Covid-19.
Lors d’un point presse organisé par le Conseil scientifique le 23 décembre[2], le Pr Yazdan Yazdanpanah (chef du service des maladies infectieuses à l'hôpital Bichat, directeur d'études à l'Inserm, membre du Conseil scientifique) est revenu sur ces données. « Oui, il y a des signes qui indiquent que ce variant est moins sévère. La durée des séjours en hospitalisation avec le Omicron est moindre. Les patients hospitalisés ont moins souvent d’oxygène et sont moins souvent transférés en réanimation. D’autre part, il y a beaucoup de patients hospitalisés pour autre chose chez qui on trouve le virus de manière fortuite. Ceux-là n’ont pas de pneumonie », explique-t-il avant d’ajouter : « D’après un de mes collègues de l’hôpital de Royal Free à Londres, « chez les patients hospitalisés avec une pneumonie liée à Omicron, même si les nombres sont faibles, pour l’instant il y a 50% de non-vaccinés, 50% qui ont eu une à deux doses. Ils ne voient pas de personnes avec trois doses de vaccin. La troisième dose est une arme à notre disposition qu’il faut utiliser ».
De son côté le Pr Arnaud Fontanet (épidémiologiste à l'Institut Pasteur et membre du Conseil scientifique) a quelque peu tempéré la portée de ces premières données en soulignant que si actuellement, les personnes hospitalisées avec le variant Omicron étaient jeunes et donc généralement moins sévèrement atteintes, des personnes âgées devraient arriver prochainement à l’hôpital avec des formes plus sévères. « Il sera très important d’observer ce qui va se passer à Londres la semaine prochaine pour comprendre quel sera le retentissement hospitalier dans un avenir proche », explique-t-il.
Vers une désorganisation de la santé et des autres secteurs essentiels ?
Autre sujet de préoccupation, lié à la propagation fulgurante du variant Omicron, « si le personnel soignant est atteint comme cela commence à être le cas en Angleterre, cela peut créer une désorganisation », note le Pr Yazdanpanah.
« Vous imaginez bien que si l’on a plus de soignants au lit du malade, même si comme on l’espère la gravité est moindre qu’avec le variant delta, on aura des difficultés structurelles à gérer nos patients », souligne le Pr Olivier Guérin, chef du pôle gériatrie du CHU de Nice et membre du Conseil scientifique.
« La règle dite des 17 jours (7 pour le contact + 10 en cas de contamination) fait que dans un contexte de diffusion aussi forte du variant, vont se poser des problèmes pour les secteurs stratégiques de notre société, la distribution alimentaire, la sécurité, l’énergie, les transports, les communications et la santé. Cela nécessite de réfléchir à cette règle. A l’hôpital, les soignants cas-contacts ne sont plus en éviction car on y arrive déjà plus. Mais, il faut maintenant se poser la question pour les cas positifs asymptomatiques. Quel est le bénéfice entre le fait d’assurer la permanence des soins et le risque de diffusion virale ? Le bénéfice-risque de les maintenir au travail doit être analysé de manière plus fine », souligne-t-il.
« Il faut s’attendre à ce qu’au mois de janvier on fonctionne sur un mode dégradé et commencer à réfléchir sur comment on va faire fonctionner les secteurs essentiels avec notamment la question de l’école alors que des enseignants et des enfants seront infectés ou cas-contacts. Il faudra faire des ajustements en fonction de la sévérité des formes cliniques mais aussi de la nature des fonctions exercées. Il y a des assouplissements qui seront nécessaires avec un renforcement des gestes barrière. Cette question est inédite en raison de la contagiosité du virus », conclut Arnaud Fontanet.
Cet article a été écrit par Aude Lecrubier, Brenda Goodman et initialement publié sur le site internet Medscape.
Malheureusement, l’accès à l’intégralité de cet article est reservé uniquement aux professionnels de santé disposant d’un compte.
Vous avez atteint la limite d'articles par visiteur
Inscription gratuite Disponible uniquement pour les professionnels de santé