L’empathie, un outil relationnel pour réduire la douleur ?

  • Fauchon C & al.
  • Sci Rep

  • Agnès Lara
  • Résumé d’article
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À retenir

  • Les résultats en IRM fonctionnelle obtenus par une équipe Inserm du Centre de recherche en neurosciences de Lyon confirment que lors d’une stimulation douloureuse, une attitude empathique envers le sujet diminue la douleur perçue de 12%. Des résultats non observés en situation non empathique ou neutre.
  • Cette modulation de la perception de la douleur par une attitude empathique passe par les aires chargées de la réception des signaux douloureux, mais aussi par des réseaux neuronaux de haut niveau impliqués dans la l’attention à soi, la mémoire autobiographique, la conscience de soi, l’exploration du contexte… et permet une appréciation de la douleur.
  • L’augmentation de la connectivité fonctionnelle du cortex insulaire observée en conditions empathiques reflèterait le processus de contrôle sur la région de traitement de la douleur. 

 

 

 

Tous les soignants savent que l’attitude empathique est un élément clé dans la prise en charge de la douleur. Elle permet de prendre la juste mesure de la douleur et donc d’adapter les soins. Elle exerce aussi une influence positive sur la perception de la douleur par le patient. « La reconnaissance de la souffrance et l’empathie, peuvent diminuer la douleur du patient »  a expliqué Camille Fauchon, chercheur au sein de l’équipe d’intégration centrale de la douleur chez l’homme du Centre de recherche en neurosciences de Lyon. L’expérience douloureuse résultant de l’interaction entre les aires chargées de la réception des signaux sensoriels et des réseaux neuronaux dits « supérieurs », les chercheurs ont fait l’hypothèse que l’empathie pourrait moduler la perception de la douleur en modifiant l’activité de ces réseaux neuronaux de haut niveau.

Mesure de l’effet de l’empathie sur l’activité et la connectivité cérébrales

Trente sujets sains ont ainsi été soumis à des stimulations thermiques sur leur main gauche avec une intensité douloureuse de 60 sur une échelle de 100, alors qu’ils étaient placés à l’intérieur du tunnel du scanner. Durant l’expérience, ils écoutaient à travers un casque des commentaires neutres, empathiques ou non empathiques, des phrases écrites par des psychothérapeutes et jouées par des comédiens, et que les sujets pouvaient attribuer aux expérimentateurs. Les variations du signal BOLD (Blood Oxygen Level Dependant) cérébral en IRMf 3T et de la connectivité fonctionnelle étaient analysées durant la perception du signal douloureux dans ces trois conditions expérimentales.

La douleur perçue est réduite par l’empathie

Comme attendu, les stimuli douloureux activaient les aires corticales impliquées dans la réception de la douleur (cortex operculo-insulaire postérieur et antérieur, gyrus cingulaire moyen, aire motrice supplémentaire (SMA), cortex moteur et somato-sensoriel primaire). Mais la perception de la douleur variait de façon significative selon que le sujet recevait des commentaires neutres, empathiques ou non empathiques. Une réduction de la douleur perçue de 12% était observée lorsque les sujets recevaient des commentaires empathiques, par rapport aux commentaires neutres ou non empathiques (sans différence significative entre ces deux derniers). « Une réduction tout à fait significative au regard de ce que font certains médicaments » a relevé Camille Fauchon.

L’empathie active des réseaux neuronaux supérieurs

Durant la stimulation douloureuse, l’activation cérébrale augmentait dans le cortex insulaire antérieur, dans le cortex pariétal postérieur droit et dans le cortex préfrontal dorsolatéral, en conditions empathiques, alors qu’elle diminuait en conditions non empathiques versusune situation neutre. Par rapport aux conditions non empathiques, la diminution de l’intensité de la douleur perçue était associée à une augmentation bilatérale de l’activité dans le cortex cingulaire postérieur et le précunéus, le cortex préfrontal médial et le cortex préfrontal dorsolatéral. La connectivité fonctionnelle augmentait également de façon significative entre l’insula antérieure gauche et le cortex préfrontal médial et diminuait au contraire entre le cortex cingulaire postérieur/précunéus et le cortex préfrontal médial.