JDP 2022 - Faut-il rechercher et tester une manifestation de type allergique ?

  • Caroline Guignot
  • Actualités Congrès
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Tester ou ne pas tester l’étiologie allergique de manifestations cutanées n’est pas toujours une question facile, mais elle peut être orientée par trois points essentiels : le contexte, imposant un examen clinique complet ; la sémiologie des lésions dermatologiques et évidemment l’examen des circonstances de survenue des lésions. L’interrogatoire doit être complet, large, et ne rien omettre, car le patient ne pense pas à signaler ce dont il n’a pas conscience. Finalement, le recours à la biopsie ou au prélèvement pour une recherche de champignons ou de parasites doit être envisagé au moindre doute, dès lors que ces examens peuvent lever un doute ou répondre à une impasse diagnostique. Il faut parfois refaire certains tests négatifs (comme les patch tests) parce qu’une seconde étiologie se superpose ou que le test négatif est suspecté d’avoir été conduit avec le mauvais allergène. Ces différents sujets ont été évoqués au cours d’une session des JDP 2022 (29 novembre - 3 décembre 2022, Paris)

Les questions sur les conditions d’apparition des manifestations cutanées sont facilitantes pour identifier un potentiel allergène cutané : des lésions permanentes permettent de suspecter les objets du quotidien, tandis que celles qui s’améliorent le week-end ou pendant les vacances permettent d’évoquer une origine professionnelle. Mais quand rien - cliniquement ou dans l’histoire de survenue des manifestations cutanées, que ce soit dans les changements d’habitudes, de produits, de métiers - ne permet de penser à une allergie, il faut chercher une autre origine, même si la manifestation est typiquement eczématiforme, et a fortiori si un premier traitement par dermocorticoïdes n’est pas satisfaisante. Dans ce cas, une biopsie peut être utile ; elle peut par exemple conduire à identifier un mycosis fongoïde. 

Un érythème polymorphe récent, prurigineux, avec des lésions en cocarde, doit aussi inciter à rechercher l’utilisation de produits allergiques puissants (antiinflammatoires, huiles essentielles, méphénésine ou bois exotique) : dans ce cas, l’eczéma allergique est atypique, avec un eczéma localisé qui s'étend plus largement via un érythème polymorphe avec des lésions en cocarde. 

D’autres manifestations cutanées plus atypiques peuvent aussi avoir une cause allergique, comme l’ont montré les nombreuses réactions au DMF (diméthylformamide) qui ont été très médiatisées suite à l’affaire des fauteuils imprégnés provenant de Chine. D’autres allergéniques puissants peuvent aussi engendrer des dermatoses lymphomatoïdes de contact qui peuvent être prises voire traitées à tort comme des lymphomes. Ceci s’explique par la stimulation antigénique répétée et prolongée au contact du produit incriminé, qui transforme les lymphocytes en lymphoblastes. 

De même, d’autres formes plus atypiques d’allergie ont été décrites, comme les dermatoses lichénoïdes de contact, avec des lésions un peu violacées et infiltrées étendues, ou les manifestations bulleuses locales associées à une atteinte de l’ensemble du tégument à distance avec un aspect plus typique.

À l’inverse, certaines situations, si elles sont bien connues, permettent d’éviter de conduire des tests, malgré un aspect évocateur d’allergie : gale du nourrisson, qui tend à s’eczématiser (chercher des nodules scabieux sous les aisselles et la présence de lésions au niveau plantaire), maladie de Kawasaki (éruption cutanée et desquamation évocatrices d’herpès, œdème du visage, fièvre, adénopathies cervicales, atteintes oropharyngées), mycosis fongoïde (plaques chamoisées et encochées peu prurigineuses et peu évocatrices d’eczéma allergique répondant aux corticoïdes sans évocation claire d’une origine allergique). Et quand une manifestation dermatologique comme une kératodermie, apparaît relativement rapidement, chez un patient d’un certain âge qui n’a modifié aucune de ces habitudes de vie, d’autres causes doivent être recherchées (exemple : kératodermie liée à un cancer bronchopulmonaire).