L’Observatoire du LEEM (Les Entreprises du Médicament) objective les difficultés de l’industrie pharmaceutique française
- Serge Cannasse
- Actualités professionnelles
Le LEEM (Les Entreprises du Médicament) a publié son premier Observatoire de l’accès aux médicaments et de l’attractivité en France 1, qu’il prévoit de renouveler tous les semestres. Comme il l’indique, cet observatoire a un objectif double : « Factualiser les éventuelles pertes de chance des patients français, en termes de disponibilité et d’accessibilité des médicaments ; mettre en perspective le niveau d’attractivité du territoire par rapport à ses voisins européens. » Les données proviennent d’institutions publiques, d’études internes au LEEM et d’une enquête menée auprès de ses adhérents. La conduite du travail a été confiée au cabinet Roland Berger.
Avant d’aborder les principaux résultats, il n’est pas inutile de tracer brièvement le parcours d’un médicament avant qu’il soit disponible pour les patients :
- Son autorisation de mise sur le marché (AMM) est délivrée par l’Agence européenne du médicament et l’ANSM (Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé).
- Son évaluation du « service médical rendu »(SMR) est confiée à la Haute Autorité de Santé (HAS).
- Son prix est négocié avec le fabricant au sein du Comité économique des produits de santé (CEPS).
- Il fait l’objet d’une parution au Journal Officiel après un délai administratif.
Des délais d’accès aux médicaments anormalement longs
Fin décembre 2022, un tiers (34%) des médicaments ayant reçu une AMM européenne entre 2018 et 2021 n’étaient pas disponibles en France (contre 13% en Allemagne). Le délai moyen d’accès à ces médicaments est supérieur de 380 jours à celui de l’Allemagne, de 179 jours à celui de l’Angleterre et de 72 jours à celui de l’Italie.
Il existe une procédure « d’accès précoce » qui permet la disponibilité de certains médicaments avant l’obtention de leur AMM, mais ce sont des produits « présumés innovants » concernant des maladies rares, graves ou invalidantes, à traiter en urgence mais sans traitement approprié. Cette procédure réduit le délai moyen d’accès de 295 jours, mais se solde souvent par une ASMR (amélioration du SMR) de niveau 5, le plus faible, avec un remboursement conditionné par une diminution du coût de traitement par rapport à ceux existants.
Entre 2019 et 2022, le délai médian d'évaluation des dossiers par la HAS a diminué de 22 jours, mais celui de négociation avec le CEPS et de parution au Journal officiel a augmenté de 96 jours. Parmi les médicaments ayant reçu une AMM entre 2017 et 2021, 13% sont toujours en négociation ou en attente de publication. Au total, le délai effectif français est loin du délai légal européen pour une décision relative au prix et au niveau de remboursement après réception de la demande, qui s’établit à 90 jours.
L’enquête auprès des industriels adhérents au LEEM montre que les principales causes de ruptures de stocks sont les aléas d’approvisionnement en matières premières, les tensions de marché avec d’autres pays et les aléas de distribution.

Des dépenses d’investissements peu encouragées
Les dépenses d’investissements restent stables, portant principalement sur des produits biologiques. Pour 64% des entreprises ayant répondu à l’enquête, elles vont rester stables dans les trois prochaines années. Elles portent avant tout sur l’augmentation ou l’adaptation (réglementaire ou de maintenance) des capacités existantes. Les principaux freins à une augmentation des investissements sont la complexité de la régulation, notamment administrative, les coûts élevés de production, en particulier ceux liés au travail, et les incertitudes sur les retours d’investissement. Par rapport à d’autres pays européens, la France produit peu de nouveaux médicaments.
Les trois quarts (77%) des entreprises enquêtées estiment que la France n’est pas un pays propice aux investissements, en raison des pressions budgétaires sur leur activité, de l’inflation des coûts (salaires, énergie, matières premières) et de l’imprévisibilité du contexte réglementaire, ce qui conduit à des difficultés d’anticipation. Enfin, « la France exporte de moins en moins les médicaments matures qu’elle produit et importe de plus en plus de produits innovants qu’elle ne produit pas suffisamment ».
Le rapport de l’Observatoire conclut que l’industrie pharmaceutique, qui emploie plus de 100.000 personnes, est « un secteur économique stratégique en perte de vitesse relativement à ses concurrents européens dans le champ de la recherche-développement et de la production de médicaments à forte valeur ajoutée ».
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