Le Conseil d'État donne tort aux médecins intérimaires
- Jean-Bernard Gervais
- Actualités professionnelles
C'est une grosse déception pour le syndicat national des médecins remplaçants des hôpitaux (SNMRH). Le requête en référé qu’il avait déposée devant le conseil d’État pour faire suspendre l’instruction ministérielle du 17 mars 2023 [1] a été rejetée.
Cette instruction imposait des conditions drastiques de contrôle de la rémunération des médecins intérimaires. Le Dr Éric Réboli, président du SNMRH, joint le 2 mai dernier, avait bon espoir d'avoir été entendu par le Conseil d'État. Mais ledit conseil d'État a rejeté la demande de suspension du syndicat de médecins remplaçants, de manière lapidaire.
Que dit la loi du 26 avril 2021 ?
Rappelons que l'instruction contestée a vocation à faire respecter la loi du 26 avril 2021 [2] concernant la rémunération des médecins intérimaires : cette loi fixe, entre autres, un plafond de rémunération de ces médecins, qui est actuellement de 1.389,83 euros la journée, et devrait passer à 1.210,99 euros à partir du 1er septembre prochain. Au-delà de ce plafond de rémunération, dit l'instruction, des sanctions peuvent être prises, dont les principales sont le rejet du paiement de la rémunération du médecin, et des poursuites engagées devant le tribunal administratif contre les établissements fautifs.
Mais pourquoi donc le SNMRH a-t-il décidé de faire suspendre cette instruction ?
Outre le préjudice pécuniaire qu'implique l'application de cette instruction, le SNMRH, dans sa requête déposée devant le Conseil d'État [3] soutenait que l'application de cette directive ministérielle place les établissements de santé dans une situation dangereuse, eu égard au fait que les médecins intérimaires fuient ces hôpitaux, jugeant que la rémunération plafonnée imposée ne leur satisfait pas.
Aussi, le SNMRH affirmait que seul le Premier ministre pouvait, en publiant un décret, mettre en application le régime de contrôle des rémunérations des médecins intérimaires ; l'instruction du ministre de la Santé serait donc illégale en soi.
Par ailleurs, juge le SNMRH, cette instruction établissait une inégalité de traitement entre les médecins intérimaires et les agences d'intérim, ne respectait pas non plus la valeur des contrats, posait des problèmes en matière de constitutionnalité, était disproportionnée relativement au dépassement des plafonds de rémunération.
Le conseil d'État a balayé d'un revers de main les arguments du SNMRH, dans sa décision de justice en référé [4]. Sans se prononcer sur l'urgence qu'il y aurait à suspendre cette instruction, du fait de la carence en médecins intérimaires actuellement observée dans les hôpitaux, le conseil d'État juge que l'instruction n'est pas contraire à ce qu'établit le code de santé publique et la loi du 26 avril 2021, dite loi Rist, dont sont issues les dispositions visant à plafonner la rémunération des médecins intérimaires.
Par ailleurs, le fait que cette instruction ait été imposée par le ministre de la santé et non par le Premier ministre "n'est pas propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de cette instruction ministérielle".
Enfin le Conseil d'État juge que le caractère adapté et proportionnel de cette instruction ainsi que le respect du principe d'égalité doivent être traités via une question prioritaire de constitutionnalité (QPC) et non dans le cadre d'un jugement en référé.
Le SNMRH bien que déçu reste combatif
Dans un communiqué du 13 mai, le SNMRH fait part de sa déception, tout en affirmant rester combatif : "il est regrettable que cette ordonnance (du conseil d'État) n’ait pas pris position sur l’urgence dans les hôpitaux alors que c’est bien là, la grande préoccupation de tous. Cela dit, la question n’ayant pas été jugée, elle reste intacte et pourra, le cas échant, être traitée par une nouvelle requête." Le SNMRH rappelle aussi qu'une procédure sur le fond a été initiée, et compte bien désormais faire annuler la loi Rist du 26 avril 2021, "en déposant des questions prioritaires de constitutionnalité". Enfin, le SNMRH veut intenter des procès en justice contre tous ceux "qui propagent ces chiffres de propagande" sur les rémunérations des médecins intérimaires. En ligne de mire : la FHF "qui abuse de cette communication fausse et donc calomnieuse".
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