Le vaccin méningococcique montre un bénéfice dans la prévention des IST

  • Nancy Melville
  • Actualités Médicales
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La dernière étude visant à démontrer l’efficacité élevée de la prophylaxie post-exposition par doxycycline (Doxycycline Post-Exposure Prophylaxis, Doxy PEP) dans la prévention des infections sexuellement transmissibles (IST) chez les hommes ayant des rapports sexuels avec des hommes (HSH) fournit de nouvelles informations en montrant pour la première fois des réductions de la blennorragie chez les personnes recevant le vaccin contre le méningocoque B.

« Parmi les hommes ayant des rapports sexuels avec des hommes sous PrEP du VIH, la PEP par doxycycline a significativement réduit l’incidence des infections à chlamydia et de la syphilis et a également eu un impact significatif sur l’incidence de la blennorragie », a déclaré le premier auteur, le Dr Jean-Michel Molina, lors de la présentation des résultats à l’occasion de la Conférence sur les rétrovirus et les infections opportunistes (Conference on Retroviruses and Opportunistic Infections, CROI) 2023.

En outre, « deux doses du vaccin contre le méningocoque B ont réduit l’incidence d’un premier épisode de blennorragie d’environ 50 % chez les hommes ayant des rapports sexuels avec des hommes », a déclaré le Dr Molina, professeur en maladies infectieuses à l’Université de Paris, et chef du service des maladies infectieuses aux hôpitaux Saint-Louis et Lariboisière de Paris, en France.

Alors que l’avènement de la PrEP a été associé à des réductions significatives de la transmission du VIH, les taux d’IST ont, à l’inverse, augmenté chez les HSH, en particulier chez ceux recevant une PrEP.

Il a été démontré que la Doxy PEP réduisait l’incidence des infections à chlamydia et de la syphilis d’environ 70 % ; cependant, les effets sur la prévention de la blennorragie étaient moins clairs.

La vaccination contre le méningocoque B a, quant à elle, montré des réductions intrigantes de l’incidence de la blennorragie allant jusqu’à 26 % à 46 % dans certaines études observationnelles.

Par conséquent, le Dr Molina et ses collègues ont décidé d’étudier plus en détail la Doxy PEP ainsi que le vaccin contre le méningocoque B dans la prévention des IST.

Pour l’essai ANRS 174 DOXYVAC, ils ont inclus 546 HSH dans l’étude multicentrique et ouverte menée entre janvier 2021 et juillet 2022.

Les hommes ont été affectés de manière aléatoire à l’un des 4 groupes :

  • Prophylaxie post-exposition par doxycycline (Doxy PEP : 200 mg ; n = 332), ou
  • Pas de Doxy PEP (n = 170), ou
  • Deux injections du vaccin contre le méningocoque B (vaccin 4CMenB ; n = 257), ou
  • Pas de vaccin 4CMenB (n = 245)

Tous les participants ont été affectés à leurs groupes dans les 72 heures suivant un rapport sexuel sans préservatif.

Les hommes, d’un âge médian de 39 ans, avaient une durée médiane d’utilisation de la PrEP de 42 mois, des antécédents d’une IST au cours de l’année passée, et leur nombre médian de partenaires sexuels au cours des 3 derniers mois était de 10.

Leurs caractéristiques étaient bien équilibrées entre les groupes de traitement. Après l’abandon de 54 patients dans les différents groupes, l’analyse finale incluait 502 participants.

Avec un suivi médian de 9 mois, l’analyse en intention de traiter a montré que 13 sujets avaient présenté un premier épisode d’infection à chlamydia ou de syphilis dans le groupe Doxy PEP, contre 49 sujets infectés dans le bras sans Doxy PEP, soit une incidence de 5,6 cas contre 35,4 cas pour 100 personnes-années, respectivement (rapport de risque corrigé [RRc] : 0,16 ; P < 0,0001).

Une infection spécifiquement par chlamydia est survenue chez 21 hommes sans Doxy PEP contre 5 hommes ayant reçu une Doxy PEP (19,3 cas contre 2,1 cas pour 100 personnes-années, respectivement ; RR : 0,11 ; P < 0,0001).

Par ailleurs, une syphilis est survenue chez 18 hommes ne recevant pas de Doxy PEP contre 8 ayant reçu le traitement (16,3 cas contre 3,4 cas pour 100 personnes-années, respectivement ; RR : 0,21 ; P < 0,001).

