Le projet de loi sur la gestion de la crise sanitaire adopté par le Parlement
- Jean Bernard Gervais
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- Nathalie Barrès
- Actualités Médicales par Medscape
Ce n’est que tard dans la soirée du 25 juillet que le projet de loi sur la crise sanitaire a été adopté par une commission mixte réunissant députés et sénateurs, puis ratifié par le Parlement. La décision du Conseil constitutionnel sur le projet de loi sera connue au plus tard le 5 août.
Les principales mesures adoptées
- Le pass sanitaire équivaut au « résultat d’un examen de dépistage virologique ne concluant pas à une contamination par la covid-19, ou au justificatif de statut vaccinal concernant la covid-19, ou au certificat de rétablissement à la suite d’une contamination par la covid-19 »
- Le pass sanitaire est en vigueur jusqu'au 15 novembre 2021.
- Le pass sanitaire est instauré à partir de 12 ans.
- Le pass sanitaire est applicable à partir du 30 aout aux personnes qui travaillent dans les lieux où il est demandé.
- Le pass sanitaire est applicable aux mineurs de plus de 12 ans à partir du 30 septembre .
- Suspension du contrat de travail et de la rémunération, mais pas de licenciement, pour toutes les personnes qui doivent en disposer, mais qui ne peuvent le présenter.
- Mise en demeure de l'exploitant d'un lieu ou d'un établissement qui ne contrôle pas la détention des pass sanitaires pendant 24 heures, puis fermeture administrative si l'exploitant ne s'est pas mis en conformité. Si l'absence de contrôle de pass sanitaire est constatée à trois reprises, l'exploitant peut écoper d'un an d'emprisonnement et de 9.000 euros d'amende.
- « Les personnes faisant l’objet d’un test positif à la covid-19 ont l’obligation de se placer à l’isolement pour une durée non renouvelable de dix jours dans le lieu d’hébergement qu’elles déterminent ». Le non-respect de cet isolement de 10 jours est puni de 10 000 euros d'amende et de six mois d'emprisonnement.
- Entre la publication de la loi et le 14 septembre 2021, les professionnels soumis à l'obligation de vaccination doivent présenter le certificat de vaccination ou, à défaut, le certificat médical de contre-indication à la vaccination, ou le certificat de rétablissement, ou « l’examen de dépistage virologique ne concluant pas à une contamination par la covid-19 » pour continuer à exercer leur activité.
- A compter du 15 septembre, les travailleurs soumis à l'obligation de vaccination doivent présenter leur certificat de statut vaccinal, ou leur certificat de rétablissement, ou leur certificat de contrat-indication médicale à la vaccination, pour continuer à exercer.
- à compter du 15 septembre 2021 et jusqu’au 15 octobre 2021 inclus, les travailleurs soumis à l'obligation de vaccination peuvent continuer à travailler, si elles justifient de l'administration d'au moins une des doses du vaccin.
- le salarié soumis à l'obligation vaccinal et qui ne peut présenter ces documents peut se mettre en congé ou voit son contrat de travail suspendu, sans licenciement.
Un véritable marathon
L’adoption du projet de loi s’est faite en un temps record mais après de houleux débats. C’est finalement une Commission mixte paritaire qui a trouvé un compromis sur les différents points de divergence entre l’Assemblée et le Sénat.
Première étape, le texte a d’abord été adopté par l’Assemblée nationale dans la nuit du 22 au 23 juillet, par 117 voix pour, 86 voix contre et 28 abstentions. Un véritable marathon pour cette PPL sur laquelle avait été déposée, à l’Assemblée nationale, près de 1.198 amendements, et dont l'examen avait débuté par une motion de rejet déposé par l'opposition. La motion n'ayant pas été adoptée, l'examen de loi avait débuté en séance publique à l’Assemblée nationale le 21 juillet en fin d’après-midi par l'article 1 sur l’extension du passe sanitaire, qui a accaparé l'attention des parlementaires pendant plus d'une journée.
