La mortalité infantile ne baisse plus en France

  • Serge Cannasse
  • Actualités Médicales
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En un peu plus d’un siècle, la mortalité infantile française [1] (décès des enfants avant leur premier anniversaire) a baissé de façon considérable. Elle est passée de 141 pour mille en moyenne (France métropolitaine) à 3,6‰ en 2005. Mais depuis cette année, comme le montre une étude de l’INSEE (Institut national de la statistique et des études économiques), elle a cessé de diminuer, avec même une légère augmentation entre 2014 et 2017 : elle fluctue entre 3,5‰ et 3,9‰.

En 2021, sur 742.000 naissances, 2.700 enfants sont décédés dans leur première année (taux de 3,7‰). Environ la moitié de ces décès sont survenus moins d’une semaine après la naissance, un quart entre 7 et 27 jours et un quart après 27 jours de vie. De plus, la mortalité néonatale (dans les 28 premiers jours) augmente : elle est passée d’un taux de 65‰ en 2005 à 74‰ en 2021.

La mortalité infantile varie selon le lieu de naissance. Elle est plus élevée dans les départements d’outre-mer (en moyenne 7,7‰, dont 8,9‰ à Mayotte, 8,2‰ en Guyane, 8,1‰ en Guadeloupe, 7,2‰ en Martinique et 6,7‰ à la Réunion). Elle est supérieure à 5‰ dans quatre départements métropolitains : Seine-Saint-Denis (5,4‰), Jura, Indre-et-Loire, Lot. En revanche, elle est inférieure ou égale à 3,0‰ en Provence-Alpes-Côte d’Azur et dans les Pays de la Loire.

Cette évolution contraste avec celle de l’Europe, où en moyenne, la mortalité infantile continue de baisser (3,3‰ en 2020), bien qu’à un rythme très faible depuis 2012. Entre 1996-2000 et 2016-2020, la diminution du taux de mortalité infantile a été supérieure à 60% dans de nombreux pays d’Europe de l’Est : Roumanie (22,3‰ en 1996 versus 5,6‰ en 2020), Chypre, Hongrie, Bulgarie, Pologne, pays baltes. Dans ces mêmes périodes, elle a également été forte dans des pays où la mortalité infantile était déjà faible, comme la Finlande (baisse de 49%, avec un taux d’environ 2‰ depuis 2016). Aussi, alors que la France était en troisième position des pays européens ayant la plus faible mortalité infantile entre 1996 et 2020, elle est actuellement en 20e position.

Plusieurs facteurs peuvent rendre compte de la situation française, en particulier pour la mortalité néonatale (qui représente les trois quarts des décès). Il y a d’abord les progrès de la médecine néonatale, qui ont entraîné une augmentation des naissances de grands prématurés, qui n’auraient pas été comptabilisés autrefois, puisque morts nés. Il y a ensuite l’augmentation de plusieurs facteurs de risque défavorables :

  • L’âge de plus en plus élevé des femmes enceintes.
  • Jusqu’en 2010, le nombre de naissances multiples, puis stabilisé jusqu’en 2018, pour ne baisser qu’ensuite, à partir d’un plateau élevé.
  • Certains indicateurs de santé périnatale, dont Santé publique France souligne l’évolution « préoccupante », notamment dans les départements d’outre-mer.
  • La précarité sociale, signalée par l’augmentation des accouchements pris en charge par l’Aide médicale d’État (AME) et la diminution de ceux couverts par l’Assurance Maladie, ainsi que par l’augmentation de la proportion des sans-abris parmi les femmes qui accouchent, notamment en Île-de-France.
  • Le surpoids et le tabagisme chez les femmes enceintes.