Le congrès du sommeil 2022 – La mélatonine a-t-elle une place chez l’enfant ?

  • Caroline Guignot
  • Actualités Congrès
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Comme chez l’adulte, la prise en charge des troubles d’insomnie chronique et du rythme circadien de l’enfant repose d’abord sur la psychoéducation avec les parents, sur une bonne hygiène de sommeil puis, si nécessaire, une intervention cognitivo-comportementale. C’est uniquement en cas d’échec de ce parcours de soins qu’une réflexion peut être engagée sur la prescription de la mélatonine  Par ailleurs, si les quelques études de sécurité menées sur l’impact de la mélatonine sur le développement de l’enfant sont rassurantes, elles sont fondées sur des données cliniques et invitent à la vigilance.contexte, comme cela a été rappelé au cours d’une session du Congrès du sommeil, qui s’est tenue à Lille du 23 au 25 novembre 2022.

Spécificité de la physiologie de la mélatonine chez l’enfant

La sécrétion endogène de mélatonine est différente chez l’enfant par rapport à celle de l’adulte. Ainsi, cette sécrétion est très élevée chez le nourrisson puis diminue assez fortement jusqu’à l’âge de 10 ans environ puis diminue plus lentement.

Par ailleurs, comme chez l’adulte, certains enfants sont dits ‘sécréteurs bas’, c’est-à-dire que le taux de sécrétion est faible, malgré un rythme de sécrétion au cours de la nuit qui est identique à celui des sécréteurs normaux. Pour l’heure, il est difficile de savoir si c’est le taux absolu sécrété ou plutôt la stabilité du profil de sécrétion nocturne qui a le plus d’impact sur le plan physiologique. La titration individuelle est donc indispensable avant d’envisager un traitement par mélatonine chez l’enfant.

Principales recommandations

Schématiquement, comme chez l’adulte (lien), la mélatonine à libération prolongée (LP) et immédiate (LI) n’ont pas les mêmes indications :

La forme LP est utilisée à visée substitutive. Elle est indiquée chez l’enfant pour un déficit de sécrétion, en cherchant à mimer le profil de sécrétion endogène physiologique. Cela concerne les enfants atteints d’un syndrome de Smith Magenis (troubles du comportement et du sommeil très sévère liés à une sécrétion endogène diurne de la mélatonine) ainsi que ceux atteints d’un trouble du spectre autistique ou TSA (63% des enfants TSA ont une sécrétion inférieure à la moitié de la sécrétion nocturne des sujets contrôles, sans doute parce que les enzymes de synthèse sont moins actives dans le TSA).

La mélatonine LI (0,5 mg 4 -6 heures avant le coucher) est envisagée, comme chez l’adulte, en amont pour une visée chronobiotique ou chronohypnotique, ou au moment du coucher pour un effet soporifique. Elle est prescrite devant un syndrome de retard de phase chez les enfants ayant une pathologie pédopsychiatrique (comme les troubles du déficit de l’attention/hyperactivité). Dans cette indication, l’augmentation posologique n’a aucun effet supplémentaire. Il faut par ailleurs noter que la diminution de la latence d’endormissement de l’enfant, peut en conséquence impliquer un réveil plus précoce, ce qui peut être compliqué pour les parents si l’enfant est un petit dormeur.

Chez les enfants sans troubles du neurodéveloppement ou troubles du sommeil associés à l’insomnie, les indications sont ténues. Ainsi, elle n’est pas indiquée dans les insomnies transitoires ou aiguës. La forme à libération immédiate de mélatonine peut éventuellement être indiquée dans les insomnies chroniques, si celles-ci ne répondent pas à toutes les prises en charge préalables (psychoéducation, TCCi…) dans trois situations : celles associées à un retard de phase non étiqueté comme syndrome véritable, celles ayant des répercussions majeures sur la vie familiale ou celle des enfants, et celles associées à des antécédents familiaux de chronotype nocturne ou de syndrome de retard de phase. Elle a un effet sur la latence d’endormissement et la durée de sommeil, mais le niveau de preuve est faible, il est donc nécessaire d’être prudent.

La posologie initiale (1mg/j) peut être très légèrement augmentée après une semaine de traitement jusqu’à 2mg. Les posologies supérieures n’ont aucune utilité. Il est dans ce cas nécessaire d’orienter l’enfant vers un centre expert.