Le variant anglais repérable grâce à un simple test RT-PCR

  • Aude Lecrubier

  • Nathalie Barrès
  • Actualités Médicales par Medscape
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France — Dans une note d’alerte publiée le 29 décembre, le Conseil scientifique COVID-19 fait le point sur l’émergence du variant anglais du SARS-CoV-2 et sur la « menace qu’il représente pour les pays européens ».

Il revient notamment sur trois questions importantes :

  • Quelle sont les capacités de diagnostic et dépistage du nouveau variant sur notre territoire ?

  • Les mutations du variant peuvent-elles rendre certains tests diagnostiques inefficaces ?

  • Comment gérer au mieux les flux humains entre le Royaume-Uni et la France ?

Une organisation du séquençage non-optimale mais des tests RT-PCR utiles

Pour identifier ce clone avec précision, il faut réaliser un séquençage génomique. Or, la France «  ne dispose pas du même niveau de séquençage de virus comparé au Royaume Uni », indique le Conseil scientifique.

Pour rappel, à ce jour, le consortium britannique séquence les génomes viraux provenant de 10% des patients positifs au Covid sur le sol britannique, ce qui permet une surveillance précise de ce qui se passe quasiment en temps réel.

Or, « à l’heure actuelle quand la France séquence 1000 génomes, le Royaume-Uni en séquence 100 000 », rappelait dernièrement le Pr Mylène Ogliastro ( directrice de recherche à l'INRAE de Montpellier et représentante de la Société Française de Virologie) dans nos colonnes.

Face à cette situation, pour aider au repérage des patients infectés par ce nouveau clone, la solution pourrait venir de certains tests RT-PCR.

Le Conseil scientifique indique que « des procédures de détection rapide par RT-PCR sont en cours de développement en Grande-Bretagne » et qu’en « France, le CNR des virus respiratoires a identifié un kit commercial (Thermo Fisher) qui permet déjà de surveiller une éventuelle introduction du clone VUI-UK ».

Comment un test RT-PCR peut-il détecter le variant anglais ?

Grâce à la délétion 69-70 au niveau du génome du variant anglais. Celle-ci « entraine une négativation de la détection du gène S de certains tests diagnostiques, tandis que la détection des autres gènes du virus inclus dans les mêmes tests moléculaires n’est pas affectée », expliquent les experts qui ajoutent : «  cette propriété pourrait s’avérer très utile pour la détection du clone VUI-UK ». Une analyse par séquençage serait ensuite nécessaire pour confirmer la présence du clone VUI-UK.

Le Conseil scientifique précise que les plateformes diagnostiques MGI des sites d’Amiens, Clermont-Ferrand, Lille, Lyon, Paris-Broussais, Poitiers, Rennes et Tours utilisent en routine le test RT-PCR pour lequel la détection du gène S est négativée en cas d’infection par le clone VUI-UK.

Les mutations du variant anglais peuvent-elles biaiser les tests antigéniques ?

Sur ce point le Conseil scientifique se veut rassurant. Il indique que « la plupart des tests antigéniques rapides (TRA) ou fondés sur l’ELISA détectent la protéine de nucléocapside du virus SARS-CoV-2. Ils n’ont donc a priori pas de raison d’être affectés par les mutations de la protéine Spike ».

Quid des régions françaises non couvertes par ces tests RT-PCR ?

Dans ce cas, le Conseil scientifique recommande «  une surveillance axée sur les zones d’incidence élevée de l’infection à SARS-CoV-2 sur le territoire français » réalisée de façon rétrospective (ex : analyse des souches ayant récemment circulé en Savoie et Haute-Savoie), et de façon prospective.

Rechercher la présence du variant  en France depuis septembre dernier

Le Conseil scientifique recommande de rechercher les clones viraux suspects d’appartenir au clone VUI-UK depuis septembre dernier.

Pour cela, il lui semble « pertinent de mener une enquête rétrospective afin de documenter la proportion de tests présentant cette négativation du gène S » sur les plateformes des sites d’Amiens, Clermont-Ferrand, Lille, Lyon, Paris-Broussais, Poitiers, Rennes et Tours au cours des 4 derniers mois.

« En cas de négativation isolée du gène S, une confirmation par séquençage de la présence du clone sera faite sur place ou via les CNR ».

Notons que les premières données issues des plateformes diagnostic MGI à partir d’une enquête rétrospective sur des virus isolés en décembre avec « un signal de risque » ne montrent pas la présence du clone anglais début décembre 2020.
 
Mesures vis-à-vis des personnes venant du Royaume-Uni 

« Dans le cadre du retour de personnes, routiers ou voyageurs, venant de Londres ou du Royaume Uni en général, il semble indispensable d’utiliser les moyens diagnostiques les plus performants pour identifier des éventuels porteurs symptomatiques ou asymptomatiques du clone VUI-UK », indique le Conseil Scientifique en préambule.

La technique la plus fiable est l’utilisation d’une RT-PCR COVID19 mais sa réalisation n’est pas possible à large échelle en Grande-Bretagne avec un délai de réponse actuel de 48 à 72h, précise-t-il.

Le Conseil scientifique préconise donc un dépistage rapide avec des tests antigéniques avant le franchissement de la frontière pour les chauffeurs de camions (environ 10 000 tests par jour).
 
Par ailleurs, pour les personnes rentrant de Grande Bretagne et rentrant en France, il est recommandé d’utiliser le test RT-PCR permettant la détection spécifique du clone VUI-UK, et de mettre en isolement toute personne symptomatique ou contact testée jusqu’au résultat du test RT-PCR. Les personnes-contact doivent refaire une RT-PCR à J7.
 
Aussi, à titre exploratoire, il pourrait aussi être proposé lors du franchissement de la frontière de faire des tests LAMP rapides (15 minutes qui pourraient détecter une infection en cours, sans caractérisation du virus responsable de l’infection.
 
Cette note devra être réactualisée en fonction de l’évolution des connaissances sur le clone VUI-UK, conclut le Conseil scientifique.
 
Le Conseil scientifique émet 3 recommandations :
  • Pour les laboratoires de virologie : en cas de signal de risque donné par la RT-PCR Thermo Fischer, séquençage de la souche sur place ou au niveau des CNR avec une centralisation des données.

  • Pour REACTing : mettre en place un suivi virologique des patients infectés immunodéprimés.

  • Pour les autorités de santé : avant franchissement de la frontière, possibilité d’utilisation de certains tests antigéniques reconnaissant la protéine N, quand le test RT-PCR (technique de référence) ne peut être utilisé pour dépister les professionnels ou les personnes venant de Grande-Bretagne.