La vitamine D, un rempart contre le cancer colorectal précoce ?

  • Nathalie Barrès
  • Actualités Médicales
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À retenir

La modification de l’alimentation, et notamment la diminution de l’apport en vitamine D pourrait favoriser le risque de cancer colorectal (CCR) précoce, c’est-à-dire survenant avant 50 ans. C’est en tout cas ce que met en évidence une étude menée sur une large cohorte de femmes américaines. Les résultats de celle-ci soulignent également que l’apport en vitamine D via l’alimentation diminuerait davantage le risque de CCR précoce que les supplémentations.

 

Pourquoi est-ce important ?

Des données épidémiologiques indiquent que malgré une diminution de l’incidence globale du CCR dans de nombreux pays, celle-ci continuerait à augmenter chez les adultes de moins de 50 ans. Or, les CCR diagnostiqués à cet âge sont bien souvent à un stade plus avancé, laissant supposer des mécanismes physiopathologiques différents et plus agressifs que pour les CCR survenant à un âge plus avancé. Des données de la littérature soulignent que la consommation de poisson, de champignons, d’œufs et de lait a diminué au cours des dernières décennies. Or, ces aliments sont des sources importantes de vitamine D.

 

Méthodologie

Cette étude a évalué l’association entre l’apport en vitamine D et le risque de CCR avant 50 ans. Les données sont issues de l’étude Nurses’ Health Study II, une cohorte de femmes américaines suivies depuis 1991. Les apports en vitamine D (alimentaires et par supplémentation) ont été évalués par des questionnaires spécifiques depuis leur inclusion. Un modèle prédictif des taux de vitamine D circulant a précédemment été validé. Il tient compte de l’âge, de l’origine ethnique, de l’IMC, de l’activité physique, de la consommation d’alcool, de la prise d’une substitution hormonale pour la ménopause, de l’irradiation solaire au lieu de résidence et de la saison à laquelle les prélèvements sanguins ont été réalisés. C’est ainsi que, par rapport à un apport <100 UI/j, un apport de vitamine D via l’alimentation ou par supplémentation ≥400 UI/j de 25-hydroxyvitamine D (ou 25(OH)D) a été associé à une augmentation des taux de vitamine D plasmatiques attendus de 2,49 ng/mL et de 2,70 ng/mL.

 

Principaux résultats

Sur les 94.205 femmes de la cohorte suivies entre 1991 et 2015, 111 cas incidents de CCR précoces ont été diagnostiqués. Les taux médians d’apports en vitamine D étaient de 372 UI/j. Les femmes de moins de 50 ans qui avaient les plus forts apports en vitamine D avaient tendance à avoir un IMC plus faible, à moins fumer ou boire d’alcool, à passer moins de temps devant la TV, à manger moins de viande rouge et/ou transformée. Les femmes qui avaient les apports en vitamine D les plus importants avaient également tendance à consommer plus de fibres, de folates et de calcium que les autres. Elles prenaient également plus souvent de l’aspirine et des supplémentations vitaminiques. Enfin, elles avaient tendance à être plus actives physiquement et à avoir des habitudes de vie plus saines que les autres.

Après ajustement multiple, il a été mis en évidence que le risque de CCR précoce était diminué de 51% chez les femmes qui avaient des apports en vitamine D ≥450 UI/j par rapport à celles dont les apports étaient <300 UI/j (hazard ratio (HR) 0,49 [0,26, 0,93], p=0,01). Les auteurs ont évalué que toute augmentation des apports en vitamine D de 400 UI/j diminuait le risque de CCR précoce de 54%. Le niveau de risque estimé restait semblable après retrait des femmes qui avaient des antécédents familiaux de CCR ou qui n’avaient pas eu de coloscopie dans les 10 dernières années. Les chercheurs ont évalué si les résultats étaient semblables ou non en fonction de l’origine des apports en vitamine D. Ils ont ainsi mis en évidence que les apports via l’alimentation étaient associés à une diminution plus importante du risque de CCR précoce que les apports via une supplémentation : toute augmentation de 400 UI/j des apports en vitamine D diminuait de 66% le risque de CCR précoce (HR 0,34 [0,15-0,79]) lorsque les apports provenaient de l’alimentation et de 23% lorsqu’ils provenaient d’une supplémentation (HR 0,77 [0,37-1,62]).

À partir des 1.439 adénomes et 1.878 polypes festonnés identifiés au sein de la cohorte durant le temps de suivi, les chercheurs ont également mis en évidence que les apports en vitamine D étaient inversement associés aux taux de ces précurseurs du CCR, sans confirmation d’une linéarité pour autant. Ainsi, tout apport en vitamine D de 400 UI/j diminuait de 24% le risque d’adénome et de 15% le risque de polypes festonnés (risque relatif (RR) 0,76 [0,65-0,88] et 0,85 [0,75-0,97], respectivement).

 

Principales limitations

Cette étude est basée sur des données observationnelles. D’autres études sont nécessaires pour comprendre les mécanismes sous-jacents.