Les interventions sur le microbiome intestinal vont-elles transformer la médecine de demain ?

  • Zmora N & al.
  • Sci Transl Med

  • Agnès Lara
  • Résumé d’article
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À retenir

Depuis plus d’une dizaine d’années, le microbiome suscite un intérêt croissant. Les travaux menés chez des sujets sains, dans différentes situations pathologiques et en réponse à certaines interventions alimentaires ont ouvert de multiples pistes de traitement dans les maladies métaboliques, infectieuses (C. difficile) ou encore dans les maladies inflammatoires chroniques intestinales (MICI). Le défi des prochaines années consistera à définir des interventions personnalisées, à maîtriser les variations interindividuelles du microbiome, et surtout à évaluer l’efficacité et la sécurité à long terme chez l’homme dans le cadre d’essais contrôlés randomisés, avant de pouvoir intégrer ces nouveaux outils à la pratique clinique.

 

La recherche en nutrition s’est longtemps limitée à établir des liens entre les différents composants alimentaires et santé. Mais depuis plus d’une dizaine d’années, les recherches sur le microbiome sont en pleine expansion. Dès 2006, des chercheurs avaient montré que l’adiposité pouvait être modulée en fonction de la capacité du microbiome à récupérer l’énergie à partir du bol alimentaire. Or, on sait aujourd’hui que la composition et la fonction du microbiome intestinal peuvent être rapidement impactées par l’alimentation. Ces constats ont incité à rechercher de nouvelles stratégies de traitement des maladies cardiométaboliques. Il a en effet été démontré depuis qu’en modulant le microbiome, la consommation de prébiotiques pouvait améliorer le contrôle glycémique de patients souffrant de diabète de type 2. Les interventions diététiques ciblant le microbiome sont aujourd’hui envisagées comme de nouveaux outils complémentaires aux traitements existants, dans la prise en charge des MICI mal contrôlées par exemple. Ils pourraient aussi servir de marqueurs diagnostiques ou de suivi pour personnaliser les interventions diététiques ou médicamenteuses.

Probiotiques et post-biotiques

Les probiotiques ont suscité un intérêt croissant depuis ces 10 dernières années, mais les résultats d’efficacité se sont montrés inconstants. De récents travaux suggèrent que cela pourrait être lié à une colonisation variable des probiotiques dans le tube digestif de l’hôte selon le microbiome en place. Mais de façon plus générale, l’introduction des probiotiques en pratique courante se heurte encore à de multiples difficultés, comme le développement de techniques non invasives pour prélever de la muqueuse intestinale, déterminer la composition du microbiome dans différentes parties du tube digestif, ou encore décrire l’activité de certaines souches probiotiques in vivo. L’efficacité des probiotiques devra aussi être évaluée pour différentes situations cliniques, dans le cadre d’essais contrôlés randomisés de bonne taille. L’utilisation des post-biotiques représente une autre approche possible. Plutôt que d’introduire des micro-organismes vivants au sein du tube digestif, il est possible d’utiliser directement les métabolites qu’ils produisent tels que les acides gras à chaîne courte (AGCC) pour réduire l’inflammation dans des modèles animaux de colite par exemple. Mais là aussi, des études sont attendues pour évaluer l’efficacité et la sécurité de ces composés chez l’homme.

La transplantation de microbiome fécal

La TMF est une technique ancestrale qui revient aujourd’hui sur le devant de la scène. Certaines études ont notamment montré que la transplantation du microbiome d’un individu sain chez un sujet souffrant d’infection à Clostridium difficile pouvait réduire le risque de récidive au cours des 10 semaines suivantes par comparaison au traitement antibiotique classique (vancomycine). La TMF a depuis été testée dans d’autres situations pathologiques, comme les maladies métaboliques ou les maladies inflammatoires intestinales. Mais les résultats sont variables selon le donneur de microbiome sans que l’on comprenne bien pourquoi et par ailleurs le risque de transmission de pathologie du donneur au receveur ne peut être totalement écarté.

Les bactériophages pour une élimination ciblée des pathogènes au sein du microbiome

Les antibiotiques sont couramment utilisés pour éliminer les pathogènes, mais leur action n’est pas spécifique et ils peuvent favoriser l’apparition de résistances. C’est pourquoi les bactériophages suscitent un regain d’intérêt : ils ont une action plus ciblée sur les pathogènes et sont sans effet sur les cellules eucaryotes. Des composants nanomoléculaires ciblant la reconnaissance des pathogènes et associés au mécanisme de pénétration membranaire d’un phage sont également à l’étude. D’autres approches s’intéressent encore à l’interaction entre microbiome, métabolites immunomodulateurs et barrière intestinale. De nombreuses voies de recherche sont ouvertes et activement explorées.