La définition vague des aliments ultra-transformés

  • Serge Cannasse
  • Actualités professionnelles
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Aujourd’hui, les aliments industriels représentent plus de la moitié en masse des régimes alimentaires des Français. Parmi eux, les aliments ultra-transformés assurent en moyenne 30% de leurs apports caloriques quotidiens. Cette proportion peut aller jusqu’à 60% dans certains pays occidentaux (Royaume-Uni et États-Unis, par exemple). Or ils sont associés à plusieurs problèmes de santé. Il est donc impératif de limiter leur consommation.

Se présente alors une difficulté majeure : la définition même d’un aliment ultra-transformé. En effet, il existe au moins neuf systèmes de classification des aliments, tous complexes à mettre en œuvre, reposant sur des critères différents et dont aucun ne peut prétendre à servir de standard. Le plus utilisé dans le monde, y compris en France et en Europe, est le système NOVA (cette dénomination n’est pas un acronyme). Il classe les aliments en quatre groupes :

1 - Aliments non transformés ou transformés minimalement

2 - Ingrédients culinaires transformés

3 - Aliments transformés

4 - Produits alimentaires et boissons ultra-transformés

Est-ce un système fiable ? Pour s’en assurer, l’Inserm (Institut national de la santé et de la recherche médicale), l’INRAE (Institut national de recherche pour l'agriculture, l'alimentation et l’environnement), la Société française de nutrition, Bordeaux Sciences Agro, VAB-Nutrition et Ms-Nutrition ont réuni 170 experts (universitaires, cliniciens, professionnels de l’industrie alimentaire) et les ont chargés de classer les aliments issus de deux listes. La première comportait 120 aliments issus du commerce (produits laitiers frais, produits de panification ou plats cuisinés), présentés avec la liste de leurs ingrédients. La seconde contenait 111 aliments génériques (pommes, œufs, sodas, …) fréquemment consommés par les français, sans liste d’ingrédients, et issus de toutes les catégories d’aliments.

Les résultats sont pour le moins décevants :

  • Seuls trois aliments de la première liste (commerce) et un de la seconde (génériques) ont été classés dans le même groupe par tous les experts.

  • Dans le groupe « commerce », 90 aliments (sur 120) ont été affectés au groupe 4 (ultra-transformés), mais la classification des autres était très hétérogène.

  • Dans le groupe « génériques », 69 à 79% des aliments étaient attribués à un seul groupe, mais 28 aliments étaient répartis entre les quatre groupes.

  • Au total, 25% des aliments des deux listes étaient affectés de manière très hétérogène.

  • La connaissance des ingrédients par les experts ne modifiait qu’à la marge leur évaluation.

La conclusion s’impose d’elle-même : il est impératif de construire un système fiable de classification, « basé sur un algorithme reproductible », et ce d’autant plus que les termes « transformés » et « ultra-transformés » sont largement utilisés, sans qu’en définitive ils recouvrent des définitions précises.