La décision en situation d’incertitude
- Serge Cannasse
- Actualités Médicales
Toute décision est prise en tenant compte des informations disponibles la concernant. Ces informations sont soit données – vous décidez d’aller regarder un film après avoir vu une affiche ou lu un commentaire dans un journal –, soit recherchées – vous surfez sur le web pour avoir des opinions diverses sur ce film ou d’autres. Dans l’un et l’autre cas (observation ou exploration), la prise de décision s’accompagne de modifications comportementales. Jusqu’à présent, les dispositifs expérimentaux utilisés pour étudier la prise de décision ne faisaient pas de différence entre ces modifications et celles qui seraient spécifiquement liées à la recherche d’informations, donc à un contexte d’incertitude initiale.
Pour y parvenir, un dispositif ingénieux a été mis au point par une équipe française (Inserm, CNRS, ENS), associée à des chercheurs de l’université Harvard (Etats-Unis). Des paquets de cartes colorées sont présentés à deux groupes de sujets. Ceux du premier groupe doivent tirer le maximum de cartes d’une couleur déterminée par l’expérimentateur, sans savoir quelle est la couleur de la carte qu’ils choisissent. Pour cela, ils sont libres de choisir parmi les paquets et de changer de paquet quand bon leur semble. C’est le groupe « exploratoire ». Les sujets du second groupe tirent également des cartes dans les paquets, mais c’est l’expérimentateur qui choisit ce paquet à chaque tirage (groupe « observateur »), sans que les sujets sachent de quel paquet il s’agit. Leur consigne est de le deviner.
La situation exploratoire est liée à un sentiment plus fort d’incertitude, mais aussi à la volonté d’essayer de nouvelles stratégies, même si elles ne fonctionnent pas très bien au début. De plus, les enregistrements en magnétoencéphalographie (plus précise que l’IRM) montrent que l’exploration est précédée par une suppression particulièrement marquée des ondes cérébrales dans la bande alpha, un effet bien connu de l’attention. Enfin, l’exploration est associée à une dilatation pupillaire prolongée dans le temps, ainsi qu’à un retard des battements cardiaques à son déclenchement.
Ces données indiquent que les situations d’exploration s’accompagnent d’une augmentation soutenue de l’attention, perceptible jusqu’au niveau du système nerveux périphérique.
Pour les auteurs de ce travail publié dans eLife, ce protocole ouvrirait de nouvelles pistes dans certaines pathologies psychiatriques. Ainsi, commente Valentin Wyart, « le trouble obsessionnel-compulsif est caractérisé par des troubles du comportement en situation d’incertitude, mais l’origine de ces troubles reste encore mal comprise. Notre protocole expérimental pourrait expliquer certains de ces troubles par un déficit spécifique de l’exploration, et non par un déficit général de la prise de décision comme c’est souvent le cas. »
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