En ce qui concerne la blennorragie, l’incidence était de 41,3 cas contre 20,5 cas pour 100 personnes-années, dans le bras sans Doxy PEP par rapport au bras avec Doxy PEP, respectivement ; RR corrigé : 0,49 ; P = 0,001), et de 29,4 cas contre 16,8 cas pour 100 personnes-années pour l’infection à Mycoplasma genitalium ; RRc : 0,55 ; P = 0,015).

Tout au long de l’étude, environ 80 % des patients du groupe Doxy PEP ont rapporté avoir utilisé le traitement prophylactique après leur rapport sexuel le plus récent, les sujets ayant rapporté prendre une médiane de sept comprimés par mois.

Les effets du vaccin dans la prévention de la blennorragie sont « hautement significatifs »

Dans les comparaisons vaccin/absence de vaccin, 32 sujets du groupe n’ayant pas reçu le vaccin contre le méningocoque ont présenté une première infection blennorragique, contre 17 dans le groupe ayant reçu le vaccin, soit une incidence de 19,7 cas contre 9,8 cas pour 100 personnes-années, respectivement (RR corrigé : 0,49 ; P = 0,016), ce que le Dr Molina a qualifié de résultat « hautement significatif ».

Une analyse de l’incidence cumulée des infections blennorragiques avec le vaccin méningococcique a montré des taux dans les groupes sans vaccin comparativement aux groupes avec vaccin de 30,4 cas contre 20,1 cas pour 100 personnes-années, respectivement ; cependant, la significativité statistique n’a pas été atteinte (RRc : 0,66 ; P = 0,052).

Il est important de noter qu’il n’y a pas eu d’interactions significatives dans les résultats entre les personnes recevant la Doxy PEP ou le groupe ayant reçu le vaccin 4CMenB, et qu’aucune différence significative n’a été observée entre les groupes en termes d’événements indésirables graves liés au médicament.

Le Dr Molina a noté que le vaccin contre le méningocoque B est connu pour contenir des antigènes clés communs à la méningite et à la blennorragie, ce qui pourrait expliquer les bénéfices observés.

Bien que l’infection à chlamydia et la syphilis semblent, jusqu’à présent, rester sensibles à la Doxy PEP, les résistances observées dans le cas de la blennorragie restent une préoccupation. Par conséquent, la capacité du vaccin à fournir une certaine protection pourrait être un atout supplémentaire.

« Nous savons que la bactérie responsable [de la blennorragie] est capable de développer une résistance à n’importe quel antibiotique très rapidement, c’est pourquoi nous voulions aller au-delà de la prophylaxie par antibiotiques », a déclaré le Dr Molina.

La durée potentielle de la protection conférée par le vaccin fait partie des questions qu’il reste à explorer pour l’avenir.

« À ce stade, nous ne savons pas combien de temps la protection conférée par le vaccin peut durer, ou si [les personnes concernées] peuvent avoir besoin d’injections de rappel, par exemple, bien que la littérature suggère des bénéfices pendant au moins un an », a déclaré le Dr Molina. « Nous continuons à suivre les patients de l’étude pour voir ce qui se passe. »

Il a ajouté que l’association de ces interventions pourrait être bénéfique.

« À l’avenir, nous pensons qu’il faudra peut-être combiner ces approches si nous voulons atteindre les objectifs de l’OMS et de l’ONUSIDA pour réduire l’incidence du VIH et des IST de 90 % d’ici 2030. »

Dans un commentaire sur l’étude, le Dr Landon Myer, titulaire d’un doctorat, vice-président de la CROI, a noté que « la bactérie responsable de la blennorragie est capable de développer une résistance rapidement et peut être difficile à traiter ou à cibler par une prophylaxie. Dès lors, les résultats observés avec le vaccin, qui avaient déjà été suggérés par des données observationnelles antérieures, sont vraiment importants ».

Il convient que « la durée de l’efficacité protectrice, qui est un aspect important des vaccins, est inconnue ».

« Il n’en reste pas moins que ce résultat est très important », a souligné le Dr Myer. « Un vaccin efficace contre une infection sexuellement transmissible tenace. »

Conférence sur les rétrovirus et les infections opportunistes (Conference on Retroviruses and Opportunistic Infections, CROI) 2023 : Abstract 170. Présenté le 20 février 2023.

L’article a initialement été publié sur Medscape.com.