JFN 2021 - Enquête de pratique sur le diagnostic de dénutrition

  • Nathalie Barrès
  • Actualités Congrès
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Lors des Journées Francophones de Nutrition (JFN) jeudi 11 novembre, Guillaume ULMANN, pharmacien praticien attaché à l’AP-HP, a livré les premiers résultats d’un retour d’expérience sur la mise en pratique des recommandations HAS 2019 concernant le diagnostic de la dénutrition. Cette enquête visait à faire un état des lieux des moyens dont disposent les professionnels dans les services et d’évaluer l’impact et l’acceptabilité de ces recommandations.

Le public visé par l’enquête était constitué de diététiciens, médecins, infirmiers, aides-soignants adhérents de la Société Francophone Nutrition Clinique et Métabolique (SFNCM) et du propre réseau de ces personnes.

Le pharmacien a rappelé succinctement les grandes évolutions associées aux recommandations de 2019 : une définition de la dénutrition basée sur un critère étiologique et un critère phénotypique, sur l’introduction de la masse musculaire et de la force musculaire et le changement d’interprétation du bilan biologique.

Sur les 346 personnes ayant répondu à l’enquête, 67% étaient diététiciens et 24% des médecins. Par ailleurs, 60% travaillaient en centre hospitalier universitaire ou général.  

 

Par qui est réalisée l’évaluation nutritionnelle des patients ?

Sans grande surprise, 93% des diététiciens sont en charge de l’évaluation nutritionnelle. C’est le cas également de 71% des médecins séniors, 58% des infirmiers, 52% des internes ou externes.

À la question « À quelle fréquence réalisez-vous une évaluation de l’état nutritionnel de vos patients ? », 88% ont répondu pour tous ou la majorité des patients qu’ils prennent en charge, ce qui était égalemetn un bon indicateur du public touché par l’enquête. 

 

Comment les professionnels réalisent-ils l’évaluation nutritionnelle ?

Dans 62% des cas, l’évaluation est protocolisée. Dans les autres cas, soit il n’y a pas de protocole spécifique, soit il n’est pas connu de la personne qui a répondu à l’enquête. Guillaume ULMANN rappelle qu’ « il peut être utile de s’appuyer sur les CLAN (Comité de Liaison en Alimentation et Nutrition) pour transmettre ce protocole à tous les services.»

Presque 90% des sondés déclarent utiliser les recommandations de la HAS 2019 pour le diagnostic.

En revanche, dans 80% des cas, il n’y a pas de dépistage avant le diagnostic. Guillaume ULMANN : « Cela pose la question de savoir si le distinguo est bien fait entre l’outil de dépistage et l’outil de diagnostic. Car il existe des chevauchements entre les deux. »

 

Quel est le matériel mis à disposition des professionnels ? Et lequel est utilisé ?

Pour réaliser l’évaluation de l’état nutritionnel, les professionnels répondants ont déclaré disposer d’une balance (94% d’entre eux), d’une échelle d’évaluation des ingestats (67%), d’une toise (57%), d’un dynanomètre (40%), d’un impédancemètre (24%), d’une pince à pli (8%). Le faible recours à la toise laisse supposer l’utilisation d’un mètre ruban « talon-genou », ou du recueil de la taille déclarée par le patient. 

Parmi les outils les plus utilisés, les déclarants ont évoqué la cinétique de la perte de poids (93%), l’IMC (90%) – probablement en grande partie calculé à partir des tailles déclarées -, les critères biologiques (87%), les enquêtes alimentaires (79%). Le dynamomètre n’a été cité que pour un quart des répondants alors que 40% en auraient à disposition, et la composition corporelle que pour 14%.

 

À quelle fréquence la masse et la force musculaires sont-elles évaluées ?

Selon Guillaume ULMANN, « dans plus de 80% des cas, la masse musculaire n’est jamais ou rarement mesurée et la force musculaire n’est jamais évaluée dans 50% des cas et rarement dans 28% des cas.» De manière cohérente, les professionnels interrogés expriment un manque d’accès à ces techniques pour 50% d’entre eux concernant les outils d’évaluation de la masse musculaire et 40% les outils d’évaluation de la force musculaire. En revanche, les répondants estiment qu’il s’agit de techniques de valeurs et que leur intégration aux recommandations est justifiée. À la question « Envisagez-vous de vous équiper ? », 81% personnes ont répondu « oui », avec une priorité au dynamomètre dans plus de 50% des cas. Deux limites ont cependant été évoquées : le coût (pour l’impédancemètre) et la fiabilité du matériel (pour l’impédancemètre et le hand grip).

 

Et la biologie ?

Alors que 90% des personnes interrogées ont évoqué suivre les recommandations HAS 2019, à la question « À quoi sert l’albumine ? », 88% ont bien répondu en évoquant « À l’évaluation de la gravité de la dénutrition », mais 47% ont répondu « Au diagnostic de dénutrition » et 37% ont indiqué « Comme marqueur pronostic », alors que 5% indiquaient ne pas utiliser ce dosage dans l’évaluation de l’état nutritionnel. 

Enfin à la question « Est-ce que l’albumine est dosée par technique immunologique ? » La moitié des répondants ont indiqué ne pas savoir et seulement 41% ont répondu « oui ».  C’est un point important, puisque l’immunologie est la seule technique de mesure de l’albumine permettant d’évaluer la gravité d’une dénutrition avec une bonne sensibilité et une bonne spécificité.

 

Ces premiers résultats ouvrent le débat pour imaginer des solutions visant à améliorer l’utilisation des paramètres biologiques et la mise à disposition du matériel d’évaluation de la force musculaire et de la masse musculaire.