Extension du passe sanitaire
Et pour cause : cet article concerne l'extension du pass sanitaire. Pour rappel, le pass sanitaire mis en place par un décret du 1er juin avait déjà été élargi par un nouveau décret publié du 19 juillet, publié peu avant l'examen du projet de loi sur la gestion de la crise sanitaire.
L'article 1 de la proposition de loi adoptée le 22 juillet porte sur l’extension du pass sanitaire pour toute personne qui souhaite voyager. Mais aussi dans les établissements de loisir, les restaurants, les transports publics de longue distance, les grands magasins « au-delà d'un seuil par décret », mais aussi dans les établissements de santé, sociaux et médico-sociaux, sauf en cas d'urgence, pour les accompagnants de patients ou de résidents, ainsi que pour les patients accueillis pour des soins programmés.
Date de présentation du pass : à partir du 30 aout pour les professionnels qui travaillent dans les lieux visés et à partir du 30 septembre pour les mineurs de plus de 12 ans. L'article 1 prévoit aussi un régime de sanction en cas de non-présentation du pass sanitaire. Pour tous les professionnels qui ne seraient pas en mesure de présenter leur pass sanitaire à compter du 30 aout dans les lieux concernés, l'employeur pouvait décider de la suspension du contrat de travail et de la rémunération. Si, passé deux mois, le salarié n'était toujours pas en mesure de présenter son pass sanitaire, l'employeur pouvait décider de son licenciement pour "cause réelle et sérieuse". À noter que l'employeur devait aussi proposer à l'employé de l'affecter à un poste « non soumis » à l'obligation de la détention du pass sanitaire. C’est ce régime de sanction qui a été « adouci », par le sénat.
Les députés ont par ailleurs introduit un article 1 ter qui permettait aux directeurs des établissements d'enseignement scolaire d'avoir accès au statut virologique des élèves, et ce jusqu'au 31 décembre 2021. Cet article a également fait l’objet d’amendements votés par le sénat.
Isolement
Article 4 de la proposition de loi : placement à l'isolement de 10 jours pour toute personne faisant l'objet d'un test positif à la Covid-19, dans le lieu d'hébergement de leur choix.
Obligation de vaccination
Autre article crucial, le numéro 5 sur l'obligation de vaccination concernant sauf contre-indication vaccinale, les personnes travaillant dans les établissements de santé, les centres de santé, les maisons de santé, les centres et équipes de soins mobiles, les centres de lutte contre la tuberculose, les centres de dépistage gratuits, les services de santé au travail, les établissements sociaux et médico-sociaux (à l'exception des travailleurs handicapés), les résidences services pour personnes âgées.
Les députés ont aussi inclus les psychologues, ostéopathes, chiropracteurs, psychothérapeutes, les étudiants en santé, les employés des particuliers employeurs, les sapeurs-pompiers et les marins pompiers, les ambulanciers, ainsi que les distributeurs de dispositifs médicaux.
Dans la version adoptée par l’Assemblée nationale, amendée, cette obligation vaccinale prend effet au lendemain de la publication de cette loi, sauf pour les personnes présentant un résultat négatif à l'examen de dépistage virologique à la Covid-19.
Toutefois, à compter du 15 septembre prochain, tous les professionnels mentionnés ci-dessus devaient avoir présenté le justificatif de l'administration des doses de vaccins. Si ce n'était pas le cas, alors leur employeur devait suspendre leur contrat de travail et leur rémunération. Cette obligation a également été amendée par le sénat.
Le non-contrôle par l'employeur de l'obligation vaccinale de ses employés peut être puni d'un an d'emprisonnement et de 9.000 euros d'amende.
En tout, et pour tout, cette PPL comportait 12 articles et l'immense majorité des amendements déposés par l'opposition ont été rejetés. Ainsi, les députés ont bataillé pour que les personnes vaccinées d'une seule dose ne soient pas soumises au pass sanitaire.
