Médecins généralistes français et goutte : une inertie clinique
- Nathalie Barrès
- Résumé d’article
À retenir
Les recommandations EULAR (European League Against Rheumatism) 20061, ACR (American College of Rheumatology) 20122 et EULAR révisées 20143 préconisent un objectif d’uricémie inférieure à 6 mg/dL pour les patients sous traitement hypo-uricémiant (THU) et même inférieur à 5 mg/dL pour les formes sévères (goutte tophacée). Malgré ces recommandations, les résultats de cette étude décrivant la prise en charge des patients souffrant de goutte en 2014 montrent que moins de la moitié des patients sous traitement hypo-uricémiant avaient une uricémie inférieure à 6 mg/dL. L’allopurinol restait le traitement le plus prescrit, à une dose inférieure à 200 mg/j, sans modification de posologie sur un an pour la plupart des patients. Les experts appellent à mettre en œuvre des mesures d’information et de formation similaires à celles mises en place pour le diabète.
Pourquoi est-ce important en pratique clinique ?
La goutte concernerait en France 0,9% de la population4 et le fardeau lié à celle-ci augmenterait pour les adultes en surpoids et obèses5. Les résultats de cette étude sont cohérents avec d’autres données en “vraie vie”. Les raisons principales de l’insuffisance d’atteinte de l’objectif uricémique cible incombent à la fois au médecin et au patient. Les traitements sont souvent mal suivis par les patients, et les médecins généralistes français n’appliqueraient pas l’intensification du traitement préconisée par les recommandations en vigueur pour que l’objectif cible soit atteint.
Méthodologie
Les données sont issues d’une base de données observationnelle longitudinale informatisée, à partir d’un échantillon 1.200 médecins généralistes exerçant en cabinet privé.
Les caractéristiques démographiques, les comorbidités, la qualité de la prise en charge (jugée par l’uricémie et le test de la fonction rénale), ainsi que les caractéristiques liées au traitement (type d’hypo-uricémiant, changement de traitement et posologie) ont été analysées.
Principaux résultats
Les analyses ont porté sur les données de 14.400 patients souffrant de goutte (84,4% d’hommes, âge moyen 67,5 ans).
Les comorbidités les plus fréquentes étaient l’hypertension (70%), la dyslipidémie (51%), le diabète (24%), l’obésité (23%) et la maladie coronarienne (17%).
Seuls 32% et 29% des dossiers patients contenaient des résultats d’analyses de taux d’uricémie et de la fonction rénale.
L’uricémie moyenne était de 6,83 mg/dL [6,42-6,94], et seuls 39% et 20% des patients goutteux avaient un dosage d’uricémie inférieur respectivement à 6 et 5mg/dL.
Par ailleurs, 24,3% des patients présentaient une insuffisance rénale (IR) légère, 25,4% une IR modérée, 3,5% une IR grave et 1,2% étaient en IR terminale.
Sur l’ensemble de la cohorte, 72% étaient sous THU et/ou colchicine. Les traitements les plus souvent prescrits étaient l’allopurinol et le fébuxostat (respectivement 187 mg/j et 83 mg/j), et 59% des patients prenaient un THU sans colchicine.
Que le diagnostic soit récent ou non, le THU n’était changé que chez quelques patients (essentiellement pour passer de l’allopurinol au fébuxostat). L’augmentation ou la diminution de posologie n’ont été constatées que pour respectivement 4% et 3,7% des patients.
Principales limitations
Étude basée sur des données informatisées, ce qui présente un risque dans le recueil des informations.
Financement
Étude financée par AstraZeneca.
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