Les patients des urgences consultent aussi leurs généralistes

  • Serge Cannasse
  • Actualités Médicales
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La forte progression du recours aux urgences (2,5% en moyenne par an) conduit à s’interroger sur sa pertinence, sur la place qu’occupe la médecine de ville face à ces demandes ou sur une éventuelle inadéquation de l’articulation de celle-ci avec les services d’urgences. Si elle ne permet pas de conclure, une enquête de la DREES (Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques) apporte de précieux éclairages qui combattent utilement plusieurs idées reçues. Elle a été conduite sur un échantillon représentatif des bénéficiaires âgés de moins de 85 ans des trois grands régimes de sécurité sociale (salariés, indépendants, agricoles) au cours de l’année 2017.

La plupart des patients des urgences semblent bien insérés dans la médecine de ville

Premier enseignement : la grande majorité des patients des urgences semblent bien insérés dans la médecine de ville, puisque 88% d’entre eux ont consulté au moins une fois un généraliste dans l’année qui a précédé leur passage aux urgences et que 54% d’entre eux en ont consulté un au moins 4 fois. Contrairement à ce qui pourrait être attendu, ceux qui ont recours aux urgences consultent plus la médecine de ville (+27%) que ceux qui ne se sont pas rendus aux urgences, qu’ils soient bénéficiaires de la CMU-C ou pas, qu’ils souffrent d’une ALD (affection de longue durée) ou pas et quel que soit leur âge. 

Comme le soulignent les auteurs du texte, « ces éléments ne permettent pas de dire si, oui ou non, le passage aux urgences se fait par substitution au recours au médecin généraliste. Mais ils laissent à penser que cet effet de substitution, s’il existe, n’est pas dominant. » Inversement, « rien ne permet de conclure que le recours aux généralistes de cette patientèle ne serait pas encore plus important si elle n’accédait pas aux urgences. »

Peu de patients aux urgences sans recours à la médecine de ville

Second enseignement : le nombre de patients venus fréquemment aux urgences sans aucun recours à la médecine de ville est faible. Ils représentent 9 % au plus du total des patients des urgences. Il s’agit le plus souvent d’hommes, âgés de 15 à 44 ans et ayant moins souvent une ALD ou un facteur de risque de maladie.

Troisième enseignement : au moins 17% des patients des urgences ont vu un généraliste dans la semaine qui a précédé leur passage aux urgences. Leurs recours à la médecine de ville ont été deux fois plus souvent associés à des majorations pour consultation en urgences, consultation de nuit ou consultation le dimanche, que pour la patientèle non passée par les urgences. Pour les auteurs de l’étude, « cela suggère que lorsque le patient a consulté un généraliste en amont de sa venue aux urgences, son passage aux urgences s’est avéré plus sévère que la moyenne. » En revanche, la consultation chez un médecin spécialiste en amont de la venue aux urgences n’est pas associée en moyenne à un passage aux urgences plus sévère.

En conclusion, même si cette enquête ne permet certes pas de dédouaner la médecine de ville de toute responsabilité dans la croissance du taux de recours aux urgences, elle incite fortement à faire porter l’analyse  aussi sur l’organisation des établissements de santé et leur articulation avec la médecine de premier recours.