Nouvelles données sur les bénéfices-risques des antidépresseurs durant la grossesse

  • Résumé d’article
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À retenir

  • Une méta-revue de 51 méta-analyses montre une augmentation du risque de malformations congénitales majeures, d’atteintes congénitales cardiaques, de naissance avant terme et d’hypertension pulmonaire persistante chez le nouveau-né exposé in utero antidépresseurs.
  • L’augmentation du risque d’hémorragie post-partum, de décès à la naissance et d’atteintes du développement moteur et intellectuel est moins évidente avec les données actuellement disponibles.
  • Le bénéfice de la prise d’antidépresseur durant la grossesse sur le risque de récidive de dépression après la grossesse n’est quant à lui pas clairement mis en évidence.
  • Pour les auteurs, « ces résultats suggèrent que les antidépresseurs devraient être réservés à la femme souffrant de dépression en 2e ligne de traitement après la psychothérapie. Ce qui est en accord avec les recommandations. Le risque de malformations congénitales majeures pourrait être évité en respectant l’utilisation de la paroxétine et de la fluoxétine comme le préconisent les recommandations. »

Pourquoi est-ce important ?

En France, l’étude Elfe a révélé qu’environ 12% des femmes enceintes ont déclaré une détresse psychologique anténatale (troubles dépressifs, anxieux, psychiques sévères, addiction et mésusages d’alcool ou de substances psychoactives, ….)1. L’augmentation des prescriptions d’antidépresseurs durant la grossesse est constante au cours des dernières décennies. En Europe, le taux de prescription serait entre 2,3 et 3,3% pour les inhibiteurs de la sérotonine – classe d’antidépresseurs la plus prescrite durant cette période. Pour des questions de sécurité, environ la moitié des femmes arrêteraient leur traitement antidépresseur avant d’être enceinte ou au cours du premier trimestre. Plusieurs études ont étudié les potentiels effets délétères de la prise d’antidépresseurs au cours de la grossesse et ont montré de faibles risques absolus et parfois des résultats contradictoires. D’où l’intérêt de s’appuyer sur les méta-analyses réalisées sur ce sujet et de les évaluer via une méta-revue pour gagner en puissance statistique. 

Méthodologie

Une méta-revue de la littérature a été réalisée à partir des bases de données PubMed et Web of Science le 25 octobre 2021 afin d’identifier les méta-analyses ayant évalué les associations entre l’utilisation d’antidépresseurs au cours de la grossesse et les effets sur la santé de la femme enceinte, de l’embryon, du fœtus, du nouveau-né et du développement de l’enfant. Cette méta-revue a suivi des recommandations spécifiques du domaine apportant une qualité méthodologique robuste particulière.

Principaux résultats

Au global, 51 méta-analyses ont été incluses (toutes ont évalué les risques, et une les bénéfices de l’usage des antidépresseurs durant la grossesse). 

Cette méta-revue a permis de mettre en évidence des données cohérentes concernant le risque pour le fœtus et le nouveau-né d’une exposition aux antidépresseurs durant la grossesse, avec un risque significativement augmenté :

  • de malformations congénitales majeures : inhibiteurs sélectifs de la recapture de la sérotonine, paroxétine, fluoxétine, aucune preuve pour la sertraline, 8 méta-analyses), 
  • de malformations cardiaques congénitales : paroxétine, fluoxétine, sertraline,
  • de naissance prématurée (risque élevé de biais), tremblement, hypoglycémie, diminution des scores d’Apgar à 1 et 5 minutes, admission en unités de soins intensifs néonataux et hypertension pulmonaire persistante chez le nouveau-né. 

Les données probantes étaient limitées (et à risque de biais) en ce qui concerne l'augmentation significative des risques d'hémorragie post-partum, la mortinatalité, les troubles du développement moteur et intellectuel. Des preuves non concluantes ont été obtenues pour une augmentation des risques d'avortement spontané, de faible poids à la naissance, de détresse respiratoire, de convulsions, de troubles alimentaires, et de risque ultérieur d'autisme en cas d'exposition précoce aux antidépresseurs. 

Aucune preuve d'augmentation des risques d'hypertension gestationnelle, de prééclampsie et d'un risque ultérieur de trouble déficitaire de l'attention/hyperactivité n’ont été mis en évidence. 

Une seule méta-analyse a évalué les bénéfices de la prise d’antidépresseurs durant la grossesse sur le risque de rechute de la dépression. Celle-ci montre une prévention des risques de rechute en cas de dépression sévère, mais avec un niveau de preuves limité.

La qualité méthodologique des méta-analyses était globalement faible (score AMSTAR-2 = 54,8%), et le risque de biais élevé, notamment de biais d'indication.

Principales limitations

Ces résultats sont cependant limités par la rareté des données précisant l’indication de l’utilisation des antidépresseurs et l’utilisation de groupes de comparaison appropriés.