Les propositions de l’Académie de pharmacie pour lutter contre la pénurie de médicaments


  • Serge Cannasse
  • Actualités socio-professionnelles
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L’Académie de pharmacie s’est positionnée sur « les conséquences désastreuses que pourrait avoir la LFSS 2023 (loi de financement de la sécurité sociale) », en discussion au Parlement, « sur l’augmentation des pénuries et de ruptures de stocks des médicaments anciens et indispensables. »

Elle rappelle en préambule de son communiqué de presse que « certains médicaments anciens restent indispensables » et que leur disparition « entraineraît, dans la meilleure hypothèse, leur remplacement par de nouveaux médicaments nettement plus coûteux et de plus en plus difficilement finançables par les comptes sociaux. » Or ces médicaments seraient menacés par les dispositions de la LFSS si elle était adoptée en l’état. En effet, « la part du médicament dans les dépenses de santé serait 7% inférieure aux dépenses constatées en 2022 (24,6 milliards d’euros contre 26,4 milliards de dépenses estimées en 2022) et le niveau de baisses de prix annoncé reste très élevé (800 M€ au minimum) », ce qui pèse sur les médicaments anciens.

De fortes contraintes de production

Cette menace survient alors que les industries du médicament font face à des contraintes majeures : augmentation du coût de l’énergie, difficultés d’approvisionnement en matières premières et composants. Celles-ci ont entraîné des augmentations de 20 à 30% des coûts de production.

Dans ces conditions, les investissements nécessaires pour adapter l’appareil productif sont « impossibles à envisager pour des opérateurs dont les marges s’érodent, sans compter les coûts induits par les nouvelles réglementations. » C’est pourquoi « 71% des petites et moyennes entreprises (PME) pharmaceutiques implantées en France ne commercialisent plus certains de leurs médicaments et finissent par demander le retrait de l’autorisation de mise sur le marché (AMM) de plusieurs de leurs produits. » L’Académie rappelle que le nombre de signalements de pénuries, ruptures de stocks, arrêts de commercialisation et abrogations d’AMM est passé de 871 en 2018 à 3.278 au 30 septembre 2022.

Enfin elle « exhorte les pouvoirs publics à exempter à très court terme des éventuels délestages à venir les sites de production de médicaments, spécialement ceux produisant des médicaments injectables », dans le cadre du plan gouvernemental de sobriété énergétique.
 

Elle émet plusieurs recommandations :

  • Organiser des États généraux sur la politique du médicament pour repenser le système actuel de fixation des prix des médicaments anciens indispensables;

  • Arrêter d’urgence de baisser les prix par classes thérapeutiques (tenir compte des galéniques et des médicaments produits en petites quantités pour des populations spécifiques);

  • Revaloriser les prix des médicaments anciens indispensables, notamment injectables, dont la production est coûteuse;

  • Déterminer dans l’urgence une liste des médicaments indispensables (proposition faite également par la Commission des affaires européennes du Sénat, à l’échelle européenne);

  • Dispenser ces médicaments de la clause de sauvegarde (contribution à l’assurance maladie par les laboratoires pharmaceutiques lorsque leur chiffre d’affaires hors taxes réalisé en France au titre des spécialités remboursables dépasse le taux de progression défini en LFSS).

À noter que la Commission des affaires européennes du Sénat fait deux autres propositions : obliger les entreprises de l’industrie pharmaceutique à constituer des stocks et envisager une production publique pour les médicaments critiques, dans le cadre de partenariats public-privé.