Les manifestations neurologiques associées au COVID-19

  • Sellal F, et al.
  • Pratique Neurologique

  • Agnès Lara
  • Résumé d’article
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À retenir

  • Après quelques mois de recul sur l’épidémie, une équipe du département de neurologie des Hôpitaux civils de Colmar a fait le point sur les manifestations neurologiques associées au COVID-19.
  • Elles apparaissent fréquemment et se manifestent de manière variée au cours de la maladie.
  • L’anosmie et la dysgueusie peuvent être considérées comme des marqueurs de l’infection en contexte épidémique.
  • Des troubles de la conscience sont fréquents, en lien avec des encéphalites ou encéphalopathies.
  • L’infection par le SARS-CoV-2 apparaît être un facteur indépendant d’AVC, essentiellement d’origine ischémique.
  • L’origine physiopathologique de ces troubles reste à ce jour encore largement méconnue.

 

 

Par son affinité pour le récepteur de l’enzyme de conversion de l’angiotensine 2 (ACE2), le tropisme du SARS-CoV-2 est multiple et concerne notamment le système nerveux central. Les voies d’entrées au sein de ce dernier sont encore discutées, mais selon une étude chinoise publiée dans le JAMA, les manifestations du COVID-19 concerneraient 36% des patients hospitalisés pour une forme sévère de la maladie. Avec maintenant plus de 6 mois de recul sur l’épidémie, une équipe du département de neurologie des Hôpitaux civils de Colmar a entrepris de répertorier les troubles cliniques associés au COVID-19.

Des manifestations neurologiques peu spécifiques ont été décrites par cette même étude chinoise menée à Wuhan sur 214 patients, comme des instabilités posturales et des céphalées présentes dans respectivement 16,8% et 13% des cas

Anosmie et dysgueusie comme marqueurs de la maladie en contexte d’épidémie

L’anosmie et la dysgueusie constituent un deuxième type de symptômes plus spécifiques, la première résultant le plus souvent d’une atteinte de l’épithélium olfactif par le virus, plus rarement d’une atteinte du nerf ou du cortex olfactif. Selon une étude européenne, ces symptômes apparaissent de façon précoce et très fréquente, avec une prévalence de respectivement 85,6% pour l’anosmie et de 88% pour la dysgueusie, des chiffres toutefois bien plus importants que ceux retrouvés en population chinoise à Wuhan (5,1% et 5,6%). Concernant préférentiellement les femmes, ces symptômes constituent un bon marqueur de la maladie en période d’épidémie. Ils disparaissent en moins de 15 jours dans la plupart des cas.

Encéphalites et encéphalopathies

Des troubles de la conscience apparaissent préférentiellement dans les formes sévères de COVID-19 (14,8% des cas) et résultent de mécanismes divers : encéphalites, crises d’épilepsie, encéphalopathies. Les méningo-encéphalites directement liées à une agression du parenchyme cérébral par le virus sont rares (6% à 9,5% des cas) et semblent plus souvent liées à l’existence de mécanismes para-infectieux. Elles surviennent en effet de façon retardée, 17 jours environ après la survenue des signes infectieux et répondent généralement bien aux corticoïdes.

Des troubles de la conscience apparaissent dans 78% des cas d’encéphalopathie, associés à des mécanismes toxiques ou métaboliques divers (orage cytokinique, sepsis, insuffisance rénale, etc.).

En revanche, les crises d’épilepsie pourtant fréquentes chez les patients réanimés lors de précédentes épidémies de coronavirus sont peu fréquentes dans le cadre de l’infection au SARS-CoV-2.

Une récente série anglaise a relevé un nombre élevé d’encéphalomyélopathies aiguës disséminées, avec lésions hémorragiques pour un tiers d’entre elles, mais sans anticorps spécifiques.

Enfin, des troubles cognitifs (exécutifs notamment) ont été rapportés chez un tiers des patients en sortie d’hôpital. Ces résultats nécessitent cependant encore d’être confirmés.

AVC d’origine ischémique

Les AVC sont maintenant bien décrits chez les patients atteints de COVID-19, la maladie apparaissant comme un facteur de risque indépendant. Ils surviennent avec une fréquence de 1,7% à 6% selon les séries et représentent 28,4% à 62% des cas avec complications neurologiques. Principalement d’origine ischémique, ils seraient liés à des anomalies de la coagulation dues au syndrome inflammatoire, ainsi qu’à un état d’hypercoagulabilité propre au COVID-19 et responsable de fréquentes complications thrombotiques. Plusieurs essais sont d’ailleurs en cours concernant l’intérêt et les modalités d’une anticoagulation prophylactique.

Les syndromes de Guillain-Barré

Ils représentent les atteintes périphériques les plus fréquentes chez les patients COVID-19 (7% des complications neurologiques) et surviennent généralement 5 à 10 jours après la survenue des premiers symptômes de la maladie. Plus rarement ont été décrits un syndrome de Miller-Fisher, des atteintes des nerfs crâniens, du nerf fibulaire péronier, ou encore des syndromes de Tapia (atteinte simultanée des nerfs crâniens X et XII) plus fréquents du fait de l’intubation orotrachéale et de la mise en position ventrale.