JDP 2022 - Biomédicament, immunomodulation : risque infectieux et recommandations vaccinales
- Caroline Guignot
- Actualités Congrès
Selon leur cible thérapeutique, les différentes biothérapies n’ont pas le même risque d’infection. Il est important de le connaître, afin d’adapter l’option thérapeutique et la prévention individuelle et collective selon le profil de risque du patient. Valérie Pourcher (Paris) a résumé la conduite à tenir au cours d’une session dédiée des Journées dermatologiques de Paris (30 novembre – 3 décembre 2022).
Principaux risques infectieux
Historiquement, le premier risque infectieux décrit avec cette famille de molécule est celui de tuberculose sous anti-TNF alpha. Il s’agit souvent d’une tuberculose extrapulmonaire, survenant hors contexte à risque. Il est donc indispensable d’écarter toute tuberculose latente avant l’initiation du traitement (prescription d’une radiographie thoracique et d’un QuantiFERON). Les autres principaux risques sont l’infection virus varicelle-zona (VZV), les infections opportunistes (cytomégalovirus ou CMV, cryptocoque, listeria…), la salmonelle et les infections communautaires. Cependant, tous les anti-TNF n’ont pas le même risque, celui-ci étant le plus faible avec les protéines de fusion (étanercept).
Parmi les anti-interleukines, les risques sont spécifiques : les anti-IL1 favorisent principalement des infections respiratoires, les anti-JAK et le dupilumab préférentiellement une infection VZV ou par herpes virus (HSV) et l’apremilast les infections des voies aériennes. Les anti-CD20 sont associés à un sur-risque particulièrement marqué de réactivation d’hépatite B (un patient sous rituximab sur deux) et dans une moindre mesure à celui d’infections invasives à pneumocoque et de grippe, de COVID-19 ou l’infection par le virus JC.
Concernant les anti-IL17, il existe un risque d’infection VZV, d’aspergillose et de candidose localisée ou systémique. Cette dernière n’impose pas l’arrêt de la thérapie ciblée à moins que l’infection ne soit sévère, récidivante ou résistante, cas dans lesquels la durée de l’arrêt ou la pertinence de la reprise sont à discuter. Enfin, aucun signal n’est rapporté pour l’heure concernant l’omalizumab et le némalizumab.
Prévenir le risque : évaluer, s’adapter, vacciner
Le bilan initial global permet d’évaluer la possibilité d’instaurer une biothérapie que ce soit l’histoire du patient (mode de vie, profession, voyage, comorbidités, antécédents médicaux, tabagisme…) ou le bilan paraclinique (sérologie virale VIH, hépatites et CMV, et, selon les molécules VZV, toxoplasmose…). Une consultation de gynécologie, de dermatologie et chez le dentiste peut être pertinente.
Le calendrier vaccinal doit être à jour. Les vaccins recommandés doivent être réalisés sauf contre-indication. La vaccination contre la grippe, le pneumocoque et la vaccination contre le COVID-19 sont également recommandés. Le vaccin anti-HPV peut être envisagé. Il faut savoir que l’efficacité de la vaccination est moins élevée lorsqu’un patient est traité par anti-CD20 ou par corticoïdes. Par ailleurs, le vaccin diphtérie tétanos poliomyélite (DTP) est recommandé tous les 10 ans et non tous les 20 ans chez le sujet immunodéprimé. La vaccination doit idéalement être réalisée avant l’initiation thérapeutique et durant une phase quiescente de la maladie.
Les vaccins vivants (fièvre jaune, ROR, varicelle) sont contre-indiqués sous traitement immunosuppresseur, sous traitement ciblé biologique ou synthétique, ou sous corticothérapie per os à dose immunosuppressive. Quelle que soit la molécule (hormis les anti-CD20), un vaccin vivant ne peut donc être envisagé qu’après 3 mois d’arrêt du traitement au minimum, ce dernier ne pouvant être repris que 3 à 4 semaines post-vaccination. Avec le rituximab, il faut même attendre plus d’un an pour envisager ce type de vaccin, le retour de l’immunité à un niveau normal nécessitant jusqu’à 72 semaines.
Étant donné ces résultats, la vaccination de l’entourage (stratégie de cocooning) est intéressante pour protéger le patient qui ne peut être vacciné, ce qui peut être très important, par exemple contre le VZV.
En pratique, la vaccination anti-pneumocoque doit être menée en utilisant le vaccin 13-valent suivi, 2 mois après, du 23-valent. Un rappel tous les 5 ans doit être fait chez les sujets à haut risque. Sous anti-CD20, il faut attendre au moins 4 mois après la dernière administration avant d’envisager cette vaccination. Enfin, le vaccin contre VZV peut aussi être intéressant pour les patients dont le traitement expose à un sur-risque de primoinfection du VZV ou une réactivation.
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