Les consommations de drogues restent à des niveaux inquiétants chez les adolescents

  • Serge Cannasse
  • Actualités Médicales
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La consommation de drogues licites et illicites est responsable de 130.000 décès par an en France. Il est aujourd’hui bien établi qu’un des ses principaux facteurs favorisants est la précocité de leur usage, à l’adolescence. C’est pourquoi l’Académie de médecine a décidé de se pencher sur le sujet.

Des consommations en recul mais encore très élevées

Tous les indicateurs de consommation de tabac (expérimentation, usage quotidien, usage intensif) sont en recul chez les collégiens comme chez les lycéens français. Mais son niveau reste élevé à 16 ans et supérieur à la moyenne européenne (consommation au cours des 30 derniers jours 26% vs 22%). 

De même, les indicateurs de consommation d’alcool reculent, mais la consommation récente (30 derniers jours) concerne encore 45% des adolescents de 16 ans. La fréquence des API (alcoolisations ponctuelles importantes : 5 verres d’alcool ou plus en une seule occasion au cours du mois écoulé) diminue, est moins élevée que la moyenne européenne (31% vs 35%) et concerne surtout les garçons (35% vs 28%).

La consommation de cannabis recule notablement (8,7% entre 2014 et 2017), mais les jeunes Français restent de loin les premiers consommateurs en Europe (usage récent 17% vs 7%). De plus, 7,4% des jeunes de 17 ans en ont une consommation problématique (selon les critères du Cannabis abuse screening test). Pour les drogues illicites autres que le cannabis, les jeunes Français se placent en 3ème position en Europe pour les usages au cours de la vie (7% vs 5% en moyenne).

Pour chacune de ses drogues, il y a une augmentation importante de l’expérimentation au fur et à mesure de la scolarité.

Un impact possible de l’alcool et du cannabis sur le neurodéveloppement des adolescents

« Les addictions sont maintenant considérées comme des maladies chroniques » pour lesquelles il existe de multiples facteurs de prédisposition : héritabilité (génétique et sans doute épigénétique), pression des pairs, difficultés scolaires et comportements délinquants, disponibilité des drogues, recherche de sensations, attrait pour les activités transgressives, etc. L’impact des drogues sur les structures cérébrales conduit à « un contrôle inhibiteur moins actif, favorisant les prises de risque et la sous-estimation des conséquences négatives ultérieures des comportements à risque. » Les consommations intensives d’alcool et de cannabis peuvent entraîner une perturbation du neurodéveloppement des adolescents par blocage des voies fronto-thalamiques.

Une prévention à développer

Pour l’Observatoire européen des drogues et toxicomanies, la France connaît un « grave déficit d’information sur les drogues en milieu scolaire. » Plus largement, l’Académie propose de s’inspirer des interventions qui ont fait la preuve de leur efficacité à l’étranger pour l’alcool, le tabac et le cannabis, visant à développer les compétences psychosociales des enfants et des parents et à agir sur leurs motivations. Celles utilisant l’internet « sont pertinentes dans la mesure où 9 consommateurs problématiques de cannabis sur 10 n’ont aucun contact avec le système de soins. » Le rapport se prononce en faveur d’un renforcement des sciences de la vie et de la terre dans les programmes scolaires et de mettre à profit le service sanitaire des étudiants en santé, les interventions par des pairs ayant un impact certain. Il plaide pour l’augmentation du nombre de médecins scolaires (afin notamment de réaliser un repérage des consommateurs problématiques), le maintien de l’interdiction du cannabis, l’application de la législation sur la vente aux mineurs et la mise en place d’études d’évaluation des consommations et des comorbidités psychiatriques en particulier grâce à des dépistages anonymes et aléatoires.