Alors même qu'ils étaient l'un des traitements de l'insuffisance cardiaque à fraction d'éjection préservée, les bêtabloquants pourraient en aggraver le pronostic, selon les résultats d'une étude publiée dans le Journal of the American College of Cardiology (JACC).
Jusqu'à présent - et par analogie avec l'insuffisance cardiaque à fraction d'éjection réduite où leur bénéfice est bien démontré - les bêtabloquants font partie de l'arsenal thérapeutique des patients souffrant d'insuffisance cardiaque à fraction d'éjection préservée. Or, cette pathologie se caractérise souvent par une dysfonction chronotrope (incapacité du coeur à augmenter la fréquence cardiaque en réponse à un effort) et les bêtabloquants diminuent eux aussi la réponse chronotrope.
C'est ce paradoxe qui a conduit l'équipe de Patricia Palau (Valence, Espagne) a mettre en place une étude sur 52 patients présentant une insuffisance cardiaque à fraction d'éjection préservée associée à une dysfonction chronotrope et traités par un bêtabloquant. Les patients ont subi à l'inclusion puis à un mois (après randomisation pour la poursuite ou non du traitement) une épreuve d'effort pour mesurer leur consommation maximale d'oxygène (VO2 max).
Chez les patients toujours traités, la VO2 max était à 69,4% de la valeur prédite, contre 81,1% de la valeur prédite après arrêt du bêtabloquant.
Les chercheurs ont également rapporté une amélioration de la qualité de vie et de meilleurs chiffres de pression télé-diastolique du ventricule gauche. Ils n'ont pas noté d'effet négatif de l'arrêt du bêtabloquant sur le taux de peptide natriurétique ni sur les paramètres échocardiographiques.
L'insuffisance cardiaque (IC) à fraction d'éjection préservée (ICFEP) représente la moitié des insuffisances cardiaques. Cette affection est définie par quatre critères diagnostics : symptômes typiques d'insuffisance cardiaque (dyspnée, orthopnée, dyspnée paroxystique nocturne, fatigue, etc.), signes cliniques d'insuffisance cardiaque (œdèmes des membres inférieurs, turgescence jugulaire, reflux hépatojugulaire, râles pulmonaires, etc.), fraction d'éjection ventriculaire gauche normale (>50%) ou modérément diminuée (> 35-50%) avec un ventricule gauche non dilaté et maladie cardiaque structurelle significative (hypertrophie ou élargissement de l'oreillette gauche) et/ou dysfonction diastolique.
Alors que les patients souffrant d'ICFEP ont un pronostic global et un déclin fonctionnel similaires à ceux des patients atteints d'insuffisance cardiaque à fraction d'éjection diminuée, la physiopathologie de cette entité reste mal connue et peu de nouvelles options thérapeutiques ont été proposées au cours des dix dernières années. De ce fait, la mortalité associée à l'ICFEP reste élevée : 5 à 8% annuellement.
Présentés au dernier congrès de l'AHA, les résultats de l'essai EMPEROR-Preserved avec l'empagliflozine laissent à penser que ce traitement pourrait trouver rapidement sa place dans l'indication d'ICFEP.
Cet article a été écrit par
Lucie Brilleman et à initialement été publié sur le site internet MediQuality.