L’impact majeur des soins sur la pollution et l’empreinte carbone

  • Serge Cannasse
  • Actualités Médicales
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Dans l’évaluation de l’impact des activités humaines sur le réchauffement climatique, le rôle des soins « reste largement sous-estimé », d’après une revue de la littérature internationale effectuée par deux chercheuses de l’IRDES (Institut de recherche et documentation en économie de la santé). En ce qui concerne la France, on estime que le secteur de la santé est responsable de 8% (40 à 61 mégatonnes d’équivalents CO2) des émissions nationales de gaz à effet de serre (GES). Il est également une source majeure d’autres polluants environnementaux : ammoniac, monoxyde de carbone, méthanol, oxydes d’azote, matières particulaires.

De très nombreuses sources d’empreinte carbone

Le secteur hospitalier est le principal contributeur au réchauffement climatique (de 22 à 44% selon les pays), en lien principalement avec les soins aigus et les interventions chirurgicales énergivores, aux traitements comme l’hémodialyse, à l’utilisation de gaz médicaux et d’anesthésie, mais aussi aux produits alimentaires (transport et production), à la consommation d’énergie, aux déchets et aux bâtiments. Les soins ambulatoires représentent entre 10 et 23% des émissions, les soins infirmiers et ceux des personnes âgées entre 6 et 16%. En France, les produits pharmaceutiques sont responsables d’environ un tiers de ces émissions, le plus souvent en lien avec leur production et leur transport. À cela, il faut ajouter le transport des patients, du personnel de santé, des visiteurs et des produits médicaux (13%).

De nombreuses mesures ponctuelles peuvent réduire l’impact environnemental des soins. À titre d’exemple, 75% des émissions liées aux bâtiments pourraient être réduites en combinant le passage à des sources d’énergie à faible teneur en carbone à une réduction de la consommation d’énergie par une meilleure isolation et des habitudes de consommation d’électricité durables. Il faut cependant évaluer chaque mesure envisagée. Ainsi, passer d’un équipement anesthésique à usage unique à un équipement réutilisable contribue à diminuer l’empreinte environnementale à condition que l’électricité provienne de sources d’énergie renouvelable, mais pas lorsque ces sources sont fossiles.

Coordonner les mesures pour positiver leur impact

D’une manière générale, il est nécessaire de mettre en place un large éventail d’actions pour que leur impact soit significatif. C’est ce qu’a fait le NHS England (National Health Service) depuis 2008, ce qui a permis de réduire son empreinte totale de CO2 de 11% entre 2007 et 2015 et les émissions de GES de 18,5% entre 2007 et 2017. Dans une région de Suède, les émissions de CO2 ont été diminuées de 40% par patient grâce à un protocole environnemental. En France, un comité stratégique sur la transition écologique en santé a été créé au ministère de la Santé en mars 2023.

Au total, plusieurs priorités sont à mettre en œuvre:

  • Soutenir la diffusion des « innovations vertes » efficaces, telles que la réduction et le recyclage des déchets, le retraitement, le passage à des anesthésiques moins polluants et à des sources d’énergie propres, etc.
  • Réduire le gaspillage, notamment en mettant l’accent sur la pertinence et l’efficience des soins, selon le contexte et le profil des patients, tout en renforçant l’offre de soins de proximité et les consultations à distance.
  • Former les professionnels de santé et les impliquer dans la conception des interventions à retentissement climatique.

L’ensemble des mesures envisagées « resteront insuffisantes tant qu’elles ne seront pas accompagnées de stratégies de soutenabilité pour transformer l’offre et la consommation de soins. » Elles auraient non seulement un impact environnemental, mais aussi des effets positifs sur la santé des populations et la qualité du système de soins.