Peine perdue : le rapporteur du projet de loi a fait valoir le fait que ces derniers ne sont immunisés qu'à hauteur de 30%...
En revanche, l'opposition a réussi à faire passer un amendement restreignant le pass sanitaire en établissements de santé aux seules personnes accompagnant ou rendant visites aux personnes accueillies ainsi que pour celles qui y sont accueillies pour des soins programmés, sauf en cas d'urgence.
Les Républicains ont fait adopter un amendement prévoyant une peine de cinq ans de prison et 75.000 euros d'amende pour toute personne amenée à détruire ou dégrader des lieux destinés à la vaccination.
La députée socialiste Lamina El Aaraje a fait pour sa part adopter un amendement concernant la vaccination des mineurs non accompagnés, qui pourront être vaccinés par les départements, lors de l'évaluation de leur minorité, ou sur autorisation du juge.
Amendement du Sénat
Transmis au sénat le 24 juillet, ce texte a fait l'objet, à la fois en commission des lois, mais aussi en séance publique, de nouveaux aménagements. Selon un communiqué du sénat, la commission des lois sénatoriales a ramené l'application de l'état d'urgence du 30 décembre 2021 au 31 octobre 2021. Elle a par ailleurs retiré des lieux soumis au pass sanitaire les commerces de vente à emporter, ainsi que l'accès aux grands magasins et aux centres commerciaux. Elle a également supprimé la possibilité de licencier les personnes qui ne seraient pas en mesure de présenter le pase sanitaire dans les entreprises qui y sont soumises. De même pour les lieux soumis au pass sanitaire, la commission des lois a préféré opter pour une fermeture temporaire de ceux qui n'auraient pas appliqué cette obligation, plutôt que des sanctions pénales. Elle a restreint la possibilité pour les directeurs d'établissements scolaires de consulter le statut virologique des élèves. Pour ceux qui utiliseraient des faux certificats de vaccination, la commission des lois a prévu une « peine de trois ans d’emprisonnement et de 45.000 € d’amende ».
Pour les professionnels de santé soumis à l'obligation vaccinale, la commission des lois a proposé de repousser au 15 octobre la présentation du justificatif de vaccination pour ceux qui auraient eu la première dose, et ce afin de les laisser travailler, à condition de présenter un test PCR négatif.
En séance publique, les sénateurs ont décidé de supprimer le pass sanitaire pour les mineurs (une mesure qui a ensuite été retoquée par la commission mixte), « limiter l’application du pass sanitaire aux espaces confinés en ne visant que l’intérieur et non les espaces extérieurs », (autre mesure supprimée par la commission), « repousser au 15 septembre la mise en place du pass sanitaire pour les personnes intervenant dans les lieux recevant du public », « homologuer en France tout vaccin reconnu par l’Organisation mondiale de la santé »... Le projet de loi amendé a été adopté par le Sénat le 24 juillet par 199 voix pour et 123 voix contre.
Commission mixte paritaire
La version du Sénat étant différente de celle adoptée par l'Assemblée nationale, une commission mixte, réunissant députés et sénateurs, a été constituée. Elle est arrivée à un compromis le dimanche 25 juillet. Selon un communiqué de presse du sénat, le texte adopté par le Parlement prévoit, in fine :
-
« le refus de tout licenciement en cas de non-présentation du pass sanitaire ou de non-respect de l’obligation vaccinale ;
-
la fin du régime d’exception avancée au 15 novembre, sauf nouveau vote du Parlement ;
-
le report du couperet, du 15 septembre au 15 octobre, pour les professionnels déjà engagés dans une démarche vaccinale. »
Ne reste plus au conseil constitutionnel qu'à se prononcer sur cette dernière version, avant la promulgation de la loi.
Cet article a initialement été publié sur le site internet Medscape.
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